Bougazelli : La justice rampe, le parlement se couche

À quelques jours du Maouloud, une domestique a été manu militari placée en garde à vue trois jours durant par les “perspicaces” limiers du commissariat des Hlm-Grand Dakar, ce, suite à un crêpage de chignons avec son employeuse. Quelques jours plus tard, “l’honorable” député de l’Alliance pour la République, Seydina Fall  dit Bougazelli a été pris en flagrant délit dans une sordide affaire de trafic de faux billets devant le siège du Parlement, et pour un montant annoncé situé entre 32 et 50 milliards Cfa.

Après un semblant d’audition lors de laquelle il a avancé des arguments tirés par les cheveux pour se dédouaner, ce proche du président de la République est laissé libre de vaquer à ses occupations comme si de rien n’était. Diligenté à l’emporte-pièce, le dossier met de nouveau à nu les incohérences du système judiciaire sénégalais. Comble du ridicule, le député Seydina Fall prétexte une crise d’hyperglycémie pour se faire hospitaliser sans que le procureur de la République, si prompt à casser de l’opposant, ne daigne piper mot.

Les faits sont constants, les faits sont graves, les faits sont têtus. Il est indécent, dans un tel contexte, que des alliés du chef de l’État tentent de faire avaler à l’opinion des fadaises au nom de la présomption d’innocence.

On se pose des questions sur l’évaporation de centaines de kilogrammes de cocaïnes placés sous scellé et de la mise en liberté des personnes incriminées.

On se pose des questions sur la disparition de munitions de l’armée sénégalaise revendues sous le manteau au marché noir.

On se pose des questions sur la grâce présidentielle accordée à un trafiquant notoire de médicaments. Et on n’en a sûrement pas fini de se poser des questions sur le trafic de faux billets dans lequel trempe visiblement le député Seydina Fall, et sur ses éventuelles ramifications à des niveaux assez insoupçonnés.

Pour beaucoup moins, des opposants auraient été illico presto privés de leur liberté et seraient la cible d’une campagne de dénigrement orchestrée par la majorité présidentielle. S’exprimant samedi, en marge de la 21ème réunion du comité ministériel du Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (Giaba), le ministre de la Justice a fait dans l’esquive : «Mon avis est technique. Nous avons un pays qui est doté d’infrastructures efficaces qui permettent, quelle que soit la situation de l’individu, de faire en sorte que l’enquête aboutisse et que l’auteur soit remis à la justice. Je ne peux pas me prononcer sur l’immunité car je suis garde des sceaux, responsable de la justice et cette affaire n’est pas encore soumise au niveau de la justice», dixit Me Malick Sall au sujet de Boughazelli.

Dans un passé récent, le ministre enfonçait pourtant, de manière extatique, son ami Adama Gaye poursuivi pour offense au chef de l’État. La majorité parlementaire Benno bokk yakaar, sans l’aval de qui aucune immunité parlementaire ne peut être levée, préfère regarder ailleurs. Aymerou Gning, Abdou Mbow et leurs camarades n’auraient sans doute pas adopté la même posture si l’incriminé n’était pas dans leurs rangs.

Et au vu des actes posés depuis 2012, on ne saurait s’attendre à ce que ce groupe parlementaire place les intérêts du peuple au-dessus de ceux de Boughazelli et des gens qui le protègent. Seule lueur d’espoir en la matière, le susnommé a été pris en flagrant délit ; ce qui fait qu’il ne peut se réfugier derrière son immunité parlementaire en l’espèce. Mais on peut s’attendre à tout si Macky Sall se met un nouveau dossier sous le coude.

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here