Le Maroc nie l’espionnage de journalistes, “Mediapart” et “Le Canard enchaîné” portent plainte

Suite aux révélations sur des éventuels espionnages de journalistes par un service marocain, plusieurs médias ont porté plainte tandis que le Maroc dément.
 
ESPIONNAGE – Les plaintes seront bientôt déposées. Le site d’information “Mediapart” et l’hebdomadaire satirique “Le Canard Enchaîné” ont annoncé lundi 19 juillet qu’ils allaient déposer des plaintes à Paris, après des informations indiquant que les téléphones de certains de leurs journalistes ont été espionnés par un service marocain, à l’aide du logiciel israélien Pegasus.
 
“Les numéros des téléphones portables de Lénaïg Bredoux et d’Edwy Plenel (cofondateur du site) figurent parmi les dix mille que les services secrets du Maroc ont ciblés en utilisant le logiciel espion fourni par la société israélienne NSO”, a confirmé “Mediapart” dans un article publié ce lundi 19 juillet, après la publication de ces révélations dans plusieurs médias (dont Le Monde, le Guardian et le Washington Post).
 
“Pendant plusieurs mois, l’appareil répressif du royaume chérifien a ainsi violé l’intimité privée de deux journalistes, porté atteinte au métier d’informer et à la liberté de la presse, volé et exploité des données personnelles et professionnelles. Aucun autre téléphone d’un membre de l’équipe de ‘Mediapart’ n’a été espionné”, a précisé le journal en ligne. 
 
“Faire taire les journalistes”
 
Dans son article, le média d’investigation explique que le but était d’essayer de “faire taire les journalistes indépendants au Maroc, en cherchant à savoir comment nous enquêtions dans ce domaine”.
 
C’est pourquoi il indique avoir décidé de déposer plainte dès ce lundi au nom de ses deux journalistes, auprès du procureur de la République à Paris, pour que la justice puisse “mener une enquête indépendante sur cet espionnage d’ampleur organisé en France par le Maroc”.
 
Contacté par l’AFP, “le Canard Enchaîné”, qui fait partie selon Le Monde des médias français dont des journalistes ont été visés, a également assuré qu’il allait saisir la justice. “Nous allons porter plainte contre X avec constitution de partie civile”, a précisé Michel Gaillard, qui préside la société d’édition du journal, ajoutant que le dossier de cette plainte était en cours de constitution.
 
Le gouvernement marocain dénonce des accusations “mensongères”
 
Mis en cause, le Maroc a catégoriquement démenti lundi dans un communiqué le recours par ses services de sécurité au logiciel Pegasus.
 
Le gouvernement marocain a dénoncé comme “mensongères” les informations selon lesquelles les services du royaume “ont infiltré les téléphones de plusieurs personnalités publiques nationales et étrangères et de responsables d’organisations internationales à travers un logiciel informatique”.
 
Introduit dans un smartphone, ce logiciel permet d’en récupérer les messages, photos, contacts et même d’écouter les appels de son propriétaire.
 
L’enquête qui renforce les soupçons pesant de longue date sur cette société, publiée dimanche par un consortium de 17 médias internationaux, se fonde sur une liste obtenue par le réseau basé en France Forbidden Stories (“histoires interdites”) et l’ONG Amnesty International, comptant selon eux 50.000 numéros de téléphone sélectionnés par les clients de NSO depuis 2016 pour une surveillance potentielle.
 
La liste comprend les numéros d’au moins 180 journalistes, 600 hommes et femmes politiques, 85 militants des droits humains ou encore 65 chefs d’entreprise, d’après l’analyse du consortium – comprenant donc les quotidiens français “Le Monde”, britannique “The Guardian” et américain “The Washington Post” – qui en a localisé beaucoup au Maroc, en Arabie saoudite ou au Mexique.
 
“Nous ne parlons pas ici juste de quelques Etats voyous, mais d’une utilisation massive d’un logiciel espion par au moins une vingtaine de pays, a expliqué lundi la secrétaire générale d’Amnesty, Agnès Callamard, à la BBC radio. Il s’agit d’une attaque majeure contre le journalisme critique”, a-t-elle souligné.

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