Le long de la ligne de front, il n’y a aucun signe d’apaisement et même des inquiétudes côté ukrainien, avec des avancées russes rapides enregistrées près de l’axe routier entre Kramatorsk et Dobropilia dans la région de Donetsk, dont Moscou revendique l’annexion. Cette route logistique importante était déjà fermée à la circulation civile, car sous contrôle de drones russes depuis plusieurs semaines, rapporte notre correspondante à Kiev, Emmanuelle Chaze.
L’état-major de l’armée ukrainienne a affirmé, mardi 12 août, que des combats avaient lieu à Koutcheriv Iar, un petit village qui se trouvait il y a encore quelques semaines à plusieurs kilomètres du front, admettant de fait l’avancée russe dans cette zone. Ce mardi, le président ukrainien a assuré que la Russie se préparait à de « nouvelles offensives » en Ukraine. « Nous constatons que l’armée russe ne s’apprête pas à mettre fin à la guerre », a déclaré Volodymyr Zelensky sur X.
En une seule journée, la Russie a avancé d’une dizaine de kilomètres vers le nord le long d’une route, selon le site d’analyse militaire DeepState, proche de l’armée ukrainienne, un rythme bien plus soutenu que d’habitude. Une carte du front, publiée par DeepState, montre un étroit couloir désormais sous contrôle russe, ce qui menace la ville garnison de Dobropillia, au nord-ouest de Pokrovsk. « Là, il y aurait une percée », nous explique le général Jérôme Pellistrandi, expert militaire et rédacteur en chef de la revue Défense nationale : “C’est un vrai souci tactique pour les Ukrainiens, parce qu’elle est au cœur du Donbass et permettrait l’accès vers Kramatorsk, qui est toujours sous contrôle ukrainien. L’exploitation de cette percée permettrait aux Russes, d’augmenter leur contrôle sur l’oblast de Donetsk qu’ils ne contrôlent pas pour le moment et de déstabiliser la défense ukrainienne, qui est à la fois obligée de maintenir la ligne de front mais de réduire impérativement cette percée. Ce qui est un problème tactique très concret, alors même que les Ukrainiens ont un déficit, en particulier en ressources humaines.”
Les prochains jours « probablement cruciaux »
C’est une avancée rapide qui ne traduit aucune préparation à un gel des positions côté russe. L’armée de Moscou aurait percé les lignes de défense ukrainiennes pour tenter de prendre pied dans plusieurs communes près de Dobropilia, avec son infanterie et ses unités de drones.
Selon l’Institut américain pour l’étude de la guerre (ISW), « des groupes de sabotage et de reconnaissance russes infiltreraient des zones près de Dobropillia ». L’Institut a cependant affirmé qu’il était « prématuré » de qualifier les avancées russes de « percée opérationnelle », et que les prochains jours seraient « probablement cruciaux ».
La stratégie russe est bien rodée : submerger les troupes ukrainiennes grâce à une supériorité numérique en personnel et en drones, s’avancer dans des brèches de défense, quitte à reculer ensuite. Le tout au prix de pertes humaines énormes pour la Russie, en tentant d’épuiser les troupes ukrainiennes. Les prochains jours seront donc décisifs dans cette zone, pour voir si l’Ukraine arrive à contenir ou à repousser ces nouvelles avancées.
L’Ukraine craint que la rencontre entre les présidents américain Donald Trump et russe Vladimir Poutine ce 15 août, prévue pour l’heure sans la participation de leur homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, n’aboutisse à un accord qui la forcerait à céder des parties de son territoire à la Russie. « Au lieu de se montrer prêts à mettre fin à la guerre, les Russes déploient tous leurs moyens pour attaquer le front », a réagi le chef de l’administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermark.