Et si Sonko n’avait que raison ?

Depuis quelque temps, l’affaire des 94 milliards qui défrayait la chronique semble se tasser. Pourtant, cela ne devrait étonner outre mesure, si l’on sait qu’Ousmane Sonko, qui avait levé le lièvre, a prévenu que cette affaire était devenue tellement gênante pour le régime qu’on n’en entendrait plus parler sous peu. Aujourd’hui, en tout cas, les faits semblent lui donner raison.

Côté pouvoir, c’est toujours le silence radio ! On ne sait pas pourquoi. Et c’est à se demander, finalement, si la commission d’enquête parlementaire mise sur pied avec force tapage médiatique, et la plainte déposée par Me El Hadj Diouf à grand renfort de pub, ne sont là que pitrerie pour ne pas dire du cinéma tout simplement. Parce qu’on ne peut pas comprendre, que le pouvoir ne soit pas dans les dispositions d’élucider cette sombre et scabreuse affaire, ni pourquoi il se prive de le faire, ne serait-ce que pour démonter ses arguments à Sonko et l’anéantir, lui qui ne cesse de leur donner du fil à retordre.

Côté justice, après les tergiversations et les louvoiements, il est à peu près sûr que ce dossier des 94 milliards risque de connaître un enterrement de première classe. Nul doute là-dessus. Ce qui passerait pour un manque notoire de respect envers les contribuables sénégalais, qui ont au moins le droit de connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire qui a défrayé la chronique.

Côté parlement, ce qui reste encore plus grave dans cette affaire Mamour Diallo, aujourd’hui, c’est le fait qu’une commission parlementaire ait été créée, non pas pour éclairer la lanterne des citoyens, mais plutôt brouiller les pistes de ce qui est apparu à tous comme légitime accusation. Rien que parce que la majorité est déterminée à casser du Sonko, qu’elle cherche à discréditer vaille que vaille.

Malgré tout, Ousmane Sonko répète à qui veut l’entendre qu’il maintient ses accusations et confirme détenir par devers lui tous les documents qui prouvent ses allégations. Et la Justice, quant à elle, même saisie, continue d’avoir les yeux fermés et de se boucher le nez et les oreilles, car elle ne veut rien savoir. Pourtant, ce qu’on attendait du Garde des Sceaux, c’est tout le contraire, c’est-à-dire, qu’il «assume toutes ses responsabilités», comme ce fut le cas dans l’affaire Adama Gaye.

Côté finances, le ministre en charge de ce département, Abdoulaye Daouda Diallo, qui avait l’occasion de profiter de la clôture du marathon budgétaire pour se prononcer sur cette question, a soumis tous les parlementaires à la religion du sans débat, pour faire adopter son budget en catimini. Une façon intelligente pour la majorité de lui éviter sans doute d’arpenter ce terrain glissant. Et dire que le jeudi 12 décembre dernier la Cour Suprême a confirmé la radiation de Ousmane Sonko de la Fonction publique par décret présidentiel numéro 22016-1239, pris le 26 août 2016, pour manquement à l’obligation de discrétion professionnelle. Pourtant Sonko n’est coupable que d’avoir mis à nu la mal gouvernance et les magouilles qui avaient cours au sommet de l’État. Que ce soit le non-paiement des impôts par les députés, ou encore la gestion nébuleuse des ressources pétrolières et gazières, dénoncée par le leader de Pastef, rien, à ce jour, n’est venu le contredire.

N’empêche, sa radiation a été confirmée ; comme du reste la gouvernance qu’il n’a eu de cesse de dénoncer, avec le déballage tous azimuts auquel on assiste entre les tenants du régime. Belle manière de confirmer que la transparence et la bonne gouvernance, ce n’est pas leur tasse de thé. Ousmane Sonko, que ce pouvoir s’échine à discréditer, lui continue de clamer haut et fort, à qui veut l’entendre, qu’après 15 ans de service aux Impôts et domaines, personne ne peut lui imputer le détournement de ne serait-ce que 50 francs.

Au moment où l’on assiste à des débats de caniveau de la part des apéristes, Sonko essaie tant bien que mal d’expliquer à ses compatriotes, arguments à l’appui, les tenants et les aboutissants du vote du budget. Aujourd’hui, à bien considérer les choses, il semble que Sonko n’est victime que de la loi du plus fort, parce qu’une loi qui impose au fonctionnaire le silence sur toute corruption, n’est qu’une loi inique et dictatoriale.

De toute façon l’histoire retiendra que Sonko, ayant fait un travail patriotique de dénonciation et de vulgarisation des magouilles de l’administration, aura été radié parce que le pouvoir ne voulait pas que le peuple soit informé des pratiques mafieuses auxquelles il se rendent tous coupables…

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