Au lendemain de l’arrestation de deux présumés djihadistes à Dakar, «La Tribune» s’est entretenu avec André Burgeot, spécialiste du Sahel et chercheur émérite au Centre national de la recherche scientifique (Cnrs, France). En l’occurrence, il nous parle de l’avènement de l’Etat Islamique dans la sous-région ouest-africaine.
Les forces de sécurité séné- galaises ont mis la main sur des présumés djihadistes maliens. Est-ce la preuve manifeste que l’Etat islamique est partout ? Qu’entend–on par EtatIslamique et où est-il localisé ? L’Etat Islamique est une nouvelle mouvance de la tendance salafiste djihadiste incarnée par Al Qaeda. C’est une nouvelle émergence d’un mouvement particulièrement efficace et organisé avec une puissance de feu et une puissance financière. C’est une tendance qui dépasseAqmi, Al Qaeda et autres. Les objectifs sont les mêmes et les modes opératoires sont sensiblement identiques ; mais avec l’Etat Islamique il y a un enjeu de leadership et de la surenchère. Ce n’est pas une génération spontanée, c’est quelque chose qui existait auparavant. Au vu d’un contexte mondial favorable, ces cellules dormantes ont émergé. La force de cet Etat Islamique demeure dansson absence d’assise territoriale précise. Ceci me permet de dire que le coup de filet réussi par les forces de sé- curité sénégalaises est une prouesse car les djihadistes ne restent jamaislongtemps quelque part. Ilsse déplacent en profitant de la porosité desfrontières pour jeter leurstentaculesle plusloin possible ; et toute faiblesse sera exploitée. Ils agissent avec une mobilité très grande. Mieux, ils ont une capacité d’adaptation extraordinaire et les armes qu’ils possèdentsont d’une technologie supérieure souvent à celle des armées nationales. Au vu de votre analyse, doiton s’inquiéter pour le Mali d’où sont originairesles personnes arrêtées à Dakar ? Toute situation qui crée la confusion répond à desintérêts.Après avoir frappé Abidjan, Ouagadougou et Bamako, Dakar devient un lieu de replistratégique. Il revient aux autorités sénégalaises de faire preuve de plus de vigilance. Le travail du renseignement sénégalais est à saluer, mais il ne faut pas crier victoire assez tôt d’autant que les mou- vements djihadistes s’adaptent vite et corrigent leurs stratégies en fonction de l’ennemi d’en face.Aussi, je ne peux pas com- prendre que dans la situation actuelle on accepte desréunions regroupant des éléments de la Minusma, de Barkane et des militaires du Mnla pour engager une poursuite contre des groupes narco-djhadistes comme le Mujao, Ansardine et Aqmi. C’est une aberration. Et le rôle du Mnla ? Le Mnla est un mouvement qui a produit les conditions d’une partition du territoire malien, a commis des exactions et négocie des accords qu’il ne respectera jamais. Comment peut-on reconnaitre au niveau international ces éléments du Mnla en ignorant les Forces armées nationales ? J’ai du mal à comprendre ce qui se passe parce que tout le monde sait qu’il y a des éléments du Mnla qui sont proches des circuits d’acheminement de la cocaïne et de la drogue. On est en droit de se poser des questions car quel est l’intérêt à collaborer avec des criminels ? Dakar est sur la bonne voie. Elle peut beaucoup tirer des personnesinterpelées afin de démanteler toute cellule dormante potentielle.
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