Les chefs de famille sont angoissés à suffisance. Ils sont tenaillés par les difficultés économiques et une hausse vertigineuse des prix des denrées de première nécessité. A quelques jours de la fête de la Tabaski au marché Castors, tous les prix des produits alimentaires ont connu une augmentation. De l’oignon, à la pomme de terre, en passant par l’ail, le piment, entre autres condiments de grande consommation. Les dames interrogées sont interloquées. Elle ne savent pas où donner de la tête et tiennent pour le responsable le gouvernement qui laisse les commerçants dicter leur loi dans un contexte de crise aigüe et multiforme.
Au marché Castor. 9h 36mn tapantes. Les lieux grouillent de monde. Un méli-mélo indescriptible s’y règne. Entre les marchandages, les colporteurs qui hèlent les clients pour se frayer du chemin, les vendeurs de sachets et les petites disputes occasionnelles, impossible de garder ses nerfs intacts. Pire, les vendeurs de condiments debout devant leurs étales font du bruit avec des mains pour attirer les clients. Tandis que des camions poubelles et des clandos créent des embouteillages et bloquent la circulation. Cette ambiance électrique est surchauffée par les prix qui flambent.
Habillé d’un survêtement rouge et d’un pantalon beige, Ousmane Baldé appelé affectueusement «Oussou bb» par ses clients tient une boutique de ravitaillement dans le marché à quelques rues du marché aux poissons. Interpellé sur la situation du marché à l’approche des fêtes, il révèle que tout a augmenté.
«En ce moment, tout est cher. Tout a augmenté. En tant que grossiste, j’achète auprès de mes fournisseurs. S’ils augmentent les prix, je suis obligé de répercuter cette augmentation pour m’en sortir. À vrai dire, je ne comprends pas cette subite augmentation. On ne nous a rien expliqué mais comme depuis quelques temps, on est habitué à des prix qui valsent, on s’adapte», explique le jeune âgé de la trentaine.
Plus loin, les marchands ambulants brandissent des couteaux, des ustensiles de grillade, de barbecue et autres instruments indispensables au sacrifice et à la préparation du mouton. Pendant ce temps, un torchon a la main, Aminata Fall chasse les mouches qui survolent son étale de condiments. Rangés de manière harmonieuse pour faire ressortir leurs fraîcheurs, ils sont intouchables. En effet, la vendeuse déclare que « le kilo de tomate qui coûtait 1000 francs est à 1200 francs, le kilo d’oignon se vend maintenant à 600 francs au lieu de 300 francs tandis que le sac coûte 9 500 FCFA. De son côté, le sac de pomme de terre est à 10 500, le kilo à 600 francs. Les prix ont subitement augmenté sans raison. On achetait il y a peu de temps à 4 mille puis à 7 mille le sac de pomme de terre et maintenant, c’est à 9 mille, on ne comprend pas », explique-t-elle.
Après un tour effectué dans quatre magasins grossistes, même constat, même rengaine. «Tout a augmenté et les prix sont les mêmes. Le kilogramme d’ail est de 1000 francs, alors que le sac à 8500. Le piment 3500 francs le kilo, le poivre 4500 kilo tandis que le litre de la bouteille de vinaigre est passé de 400 à 500 francs. Cette tendance haussière n’a pas épargné le petit pot de moutarde qui est maintenant à 700 FCFA tandis que le pot d’un kilo est à 1600 (1200 FCFA). Mais le plus surprenant, c’est le cas du poivron vert qui est presque indisponible sur le marché, il est devenu aussi rare que l’or le kilo est vendu à 2500 francs alors qu’elle coûtait 800 francs le kilo.
Plus loin dans les allées du marché, les gens se bousculaient pour se frayer un chemin. Rencontrée dans une boutique où elle faisait ses achats, Khady Boye se lamente de la cherté et annonce que d’ici samedi, ce sera pire. «Chaque matin, les prix augmentent, on a du mal à joindre les deux bouts. Les condiments qui servaient pour la ration d’une semaine font à peine trois jours et avec l’approche de la Tabaski cela va être pire», fulmine la dame.
«Au Sénégal, c’est devenu une mauvaise habitude d’augmenter les prix en période de fête et c’est vraiment désolant», clame une autre mère de famille qui a préféré garder l’anonymat. Et de s’inquiéter : «comment allons-nous faire». Clients et commerçants se passent cette interrogation stoïquement et n’ont aucun espoir sur une possible régulation des prix des denrées de première nécessité.