Le mois de Ramadan 2020 devrait être un moment privilégié d’une réflexion profonde au sujet de l’humain, de son présent et son avenir. La condition humaine est fortement ébranlée dans ses fondements et ses certitudes carrées. Le système sanitaire mondialisé craque sous le poids de l’expansion du covid-19. L’impasse sanitaire est quasi totale en attendant le vaccin sauveur des patients. L’économie mondiale entre dans un processus de récession inédit.
La mondialisation triomphale croule ainsi sous le regard inquiet des experts les plus avertis de la finance et du commerce international. Ce moment de basculement du rêve brisé du progrès vertigineux des sciences et des techniques au service du capital constitue, pour tous les croyants et singulièrement pour les musulmans du monde – entrant dans quelques jours dans le mois béni de la spiritualité et de la dévotion – devrait être mis à profit pour réfléchir profondément au sujet du futur incertain de la fragilité de l’Humanité au 21ème siècle.
Dans quelques heures, les musulmans du monde entier vont entrer dans le mois de Ramadan. Durant 29 à 30 jours, les musulmans vont se consacrer à Dieu et à l’Islam. Ce seront des moments intenses de prières, de dévotion et d’un grand retour à l’Islam et au Livre coranique. Le Ramadan 2020 va se dérouler dans un contexte historique singulier fortement marqué par l’impact du covid-19. Des pans entiers de pratiquants de l’Islam, ressentiront les effets de la pandémie sous des formes très variées. Les mesures de la stratégie de lutte contre le coronavirus pour contenir, freiner et éradiquer ce fléau planétaire seront de sérieuses contraintes. Il faut faire avec les exigences de la protection individuelle et collective.
Les jeûneurs se priveront des regroupements de masse pendant les heures de prières et les moments de «Nafilas» très convoités par certains segments des croyants. Ils se contenteront des émissions religieuses traditionnelles servies par les islamologues et autres spécialistes de la religion musulmane.
Au-delà des privatisations de ces rituels collectifs, pendant ces semaines, l’impact du covid-19 planera très fortement sur le mois béni. Jamais jeûneur n’aura eu autant de temps libre à sa disposition pour se consacrer à Dieu et à la spiritualité. Certaines franges consacreront certainement plus de temps à la réflexion au sujet de l’humain, ébranlé par l’impact envahissant du coronavirus. Le confinement constitue, en effet, une occasion inouïe pour réfléchir en Islam, dans un contexte de fragilisation de l’Humanité. C’est une opportunité pour les musulmans, pour les catholiques, pour les animistes et pour les athées, de mener une introspection sur la condition humaine à l’épreuve d’une crise de société.
Le système sanitaire mondialisé a craqué sous le poids de l’expansion du covid-19. Ils sont des millions de porteurs du virus. On compte déjà des centaines de milliers de morts à l’échelle de la planète. Pour la première fois de l’histoire de l’après seconde guerre mondiale, les grandes et les moyennes puissances sont soumises à une épreuve sanitaire mortifère indépassable. Ces puissances économiques, industrielles, militaires, technologiques et scientifiques cherchent depuis plusieurs semaines la parade médicale à la pandémie. Point de solution dans l’immédiat !
Parallèlement à cet échec sanitaire des puissants, face à une nouvelle maladie emportant des vies humaines en série, le système sanitaire mondial ne se porte guère mieux. Il ne parvient pas à soigner de nombreuses maladies. L’Afrique constitue un exemple de la détresse sanitaire de l’humain. Le paludisme fait des désastres insoupçonnés dans le continent noir. À côté de cette maladie endémique, d’autres maladies ont fini par être des compagnons à vie de nombreux malades, tant dans les pays du Sud que dans les pays du Nord. L’impasse sanitaire transcontinentale est manifeste. Très peu de pays ont réellement des systèmes de santé capables véritablement de prendre en charge les vrais besoins en soins de santé publique.
Partout à travers les continents, le mal est identique : les déficits des budgets sanitaires, le manque de personnels de santé qualifié, se transforment en des maux structurels de la santé publique mondiale. Cette facette tragique de la santé publique mondiale pourra difficilement être occultée par les ravages de la pandémie mondiale et par le processus de récession inédit de l’économie mondiale.
Les maîtres de la mondialisation ont bâti la mondialisation autour du progrès des sciences et des techniques, d’une part, et le développement par la concentration des secteurs d’activités les plus performants, d’autre part. Ils ont délaissé le social, tout ce qui pouvait relever de la prise en charge des préoccupations fondamentales des travailleurs et des gens du bas peuple. La logique de la rentabilité, de l’efficience et de l’efficacité a modifié le visage de la planète sanitaire au cours de ces trois dernières décennies. Ce modèle porté par le commerce international globalisé, la circulation des biens et des personnes à une vitesse tectonique est subitement mis en mal par le coronavirus. Le monde des affaires est au ralenti. Des pans entiers de ce système vont s’effondre.
Penser cette Humanité est un devoir. Le futur incertain de l’Humanité, encore plus fragile, interpelle la conscience humaine. L’humain est au centre de cette introspection… Quelles que soient les croyances, les appartenances nationales ou continentales, il est temps que les hommes et femmes jettent un regard critique sur la marche du monde, ses faiblesses et ses paradoxes. Il est encore possible de changer le monde. Si un virus a réussi à frapper de plein fouet toute l’Humanité, malgré la richesse et le niveau atteint par les progrès de la Science, l’homme devrait être capable, par son intelligence, de transformer sa société.