Super-Mackrond au Club de Paris

Depuis deux jours, les communicateurs tradimodernes sont de retour. A l’unisson, ils chantent les prouesses de Super-Mackrond, le héros intrépide qui est parti à Paris pour emprunter 2800 milliards aux bailleurs du Groupe consultatif qui, épatés, lui en ont prêté plus de 7000.

La fixation de la date de cette rencontre, à deux mois de l’élection présidentielle, laissait déjà présager une utilisation politicienne des résultats de ce tour de table. Les présidents de la Côte d’Ivoire et de la Guinée avait fait preuve de plus de courage en prenant rendez-vous avec les bailleurs de fonds après et non avant l’élection présidentielle. Ce fut de leur part une attitude pleine d’assurance mais aussi d’élégance républicaine.

Super-Mackrond ne pouvait s’autoriser un tel luxe, dans un contexte où le doute s’intensifie quant au succès des astuces qu’il a imaginées pour s’octroyer « techniquement » un second mandat avec seulement 35% des voix. L’utilisation abusive du Conseil consultatif comme un moment de précampagne électorale s’analyse alors comme un signe d’agitation voire d’anxiété.

Les rares informations ayant filtré des réunions de Paris indiquent qu’au moins un bailleur, la Bad, a clairement affiché ses annonces de financement « sous réserve des délibérations de son conseil d’administration ». Quid des autres bailleurs ? Super-Mackrond n’en informera jamais les Sénégalais qu’il s’apprête à cribler de nouvelles dettes, au moment où le Sénégal, sous son magistère, a décroché la médaille d’or de l’endettement en Afrique de l’ouest.

De même, il n’expliquera jamais ce qu’il compte faire de 7000 milliards alors que son portefeuille de projets est évalué à 2800. Derrière l’intention évidente de choquer l’opinion avec des montants faramineux, il y a peut-être autre chose, un non-dit ou un indicible.

La police française a interdit aux gros bras mackoutes déplacés pour l’occasion d’organiser une contre-manifestation, en fait de violenter les opposants et les citoyens venus exprimer leur désapprobation. Une autre information intéressante que les communicateurs tradimodernes ont omis de signaler aux lecteurs, auditeurs et téléspectateurs. C’est l’imprévu qui a gâché la fête et qui explique peut-être pourquoi on a aperçu à la télévision des visages aussi renfrognés devant la générosité alléguée des prêteurs.

S’il tire un bilan lucide de l’impact communicationnel de son équipée parisienne, au lieu de se dorloter et de se laisser dorloter comme d’habitude, Super-Mackrond va réévaluer sa stratégie de fascination des Sénégalais avec un story-telling manquant cruellement de crédibilité et de finesse. A raconter des histoires trop grosses, sinon carrément farfelues, on finit par irriter ceux que l’on espérait charmer.

Il faut aussi se méfier des histoires trop imbuvables, comme ce projet révoltant d’associer le nom du président Mamadou Dia à l’un des plus grands scandales de la gestion marron, la réfection du Building administratif, un projet de 17 milliards qui en a mystérieusement englouti 40.

Même un président désespérément conscient de son impopularité se doit de respecter la mémoire des morts. C’est une question de civilisation.

Mamadou Bamba NDIAYE

Ancien député

Coordonnateur général du Mps/Selal

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