Mettre le holà sur cette impunité qui risque de nous perdre…

Par El Hassane SALL

 

Il est communément admis que la plus grande richesse du Sénégal reste sa paix et sa stabilité. D’ailleurs, ce pays, petit par la taille mais grand par l’esprit de ses habitants, a toujours été cité en exemple du fait de la cohabitation harmonieuse entre les religions, les ethnies et les confréries etc. De sorte que le Sénégal a toujours été considéré comme un îlot de lumière dans un océan d’obscurantisme. Ce qui, d’ailleurs, se justifie par le fait que l’on parle souvent d’exception sénégalaise.

Mais le triste constat est qu’aujourd’hui, cette richesse tant enviée est en train de se rétrécir comme peau de chagrin à cause de dirigeants insouciants et inconscients, qui aiment plus leurs poches que leur pays et, qui dans leur volonté de spolier le pays de façon impunie, mettent en péril notre commun vouloir de vie commune. Parce que les évènements dans divers pays nous ont brutalement rappelé que le non-respect de la légalité entraîne souvent des révoltes populaires qui finissent souvent dans un bain de sang.

Comme l’indique d’ailleurs le rapport du Secrétaire général de l’Onu sur la «Consolidation de la paix au lendemain d’un conflit», «l’impunité chronique et le non-établissement des responsabilités jouent souvent un rôle dans le déclenchement d’un conflit. Il est essentiel de combattre l’impunité pour préserver l’État de droit ou le rétablir lorsqu’il fait défaut». Mais cela, nos autorités semblent n’en avoir cure. Non seulement ils ne combattent pas l’impunité, mais, pire, ils semblent même l’encourager. Sinon, comment comprendre, qu’avec la flopée de scandales qui jalonne le régime Apr, dont le dernier en date reste la libération de leur partisan pris en flagrant délit de faux monnayage d’un montant de plus de 32 milliards, la passivité des hommes de ce régime devant cette flopée ?

À ce jour, aucun acte tendant à mettre un terme à l’impunité des dirigeants n’a été posé. Alors que combattre les délinquants à col blanc est une œuvre de salubrité publique, un impératif de survie. Car ces prédateurs et autres faux monnayeurs sont des dangers publics ; ils sont dangereux pour notre économie, dangereux pour notre environnement, dangereux pour notre paix.

Pire ! Un faussaire pris en flagrant délit avec des milliards de faux billets est libéré alors que des activistes de la trempe d’Abdou Karim Guèye croupissent en prison pour des faits moins graves. Pourtant, ce fossoyeur de notre économie a été libéré pour raison de santé, dit-on, alors que tout le monde sait qu’Abdou Karim Guèye est lui aussi très malade, et le dossier médical présenté par ses avocats lors de son inculpation n’a pas été pris en compte par la justice qui l’a condamné à 3 mois ferme, malgré sa santé fragile.

Ce qui choque le plus, est le fait que le Président Macky Sall, lors du début de son magistère, criait sur tous les toits qu’il était en «mission» et qu’il ne comptait pas «reculer dans sa volonté de redresser le pays, quelles que soient les oppositions et les volontés de réticence». Il soutenait, en outre, qu’il n’y aurait pas «de citoyens de premier rang et des citoyens d’exception, la loi sera égale pour tous, que ça soit clair pour tout le monde», avait-il tonné.

Mais dans les faits, ses propos sont aux antipodes de ses actes. On a même du mal à croire que ces propos sont du même Macky Sall… Pire, il a même reconnu publiquement avoir mis le coude sur des dossiers brûlants. L’Imam Ali ne disait-il pas que : «Celui qui s’érige en maître pour éduquer les autres doit commencer par son auto-éducation. Il doit les édifier par sa conduite avant de les édifier par ses paroles».

Malheureusement, le triste constat est que nos dirigeants croient que tout se limite à parler, parler, toujours parler, rouler de la langue et roubler… Ils sont prompts à crier urbi et orbi que «le Sénégal est un pays de droit, que nul n’est est au-dessus de la loi, “Sénégal de tous pour tous”… et patati, patata». Mais leurs actes ne sont pas en conformité avec leur propos. Aujourd’hui, comme une nuée d’oiseaux granivores, ils engloutissent tout sur leur passage : les deniers publics, les ressources minières, le littoral, les licences de pêche, les terres etc. À propos des terres, Madiambal Diagne, dans une contribution parue hier et intitulée : «Finalement ils ont fait pire que les Wade avec nos terres», décrit la manière dont les tenants actuels du régime procèdent au dépeçage, au partage et au bradage de nos terres sans retenue. Pire, dans ce partage, on retrouve des autorités politiques, des hauts fonctionnaires, des guides religieux, des personnalités étrangères etc. Rien de nouveau sous le soleil, sommes-nous tentés de dire. Car ces mêmes propos ont été tenus par Pierre Goudiaby dans le numéro de Jeune Afrique paru le 30 octobre 2017, et dans lequel il disait ceci : «Le nouveau régime accorde des faveurs à ses obligés comme on distribuerait des médailles. Des politiques, des marabouts, des magistrats, des notables, des affairistes se voient gratifiés de parcelles cédées à vil prix et parfois revendues à prix d’or».

En 2015, les conclusions d’un rapport de l’Inspection générale des finances sur la gestion du foncier à Dakar de 2008 à 2013 font scandale : 26 personnalités se sont vu octroyer des titres fonciers sur la corniche, dont plusieurs ex-ministres et… deux magistrats. «Quand on a commencé à saisir la justice, ils ont offert des terrains aux magistrats», ironise Atepa. Pour dire que les Sénégalais sont mal barrés, car laissés à eux-mêmes. Parce que, quand ceux qui sont censés les protéger se coalisent pour les dépouiller, ils ont vraiment du souci à se faire pour leur avenir.

Dire que ça se passe sous le régime censé être celui de la gouvernance «sobre et vertueuse»…

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