Le vingtième jour du mois est une date importante pour la confrérie mouride et plus particulièrement la communauté Baye Fall. En effet, c’est ce jour que le fondateur du Mouridisme Cheikh Ahmadou Bamba avait rencontré son fervent disciple Mame Cheikh Ibrahima Fall.
L’illustre disciple, le combattant de la foi dont la vie a fini par être un modèle de disciple accompli que nous allons évoquer est un de ceux là qui ont cédé leur vie et leur bien en contrepartie de l’agrément de DIEU, un de ceux là qui se sont empressés de suivre la voie du pacte d’allégeance derrière un guide avéré. Serigne Bassirou Mbacké ibn Cheikh Ahmadou Bamba, dans » Minanou Bâkhil Khadim » Les Bienfaits de l’Eternel, raconte les propos qu’ils échangèrent alors, en cette circonstance mémorable. Cheikh Ibra Fall dit : » J’ai tout abandonné, tout quitté, renoncé à tout, pour chercher un Maître qui peut m’assurer l’accès au voisinage du Seigneur […] Si d’aventure je ne le trouverais pas en vie, je chercherai à identifier son mausolée. Et là, sur ce lieu sacré, avec une détermination inflexible, je consacrerai le reste de mon existence en dévotion et en actes si méritoires que DIEU m’accordera à coup sûr, le bénéfice du service que j’aurais accompli à ses côtés si je l’avais trouvé vivant.
A présent je fais acte d’allégeance auprès de toi. Je proclame que, de ce bas monde, je ne veux même pas, en biens, l’équivalent du poids d’un cheveu. Mon unique préoccupation est DIEU et ma demeure dans l’Au-delà. » A ces propos qui traduisent la profondeur et la sincérité de l’allégeance de Cheikh Ibra, Serigne Touba répondit : » Sache Ô toi Ibrahima Fall, que nous avons la même résolution. Mon guide, mon phare est Seydina Mouhammed (Paix et Salut sur Lui). Si d’aventure, je n’avais trouvé sur cette terre rien qui atteste de son existence, comme le Coran, les Hadiths, etc., il me suffira de la certitude que le même ciel, les mêmes astres que je vois ont, un jour, surplombé son auguste personne, pour me consacrer à son service. Et j’affirme que, par ce service, j’aurai
obtenu l’agrément de DIEU. J’agrée donc ton allégeance, mais à une condition, cependant : tu exécuteras à la lettre tout ce que je te commanderai et tu éviteras soigneusement tout ce que je t’interdirai. Plus rien de ce bas monde ne sera ta préoccupation. Seul DIEU occupera tes pensées et remplira tes intentions. Cela signifie que tu n’as rien à espérer comme biens en cette terre. Pas même un abri pour te procurer de l’ombre, à plus forte raison une maison.
Ne pense pas à fonder une famille. La raison est que, si tu veux obtenir la réalisation des vœux que tu as exprimés, tu ne dois plus rien désirer de ce monde périssable. «
Les rapports maître et disciple
Dès que Cheikh Ibra rejoignit le groupe des talibés de Cheikhoul Khadim, la vie de la communauté fut bouleversée. Il témoigna tant de respect, de vénération et de dévouement à Serigne Touba que bientôt tout le monde se conforma à son exemple. Désormais, personne n’osa plus regarder le guide dans les yeux ou s’asseoir sur le même niveau que lui. Finies les plaisanteries, les familiarités et autres marques de camaraderie. Un nouveau style de rapports avec le guide était né. La même déférence respectueuse, la même vénération indescriptible, la même confiance aveugle, les mêmes marques d’attachement viscéral dont Seydina Mouhammed (P.S.L.) était entouré par ses compagnons, furent bientôt dévolues à Serigne Touba par son entourage. Telle est la voie de la soumission.
D’ailleurs, entre cet entourage et Khadimou Rassoul, il n’y eut plus que des liens de soumission absolue, inconditionnelle, envers un Maître respecté et vénéré. Ses parents et sa famille directe, eux-mêmes, étaient logés à la même enseigne. Voila qui rappelle dans l’Islam l’épisode de Houdaybiya, ou le pacte de la pleine satisfaction conclu entre le Prophète et les compagnons en 630, soit l’an huit de l’hégire. Le Saint Coran relate en ces termes : Dieu a été réellement satisfait des musulmans lorsqu’ils te prêtaient serment sous l’arbre (S48V18).
Cheikh Ibra Fall a révélé à ses condisciples la vraie dimension de Khadimou Rassoul. Sa clairvoyance, a permis à la foule de disciples de bénéficier de ses immenses bienfaits. Son attitude allait en effet ressusciter le comportement que DIEU avait dicté aux compagnons et qui fonde en Islam la relation maître-disciple.
Il a plu à DIEU d’élever Khadimou Rassoul à un rang très élevé. Et ceux qui eurent le bonheur de recevoir de DIEU l’inspiration de lui prêter serment d’allégeance, furent bientôt élevés au-dessus de leurs semblables. Ce sont tous ces Cheikhs dont les descendants sont encore aujourd’hui les grands dignitaires du mouridisme.