Artistes et musiciens touchés par la crise financière

Le monde musical et artistique est durement frappé par la conjoncture économique qui plombe l’élan d’un secteur déjà précaire. Les cachets fondent, les parrainages disparaissent, les événements se raréfient. Et ceux qui vivaient des soirées en boîtes de nuit ne voient même pas la queue du diable.

Un cri d’alarme. Un requiem même. Touchés de plein fouet par la crise économique, les musiciens se retrouvent parfois sans ressources. Inquiets, certains qui peinent à transformer leurs prestations en moyens de subsistance, envisagent de raccrocher leurs instruments pour trouver une autre source de revenu. Même si quelques privilégiés affichent leur prospérité dans l’exubérance des consommations, la majorité des musiciens luttent pour joindre les deux bouts, fait remarquer L’OBS repris par PULSE  . D’après la même source, ceux qui vivaient des cachets de boîtes, de cabarets ou de concerts privés voient leur horizon se rétrécir. Les contrats s’amenuisent, les programmations se font rares, les revenus s’effondrent. Beaucoup, qui jadis remplissaient les salles, se produisent aujourd’hui presque bénévolement, par pure passion. Les dancings, autrefois viviers de talents, sont à leur tour frappés par la crise.

«C’est la catastrophe… Rien ne marche…»Alain Teixeira, chef de projet artistique chez Prince Art, interrogé par L’OBS ne mâche pas ses mots. « C’est la catastrophe. Rien ne marche. Les activités musicales sont au ralenti », tranche-t-il. Manager de Philippe Monteiro par ailleurs, il décrit une scène à bout de souffle : « Si tu organises une soirée en espérant 1 000 personnes comme il y a quelques années, tu en verras à peine 200. » « Avant, on pouvait parrainer une soirée à plusieurs. Chacun achetait des blocs et les distribuait. Aujourd’hui, ce système a disparu », regrette-t-il. Avec la crise, les priorités des ménages ont changé. « Les Sénégalais n’ont plus le cœur à la fête », soupire-t-il. « Le budget de production dépasse toujours les recettes. On organise désormais juste pour exister. Si on ne programme rien, on ne travaille pas. Et si on ne travaille pas, on est au chômage. »
Diners de gala, concerts d’entreprise inexistants
La raréfaction des dîners de gala ou des concerts d’entreprise accentue cette précarité. «Les sociétés n’ont plus de budget. Aujourd’hui, on survit», dit Alain, amer. Quelques rares artistes tirent leur épingle du jeu. VJ, par exemple, grâce à ses contrats variés. Mais pour la plupart, c’est l’agonie. «Même pour Titi, à Londres, nous avons dû réduire le nombre de musiciens afin de limiter les coûts», confie-t-il. À cette équation s’ajoute l’effondrement des répartitions musicales, autrefois un soutien financier. Résultat : musiciens, chanteurs et techniciens s’enlisent dans un cercle vicieux. Moins de spectacles, donc moins de recettes, mais toujours des charges constantes.

Makhtar Diop, patron du label «Soubatel Music», partage ce constat. Il confie débourser chaque mois trois millions de francs CFA pour assurer une résidence à «Baramundi», permettant à ses artistes de se produire. Malgré cela, la situation reste critique. «Avant, on pouvait programmer un artiste chaque week-end, parfois plusieurs fois dans la semaine. Aujourd’hui, ce rythme s’est brisé. Même pour des têtes d’affiche comme Pape Diouf ou Sidy Diop, il faut repenser la stratégie», explique-t-il. Les cachets, là aussi, ont fondu. «Les organisateurs négocient à la baisse. Beaucoup d’événements s’annulent faute de moyens. Et même quand le concert a lieu, les salles ne sont plus pleines.» La faute à une population étranglée par la vie chère. «Les sorties deviennent un luxe. Certains vont jusqu’à réclamer des tickets gratuits», raconte-t-il.

Face à cet étau, rares sont les artistes qui vivent encore uniquement de la musique. «Beaucoup complètent avec des animations privées, mariages, baptêmes, événements d’entreprise. D’autres investissent dans des activités annexes : commerce, restauration, projets avec la diaspora», détaille Makhtar Diop. Pour lui, le rôle du producteur se complexifie. «Il faut maintenir l’artiste concentré sur sa carrière, tout en l’aidant à survivre.» «Soubatel Music» mise désormais sur le digital. «Les plateformes de streaming, YouTube, les réseaux sociaux : ce sont devenus des outils incontournables», dit-il. Mais la diversification des scènes reste cruciale : festivals, concerts populaires, tournées internationales. «La diaspora sénégalaise est une chance : elle reste fidèle et prête à payer pour voir ses artistes.»