Le discours de fin d’année du Président de la République en exercice fait partie des bonnes pratiques politiques de la gouvernance des affaires publiques. Il est d’usage au Sénégal depuis l’exercice du pouvoir étatique du premier Président de la République, Léopold Sédar Senghor. Quatre chefs d’État se sont succédé à la tête du pays au cours des six dernières décennies.
Ce discours est devenu au fil de son histoire, ennuyeux, sans saveur et coupé des évolutions des modes de communication résultant du triomphe de l’internet. Il est peut-être temps de modifier le mode d’emploi de ce discours annuel présidentiel à l’adresse des citoyens de plus en plus exigeants en matière de communication politique institutionnelle et conquis par le net.
Les Sénégalais attendent du Président de la République Macky Sall, un autre type de discours proche du ressenti, du vécu national, africain, international de l’année écoulée et prospectif tourné vers les prochaines années. Un exercice d’équilibre risqué et difficile à mener entre dix et trente minutes.
Des pans entiers de Sénégalais attendent l’adresse du Président de la République, Macky Sall à sa Nation, à l’Afrique et au reste du monde. C’est la République, telle que façonnée et construite par le président-poète, Léopold Sédar Senghor qui le veut ainsi. C’est une règle dans la conduite et le fonctionnement de la République. Elle est établie et respectée dans son esprit et sa lettre par tous les prédécesseurs de l’actuel chef de l’État. Pour autant que ce discours présidentiel soit et reste si solennel, il devrait connaître des évolutions significatives dans ses modes d’expression, son contenu, son style et ses objectifs pour être consommable par les citoyens de son époque et de son temps.
Certains auditeurs se souviennent peut-être des échos des discours annuels fleuves ou sobres du premier président de la République à la radio et à la télévision. Le président-poète a su user intelligemment de sa parole, de son verbe, de ses gestes, de son style et de sa carrure intellectuelle, de poète, d’homme d’État, pour marquer de son empreinte, voire façonner les esprits de ses auditeurs, de ses spectateurs. Partisans du régime et adversaires accordaient une certaine épaisseur à ses discours politiques de fin d’année souvent polémiques. Les présidents de la République qui l’ont succédé ont préservé cet héritage républicain, ont consolidé ce rendez-vous chacun suivant son tempérament, sa personnalité et ses atouts personnels en matière de communication radiophonique et/ou télévisuelle.
Le son, l’image, la teneur politique du discours présidentiel restent au centre de la communication. Les modes d’expressions et de transmission de ce discours de fin d’année devraient impérativement tenir compte de l’impact massif de l’internet et des mentalités actuelles, singulièrement, des jeunes générations. Le net et le portable ont créé de nouveaux espaces, des réseaux sociaux et culturels. Ces espaces sont complémentaires aux foyers, aux milieux associatifs et communautaires traditionnels. La nouveauté impulsée par les Ntics se mesure aujourd’hui aux nouveaux espaces de communication, autres que la radio et la télévision. Les messages du discours institutionnel transmis à la radio et à la télévision sont accessibles simultanément aux citoyens détenteurs de portables, d’ordinateurs et de bien d’autres outils personnalisés. La culture numérique a créé ainsi un marché et des consommateurs autres que ceux qui ont les yeux et l’oreille rivés au poste de radio ou de télévision.
Dans ce contexte de modifications profondes des supports, des canaux de communication et des mentalités, la communication politique institutionnelle devrait accepter d’intégrer pleinement ces nouveautés de notre époque d’un village planétaire inter connecté. Cette diversité des supports et des canaux ouvre la nécessité de l’usage de nouveaux canaux de communication de masse que sont l’internet, le portable et l’ordinateur.
Parler à la radio, à la télévision en intégrant le réseau est désormais une exigence culturelle et politique. Ce changement élargissant davantage les canaux de la communication institutionnelle doit se conjuguer à un changement dans l’approche communicationnelle et la déclinaison du discours présidentiel. Tout change en matière de communication interpersonnelle, institutionnelle et politique de masse. La communication ira de plus en plus vite. Communiquer dans ce contexte de changement global des supports de masse et des modes d’expression de la communication exige de savoir parler bien et très peu. Un exercice risqué de se faire ennuyant et difficile.
Le Sénégal a connu au cours cette année des évènements politiques, économiques, sociaux, culturels et religieux. Ils vont du plus grand fait de société au plus anodin des évènements de la vie. Le pays a connu aussi des drames. Des moments de joie et des moments de peine se sont enchevêtrés durant l’année finissant. Vouloir parler de tous ces évènements grands, petits, douloureux et joyeux qui ont marqué la vie d’une Nation, d’un continent et de la planète, c’est la meilleure manière pour un Président de la République de passer à côté de son peuple. Il risque d’être zappé simplement. Dans ce flot d’évènements, le Président de la République devra traiter une problématique d’intérêt national dans sa globalité.