Le 19 février dernier, une fuite de gaz est survenue au niveau de la plateforme Grand
Tortue/Ahmeyim (Gta) partagée par le Sénégal et la Mauritanie. Les autorités mauritaniennes ont annoncé l’ouverture d’une enquête, alors que la compagnie Bp, à la tête du consortium qui exploite le gisement, a très peu communiqué – se limitant à une déclaration qui fait état« d’une situation sous contrôle ».
FÉDÉRATION NATIONALE DES PÊCHES : « L’INQUIÉTUDE MONTE DE JOUR EN JOUR »
La Fédération Nationale des Pêches de Mauritanie et l’Ong Zakia sont inquiètes des
conséquences de cette fuite de gaz sur l’écosystème et l’activité économique. Elles l’ont fait savoir au cours d’une conférence de presse tenue à Nouakchott. « Les déclarations faites par Bp sont très restreintes jusqu’à présent. Nous avons vu qu’il y a eu un incident, on nous a dit que l’incident est maîtrisé mais que la fuite demeure et que son impact était minime. Minime, pour moi ça veut dire qu’il y a quand même un impact et nous ce qu’on voudrait savoir aujourd’hui c’est jusqu’où peut aller cet impact. Où va nous mener cet impact ? Nous on est concerné à plus d’un titre parce que quelque part nous on travaille dans ces zones-là, on vit un peu de ces fonds marins » déclare Béchir Ould Ahmed, président de la Fédération nationale des pêches section sud. Il assure que l’inquiétude monte de jour en jour. « Déjà on cumule beaucoup de problèmes par rapport aux aléas climatiques et par rapport à beaucoup de choses. Si aujourd’hui on devrait y ajouter des problèmes écologiques, franchement je pense que l’heure pour nous est vraiment très grave. Quand j’entends parler d’une fuite de gaz, ma peur est énorme parce je ne sais pas ce qui va avec une fuite de gaz. Est-ce qu’il n’y a pas des huiles ? Est-ce qu’il n’y a pas de
choses qui se déversent depuis bientôt 2 semaines à plus de 2800 m de de profondeur dans la zone sud, l’un de nos réservoirs de poisson ? Franchement l’inquiétude
monte de jour en jour » souligne Béchir Oul Ahmed.
ONG ZAKIA : « CET INCIDENT POSE DE SÉRIEUSES QUESTIONS QUANT À LA TRANSPARENCE DES OPÉRATIONS MENÉES SUR CE SITE STRATÉGIQUE »
Le secrétaire général de l’Ong Zakia, Bekay Samba Sy, émet sur la même longueur d’ondes. Il craint que la fuite de gaz ait un impact dévastateur sur l’environnement. « Les fuites de gaz naturels peuvent avoir des effets dévastateurs sur les écosystèmes marins, notamment en perturbant la biodiversité et en menaçant des poissons et d’autres espèces marines. De plus le méthane, gaz principal du gisement, est un gaz à effet de serre extrêmement puissant contribuant au réchauffement climatique, les risques de pollution de l’air et de l’eau sont également présents » souligne Bekay Samba Sy. Face à cette situation, l’Ong Zakia appelle à une action immédiate et transparente de la part des autorités mauritaniennes, sénégalaises et des compagnies exploitantes. « Nous réclamons une enquête indépendante pour déterminer les causes de la fuite, son ampleur et ses impacts réels ; la mise en place de mesures d’urgence pour contenir la fuite et limiter les dégâts environnementaux ; la transparence totale dans la communication des informations relatives à l’incident et aux actions entreprises. Le renforcement des normes de sécurité et de surveillance pour prévenir de futurs incidents est aussi souhaité, ainsi que la prise en
compte des communautés locales dans les décisions et mesures de réparation », mentionne un communiqué de l’Ong. Elle souligne que « cet incident, dont l’ampleur reste à déterminer, pose de sérieuses questions quant à la gestion des risques environnementaux et à la transparence des opérations menées sur ce site stratégique dont l’exploitation vient juste de démarrer dans le plus grand récif corallien en eau profonde du monde. »