L’Association sénégalaise des établissements de paiement et des émetteurs de monnaie électronique (Asepame) n’est pas favorable au projet de taxation sur les services de paiement et de transfert d’argent via des canaux digitaux. Et comme alternative, l’Asepame propose un prélèvement de 2, 5% sur les revenus des opérateurs.Par Dialigué FAYE –
La nouvelle taxe sur le mobile money continue de susciter des inquiétudes dans l’écosystème. Après la sortie de l’Organisation des professionnels des Tic (Optic), de certains vendeurs, syndicalistes et experts, l’Association sénégalaise des établissements de paiement et des émetteurs de monnaie électronique cherche, elle aussi, des voies et moyens pour faire revenir l’Etat sur sa décision. A l’instar de la majeure partie de ces acteurs, l’Asepame attire l’attention des autorités sur ce projet de réforme.
Pour rappel, dans le projet de loi modifiant le Code général des impôts soumis lundi 15 septembre 2025 à l’appréciation des députés, «le taux de la nouvelle Taxe sur les opérations de transfert d’argent (Tta) est fixé à 0, 5% et son montant est plafonné à 2000 francs Cfa par transaction.
Cette taxe s’applique aux opérations de transfert réalisées par tout moyen ou support technique laissant trace, notamment par voie électronique, téléphonie mobile, télégraphique ou par voie de telex ou télécopie, y compris le transfert postal.
La taxe est également applicable lorsqu’un paiement est effectué par usage d’un code marchand. Le montant reçu par le titulaire du code marchand fait l’objet d’un prélèvement de 0, 5% par l’opérateur de transfert d’argent.
Cependant, les opérateurs de dépôt d’espèces, pour conversion en monnaie électronique auprès des opérateurs de transfert d’argent, sont exonérés de ce prélèvement, comme tous les retraits d’espèces au niveau des guichets de transfert lorsque le montant retiré, en une journée, ne dépasse pas 20 000 francs Cfa. Au-delà de ce montant, il est fait application sur le retrait du prélèvement au taux de 0, 5%, plafonné à 2000 francs Cfa».
Mais d’après El Hadji Malick Guèye, président de l’association, et ses collaborateurs, «si la taxation directe des transactions de mobile money devait être mise en œuvre, l’expérience d’autres pays africains montre qu’elle pourrait provoquer une baisse des volumes de 30 à 50%, entraînant une contraction de l’assiette fiscale et une réduction des recettes existantes».
A l’inverse, l’Asepame propose «un prélèvement de 2, 5% sur les revenus des opérateurs de mobile money». A leur avis, cela «n’aurait aucun impact sur les clients. Ce prélèvement permettrait à l’assiette fiscale de continuer à croître de manière exponentielle, tout en générant des recettes fiscales additionnelles. Au total, sur les trois prochaines années, cette proposition générerait plus de 530 milliards de francs Cfa de recettes fiscales, soit bien davantage que l’objectif de 230 milliards de francs Cfa fixé par le gouvernement».
Au-delà d’un rendement fiscal supérieur, arguent les opérateurs, «un impôt assis sur les revenus des opérateurs, et non sur les transactions des usagers, permettra au Sénégal de préserver son rôle de pionnier continental en matière d’inclusion financière et de paiements digitaux, en consolidant la croissance d’un secteur stratégique pour l’économie et le pouvoir d’achat des citoyens».
Rappelant les données de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), ces acteurs du secteur relèvent que «la valeur des transactions de mobile money au Sénégal a connu une croissance moyenne annuelle de 34% au cours des trois dernières années. Dans le même temps, les recettes fiscales de l’Etat issues du mobile money ont progressé en moyenne de 50% sur la même période».
«Conscients des impératifs de mobilisation accrue des ressources internes, nous souhaitons en effet participer activement à la recherche de solutions permettant d’instaurer une fiscalité juste, adaptée et pérenne, qui contribue à l’effort national tout en préservant l’inclusion financière et le pouvoir d’achat des citoyens», mentionne le président de l’Asepame, dans une lettre adressée aux présidents des associations des consommateurs sénégalais. L’Asepame sollicite l’avis de ces derniers pour, dit-elle, alimenter l’opinion, mais également mieux engager le gouvernement pour soutenir l’effort de mobilisation de ressources endogènes.