La violence physique laisse des marques visibles à l’œil nu. Mais la violence psychologique perturbe la victime mentalement. Dans cet entretien, Ndèye Khaira Thiam, psychologue clinicienne et spécialisée en pathologies psychiatriques est revenue sur les violences psychologiques avec l’enfance comme soubassement.
Comment reconnaitre une violence psychologique ?
Elles sont insidieuses, se signalent par une perte de l’estime de soi, une incapacité à prendre certaines décisions, des pensées limitantes, voire un retournement de la violence contre soi, un dénigrement de soi permanent, des mises en danger voire des états anxio-depressifs transitoires pouvant aussi évoluer vers une chronicisation ou le développement d’authentique syndrome post-traumatiques. Impossibilité pour un sujet de se satisfaire de ses accomplissements. Le plus souvent, le sujet qui en est victime ne les repère pas tout de suite, d’autant plus que notre environnement normalise ces violences dans l’éducation des enfants.
Quelle est la particularité de la violence psychologique ?
La violence physique se voit à travers le geste d’une gifle, les traces corporelles laissées par un coup de poing, de lacérations au fil électrique, une fracture du crâne après des jets de pierre etc. Les violences psychologiques ne se voient pas. Elles ne font que se signaler par des comportements, par des manières de les projeter au dehors en répétant ce qu’on a vécu sur une personne plus vulnérable, par des manières de parler, de se présenter etc. Pourtant les bleus à l’âme sont bien là, les déchirures, les fractures à l’intérieur de soi, les béances qui détruisent un sujet encore davantage quand il s’agit d’une enfant, d’une petite fille. Les blessures physiques se soignent puis disparaissent. Les violences psychologiques agissent comme un tatouage, y compris lorsqu’on a fait un grand travail sur soi. Elles seront toujours là et certaines sont comme une identité et mettront plus de temps à se remanier.
Vous évoquez la violence exercée sur une enfant. Est-ce un facteur aggravant ?
Il y a de ces insultes, de ces chantages affectifs, de ces rétorsions, de ces brusqueries et brutalités relationnelles qui font froid dans le dos même quand on est adulte. Les filles en particulier que l’on prépare à être des victimes de violences à vie sont particulièrement visées là où les garçons poussent comme des herbes sauvages sans un minimum de cadre, les préparant à devenir des auteurs de violences diverses et variées dont les violences psychologiques.
Quelles sont donc les clés pour y faire face ?
Il faut faire un travail sur soi non seulement pour situer les traces de violences avec lesquelles on vit mais aussi celles que l’on inflige aux autres. Il y a lieu également d’encourager toutes les initiatives qui prônent le respect de soi et des autres, la bienveillance, le soin etc. Mettre un terme à toutes ces émissions ultra violentes qui encouragent des faits de violences sur autrui, qui divisent les communautés, ou qui ont comme fonds de commerce la moquerie et l’humiliation. Mieux, il faut réguler les débats, ne pas mettre d’images choquantes à des heures où des enfants peuvent encore être devant des écrans et responsabiliser les adultes devant les problématiques comportementales de leurs enfants.
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