Dr. Papa Demba Thiam, Economiste International : «On ne parle plus ni de comptes falsifiés , ni de dettes cachées , mais de problèmes systémiques identifiés »

Voici une erreur stratégique à ne plus commettre, sous peine de verser dans la fabrique de pauvreté au Sénégal. Passer au crible la déclaration de fin de mission du FMI (19-26 août 2025) me donne ce qui suit.

De nouveaux concepts-farces :

« Mauvaise déclaration », « problèmes systémiques identifiés dans le rapport de la Cour des comptes » et « passifs non divulgués ».

On ne parle plus ni de « comptes falsifiés », ni de « dettes cachées », mais de « problèmes systémiques identifiés » !

C’est un changement radical de langage, qui ramène le problème de l’évaluation du stock de la dette publique centrale à une simple affaire de système de comptabilité nationale.

S’il s’agit d’un « problème systémique », c’est qu’il a toujours existé. Alors, comment se fait-il que ni les organes fiduciaires (Inspection générale des finances, Inspection générale d’État, Cour des comptes, BCEAO, etc.) ni les missions du FMI et de la Banque mondiale ne l’ont jamais identifié, s’il affecte la solvabilité de l’État sénégalais ?

« Les autorités ont révisé le stock de la dette du gouvernement central de [74,4] % à 111,0 % du PIB fin 2023, principalement en raison de passifs non divulgués. »

Cela nous ramène aussi à un système de comptabilité, puisque les montants en question ne semblent pas avoir été « dissimulés » (ils ont été retracés dans d’autres comptes), mais auraient été « non divulgués ».

« À fin 2024, les statistiques révisées montrent une dette du gouvernement central atteignant 118,8 % du PIB. »

Ceci veut dire qu’en une année seulement (2024), la dette du gouvernement central se serait aggravée de 111 % du PIB à 118,8 % du PIB, soit 7,8 %. C’est énorme et très inquiétant !

Cela valait-il donc la peine de déclarer publiquement, en conférence de presse, des supposées « falsifications de comptes publics » pour :

  1. Entraîner les dégradations des notes souveraines de l’État ;
  2. Provoquer le blocage des décaissements des prêts du FMI à des taux concessionnels ;
  3. Faire peur aux autres créanciers et investisseurs ;
  4. Et finir par emprunter cher, à hauteur de près de 7,8 % du PIB sur une année ?

La réponse est mille fois NON, surtout que dans le même temps, des chaînes de valeur critiques ont été arrêtées, ce qui a ramené la croissance hors hydrocarbures à seulement 3,1 % !

Est-il cohérent et pertinent de faire dépendre le financement du développement du Sénégal d’une promenade de près d’une année dans les méandres procéduraux du FMI, pour espérer un programme avec cette même institution, comme si sa vocation était de financer le développement économique et social du pays sur des bases souveraines et endogènes ?

La réponse est mille fois NON !

J’ai donc le droit de rappeler que non seulement j’avais plusieurs fois mis en garde contre les résultats désastreux et prévisibles de toute cette aventure, mais encore que j’avais proposé des instruments de financement du développement économique et social du Sénégal totalement décomplexés de l’endettement public.

Par Dr. Papa Demba Thiam, Economiste International, Expert en Developpement Industriel Intégré par des Chaines de Valeurs, Thielle, Suisse.