L’impérialisme n’est point un phénomène récent. Il est consubstantiel au développement du capitalisme. La volonté politique de conquérir des espaces commerciaux, des territoires et d’occuper des postures de domination et d’influence sur la gouvernance d’une région, d’un continent et du monde a nourri et nourrit encore de nos jours, le phénomène de l’impérialisme à l’échelle de la planète terre. L’impérialisme est l’expression d’un stade de développement économique et politique de l’économie capitaliste. Il a produit dans le passé le système esclavagiste et le système colonial puis, le modèle néo-colonial.
Les pays dominés constituent toujours les principales victimes de ce système inégalitaire par son essence. Il est régi par la recherche effrénée de débouchés commerciaux, économiques et financiers et le contrôle du pouvoir de décision. L’anti- impérialisme est une des conséquences du règne de ce système mondialisé. Il est un courant de pensée antinomique à cette trajectoire des sociétés contemporaines imprimée par l’évolution du capitalisme mondialisé. Ce courant anti-impérialiste de lutte aspirant à l’exercice de la souveraineté des peuples dominés et à une gouvernance plus éthique tournée vers la satisfaction des besoins fondamentaux des populations et de l’humanité, n’est point un ressentiment anti-étranger. Les prismes réducteurs des occidentaux ne perçoivent pas les véritables enjeux de l’anti-impérialisme en terre africaine.
Les dirigeants occidentaux et français établissent à tort un lien épidermique entre la lutte anti-impérialiste brandie par des pans entiers de la jeunesse africaine et sénégalaise et un certain ressenti anti-français dans le continent noir. Ce glissement à la frontière d’un nationalisme étroit et de la race, dans sa compréhension du phénomène du rejet de la domination des puissances occidentales en terre africaine ne correspond pas réellement aux véritables préoccupations des acteurs militants contre l’impérialisme, singulièrement français. Il ne s’agit point d’un ressentiment anti-français. La confusion entretenue entre ce ressentiment anti-français et la lutte contre l’impérialisme ne permet pas réellement de comprendre ce qui se passe dans la société africaine contemporaine. Encore moins d’envisager des comportements de rupture avec les modes de domination et de banalisation de luttes éminemment politiques.
L’anti-impérialisme n’est point une nouveauté. C’est un courant de pensée de lutte contre toutes les formes d’occupation étrangère. Il s’est exprimé en Europe, en Amérique et en Asie. Il s’est exprimé également en Afrique. Curieusement, son expression anti-impérialiste en terre africaine est perçue sous le prisme d’une lutte anti-étranger, anti- français et britannique. Depuis quelques années, certains responsables politiques européens, singulièrement français, stigmatisent des comportements africains tendant à réduire la lutte anti-impérialiste en Afrique à des sentiments anti-étrangers. Il n’en est absolument rien.
Le racisme contre l’homme blanc ou l’étranger est le fruit d’un imaginaire colonialiste. Cet imaginaire se poursuit de nos jours sous une nouvelle forme ressentie en termes d’anti occidental. Au-delà de cette perception raciale, nationaliste à souhait, l’anti-impérialisme est une lutte politique contre toutes les formes de dominations. Et, ce n’est guère par hasard si le système politique des occidentaux et des français soient la cible de cette lutte en terre africaine. L’Afrique continue d’être sous la domination des puissances occidentales, notamment de la France dans sa zone ouest.
Comment ne pas voir le retard de l’Afrique à l’échelle du monde. Le faible poids de l’Afrique sur la balance de la gouvernance du monde suffit à montrer que les pays africains restent à la marge du monde. L’anti-impérialisme est avant tout cette lutte politique endogène contre les dirigeants africains acceptant cette domination de l’Occident sur tous les leviers du développement. C’est faire un mauvais procès aux militants anti-impérialistes en faisant croire que cette lutte pour la souveraineté et la liberté est menée contre le peuple français et les français.
C’est à la France de prendre ses responsabilités historiques. Elle ne peut vouloir à tout prix préserver ses intérêts post-coloniaux en imposant un modèle de gouvernance et de développement à l’origine de la situation dramatique que vivent les peuples africains, singulièrement la jeunesse, et refuser que les Africains luttent pour devenir maîtres de leur destin. Ils aspirent être maîtres de leurs choix de développement dans un monde globalisé ne leur laisser que le choix de se battre pour devenir des partenaires et non des éternels dominés de l’Occident impérialiste.