Procès pour diffamation de Ousmane Sonko : les éclairages tranchés de Ibrahima Ndiaye

Mame Mbaye Niang s’attend à ce que Ousmane Sonko produise la preuve de ses allégations qui portent atteinte à son honorabilité. Mais le leader du Pastef est libre de ne pas répondre au juge, prochainement, à en croire le Professeur de Droit des médias, en l’occurrence Ibrahima Ndiaye dont nous avons sollicité l’éclairage sur l’affaire. Comment le juge appréciera-t-il le dossier si le prévenu apporte ses preuves ? Que risque-t-il au cas contraire ? Et au cas où il décide de ne pas répondre au juge ? Notre interlocuteur n’est pas avare en réponses…
Ousmane Sonko est attendu après-demain devant le tribunal correctionnel de Dakar pour répondre des faits de diffamation, injures et faux et usage de faux portant sur des documents administratifs. Sera-t-il physiquement, cette fois-ci, devant la barre ? Ce n’est pas une obligation pour lui, à en croire Ibrahima Ndiaye, professeur de Droit des médias. « Ousmane Sonko a effectivement le plein droit de ne pas se rendre au tribunal. Le fait pour lui de ne pas venir physiquement ne constitue pas effectivement ce qui est important. C’est-à-dire qu’il vienne ou qu’il ne vienne pas, le procès aura lieu. En d’autres termes, s’il n’est pas dans la salle, il sera représenté par ses avocats. On dira donc que la partie est là par la défense qui représente la personne qui est citée devant le juge», a-t-il expliqué, hier, à Source A.

 

«En général, les juristes conseillent qu’il faut toujours aller se présenter parce que quelle que soit la maîtrise du dossier par les avocats, le juge peut poser des questions qui peuvent ne pas être répondues exactement comme a la possibilité de le faire le prévenu»

Selon, le juriste Ibrahima Ndiaye, « Mame Mbaye Niang peut ne pas aller au tribunal lui-même parce qu’il a ses avocats qui seront devant le juge.» Toutefois, si le mis en cause décide de ne pas répondre au juge, c’est à ses risques et périls. Ibrahima Ndiaye d’étayer son argumentaire en ces termes : «En général, les juristes conseillent qu’il faut toujours aller se présenter parce que quelle que soit la maîtrise du dossier par les avocats, le juge peut poser des questions qui peuvent ne pas être répondues exactement comme a la possibilité de le faire le prévenu. C’est la raison pour laquelle on dit qu’il faut aller répondre et effectivement parler de vive voix pour que l’on sache ce qui s’est passé . »

Afin que nul n’en ignore sur la diffamation, fait prévu et puni par l’article 258 du code pénal sénégalais, le spécialiste de dire : « Si un fait est allégué contre une personne et que ce fait porte atteinte à sa dignité, à son honorabilité, quelle que soit la situation, cela est constitutif de diffamation. Ce que Ousmane Sonko a dit sur Mame Mbaye Niang, c’est-à-dire qu’il a détourné de l’argent du Prodac, porte atteinte à l’honorabilité de Mame Mbaye Niang d’autant plus que la diffamation est faite à travers un moyen de diffusion publique – la télé et la radio. Il est important aussi de savoir qu’on sous-entend par-là que Mame Mbaye a volé de l’argent ; à noter qu’il a une honorabilité, une famille et un rang. »

Que se passe-t-il si les preuves sont produites ?

A l’heure où vont les choses, le droit donne la possibilité à Ousmane Sonko d’apporter la preuve de ses allégations, puisque ce qu’il a dit ne porte pas sur la vie privée de la victime. Mais que se passe-t-il si les preuves sont produites ? La réponse de Ibrahima Ndiaye tombe sèche : « S’il apporte la preuve, on constate qu’il n’a aucune animosité envers Mame Mbaye Niang. On comprendra qu’il y a effectivement un besoin d’informer concernant les deniers publics qui auraient été détournés par Mame Mbaye Niang. Dans ce cas, il pourrait se défendre d’autant plus que les faits ne remontent pas à 10 ans.»

« Si un rapport est fait, il sera disponible au niveau de l’Inspection générale des finances (IGF) ou au niveau de l’Inspection générale d’Etat (IGE) ou aux Archives»

Si Ousmane Sonko sort un rapport, précise notre interlocuteur, «le juge verra si le document est authentique ou pas. Parce que dans l’administration, il n’existe pas un seul exemplaire. Si un rapport est fait, il sera disponible au niveau de l’Inspection générale des finances (Igf) ou au niveau de l’Inspection générale d’Etat (IGE). Un exemple doit aussi se trouver au niveau des archives. Si vous sortez un document, on va demander aux archives, est ce que ce document-là existe ?»

En cas de culpabilité, le prévenu encourt un emprisonnement allant de 2 mois à 2 ans ferme ou avec sursis  

A coup sûr, s’il n’arrive pas à produire la preuve de ce qu’il a avancé, Ousmane Sonko sera sanctionné. « La même disposition du code prévoit un emprisonnement allant de 2 mois à 2 ans ferme ou avec sursis. À côté de l’emprisonnement, il y a une amende qui doit être payée à l’Etat et qui va de 100 000 F Cfa à 1 500 000 F Cfa. Et si Mame Mbaye Niang s’est constitué partie civile, il a le droit de demander 1 milliard pour dommages et intérêts. L’essentiel, c’est que c’est le juge qui va estimer les dommages et intérêts et il pourra les fixer au montant qui lui convient. Il pourra dire 10 ou 20 millions… Le juge est libre à ce niveau», indique Ibrahima Ndiaye.

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