La stratégie silencieuse du président du Parti Rewmi (Mamadou SY Albert)

Le silence persistant d’Idrissa Seck, candidat-président à la dernière présidentielle de février 2019, fait encore et toujours l’objet de controverses. Cette posture suscitant des lectures diverses revêt en soi, naturellement, une dimension énigmatique éminemment politique. Le rapprochement probable entre l’ancien Premier ministre et l’actuel président de la République, serait une hypothèse explicative du retrait de l’espace public et de la scène politique de l’animateur principal de la formation rewmiste. Cette explication ne semble guère crédible au regard des sorties médiatiques des proches de l’ancien maire de Thiès. Le sens du silence du président dun Parti rewmi est peut-être à rechercher dans sa nouvelle stratégie de conquête du pouvoir. Une stratégie moins conflictuelle en rupture avec la confrontation permanente d’avec l’adversaire exerçant le pouvoir étatique.
Le président du Parti rewmi est l’un des grands perdants des deux alternances politiques sénégalaises survenues en mars 2000 et en 2012. Il a été parmi les artisans et acteurs majeurs de la première alternance politique. Il fut  le chef d’orchestre de la campagne victorieuse de son candidat et celui de l’opposition de l’époque, en l’occurrence, Me Abdoulaye Wade. Il portera son maître au pouvoir avec la coalition Sopi. L’aventure politique de l’ancien second du Pds se terminera pourtant mal.
Il croisera le fer avec l’État libéral, le Parti démocratique sénégalais, son chef historique et ses alliés. Cet épisode a incontestablement affaibli politiquement l’ancien Premier ministre en dépit de son score électoral à la Présidentielle de 2007. Il se placera en deuxième position après le candidat-président à sa propre succession. La deuxième alternance survenue en mars 2012 à laquelle le président du Parti rewmi a participé avec un statut d’allié, ne lui ouvre point les chemins de la gouvernance partagée avec le Benno bokk yakaar.
Il quittera la majorité présidentielle. Le président dun Parti rewmi connaît ainsi, des hauts et des bas depuis l’avènement des alternances. Après trois candidatures à des présidentielles, Idy Seck est à la croisée des chemins menant aux urnes ou à la retraite politique : être candidat-président en 2024 ou préparer son retrait définitif du paysage politique ? Le président du Parti rewmi sera probablement bien présent à la future échéance électorale.
Son silence persistant relève d’une option stratégique mûrement réfléchie. Le président-candidat a vécu deux alternances fortement marquées par une communication politique conflictuelle entre le pouvoir et son opposition. Il fait partie, à l’occasion de ces confrontations politiques, parmi les plus distingués. Il reste un politique averti en matière de communication. Son silence persistant crée d’ailleurs un vide et un désir collectif de l’entendre s’exprimer avec son verbe tranchant, son imaginaire débordant et la tonalité de son discours dérangeant au plus haut sommet de l’État.
Ce silence cristallise, à n’en pas douter, un changement de stratégie politique et de communication. La communication de sa formation est désormais portée par ses responsables nationaux. Le président du Parti rewmi a décidé ainsi de prendre personnellement du recul dans le champ des confrontations et de laisser ses cadres assurer les responsabilités politiques nationales. Pendant ce temps de délégation du pouvoir aux responsables, le candidat-président se consacre à son image : chef de parti et candidat-président. Ce changement de mode de communication semble donner des résultats positifs.
Les résultats de la Présidentielle de février 2019 le plaçant au deuxième rang conforte ce choix du présidentiable à la recherche d’une coalition ratissant large. Le président dun Parti rewmi a probablement une carte à jouer. Il fait apparemment partie des alternatives au pouvoir de la seconde alternance. L’amorce de la création d’une coalition politique avec les anciens candidats-présidents et certains partis se réclamant du libéralisme est à inscrire dans cette recherche d’influence et de repositionnement stratégique d’un candidat-président à la conquête de l’opinion publique réfractaire à la communication conflictuelle. Il aura en face de lui des pôles politiques socialistes, patriotiques et libéraux. Dans ce contexte de changement à la fois de stratégie politique et de mode de communication, le rapprochement entre le président du Parti rewmi et le Président de la République, Macky Sall, est peu probable. Après avoir été victime et des grands perdants de deux alternances, Idrissa Seck ambitionne reconstruire à sa faveur les bases d’une alternance politique.

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