Accident de Kaffrine : les témoignages glaçants des premiers secouristes

Ils sont habitants du village de Sikilo, pompier, agents de la Croix rouge et cameraman à la RTS. Premiers sur les lieux  du drame, ils ont témoigné dans L’Observateur. Âmes sensibles s’abstenir.
 
Ismaïla Diaby, habitant de Sikilo : «J’ai pleuré quand une femme…»
«C’est ma femme qui m’a réveillé en me disant qu’elle a entendu l’éclatement d’un pneu et des cris venant de la route nationale. Lorsque que j’ai tendu l’oreille, des cris très forts fusaient de partout. J’ai compris que c’était un accident. Arrivé sur les lieux, j’ai entendu des voix de femmes dans l’un des véhicules qui sont entrés en collision. Je suis entré dedans. Des jeunes du village m’ont rejoint et nous avons commencé à extraire des voitures les corps. Les uns nous suppléaient de faire vite pour les sauver. Les autres étaient coincés entre les sièges des véhicules. Pour éviter de blesser les victimes qui se tordaient de douleur, nous avons utilisé des sacs vides trouvés dans l’un des bus pour envelopper certaines personnes décédées. J’ai pleuré après que j’ai entendu une femme demander après sa fillette qu’elle portait dans ses bras et qui a été retrouvée morte entre les sièges. Mes habits étaient couverts de sang. Pour éviter que mes enfants les voient, je les ai enfouis dans un trou.»
 
Abdoulaye Dia, habitant de Sikilo : «Une vieille dame m’a tendu la main pour que je la sauve»
 
«J’ai été réveillé par le choc. C’était horrible. Les victimes criaient très fort. Je pense surtout à cette vieille dame qui m’a tendu sa main pour que je la sauve. J’ai réussi à la faire sortir du véhicule. Mais dès que je l’ai déposée au sol, elle a commencé à vomir du sang. Elle décédera par la suite. Après l’avoir enveloppée avec un drap, je suis retourné dans l’un des véhicules où des personnes étaient coincées entre les sièges. Les victimes étaient pour la plupart des jeunes hommes dont la moyenne d’âge varie entre 35 ans et 40 ans.»
Saër Fall, cameraman à RTS Tamba : «Une femme demandait à revoir son bébé avant de mourir»
 
«Nous sommes tombés sur l’accident alors que nous étions dans un bus en provenance de Dakar pour Tamba. Le choc était tellement violent que des personnes ont été projetées en dehors des véhicules. On voyait partout des chaussures éparpillées, du sang et des débris de glaces. Un enfant a été projeté hors d’un véhicule alors qu’il était dans les bras de sa mère. Cette dernière était coincée dans le bus et elle demandait à haute voix à revoir son enfant avant de mourir. En secourant certains blessés je suis tombés sur un collègue de la RTS, Papis Barry. Il était couché à même le sol et saignait abondamment. Il avait une fracture du bras et des blessures à la tête.»
 
El Hadji Mangane, président de la Croix rouge/Kaffrine : «Certains corps étaient en morceaux…»
«Je fais partie des premiers qui sont arrivés sur les lieux du drame. C’était horrible. Des victimes étaient coincées dans le tas de ferraille. Elles criaient très fort. Les morts jonchaient le sol. Ceux qui étaient en morceaux ont été mis dans des sacs. Les secouristes de la Croix rouge ont fait preuve de courage. Ils se sont donnés à fond pour essayer de sauver des vies.»
 
Ndongo Baba Ndao-Croix rouge/Kaffrine : «Mon rôle était d’identifier les corps sans vie»
 
«Dans le dispositive que nous avons mis en place, je m’occupais du rétablissement des liens familiaux (RLF). Mon rôle était d’identifier les corps sans vie. J’étais en contact permanent avec les parents des victimes. Je leur apportais une assistance psychologique. Ils en avaient besoin car ils étaient complètement dévastés. Je mesure leur détresse et leur souffrance. Ils étaient inconsolables. Je pense toujours à cette dame qui criait sans cesse pour avoir perdu son mari dans l’accident. Quand je lui ai dit qu’elle est mieux lotie que les femmes qui ne se recueilleront jamais devant la tombe de leur mari- je faisais allusion aux victimes du bateau Le Joola. Finalement, elles est revenue à de meilleurs sentiments. Les familles vivent un choc psychologique énorme.»
 
Capitaine Diène Ngom-Groupement des Sapeurs-pompiers : «On a été alertés à 3 h 15…»
«On nous a alertés à 3 h 15 du matin. À 3 h 17, nous avons quitté notre base pour arriver sur les lieux à 3 h 25. On a évacué les morts à l’hôpital régional de Kaffrine et les blessés graves ont été admis au district sanitaire de Kaffrine. Lors de notre intervention, on a dénombré 35 personnes décédées sur les lieux. Après évacuation des blessés, quatre ont perdu la vie à l’hôpital. Pour le déploiement, beaucoup de moyens humains et matériels des sapeurs-pompiers ont été mobilisés. Les véhicules du Samu national ont aussi participé à l’intervention.»

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