Au moment de prendre la parole en ces derniers moments de l’année 2017, mes mots premiers servent à vous souhaiter une bonne et heureuse nouvelle année 2018. Je vous adresse des vœux de bonne santé, de bonheur et de prospérité à vous, compagnons et amis, à vos familles respectives, à tous nos compatriotes, sans oublier les hôtes étrangers qui vivent parmi nous.
Il est habituel en pareille circonstance d’évoquer les faits marquants de l’année qui s’éteint avant les attentes que l’on souhaite être portées par celle qui vient.
Je retiendrai pour ma part l’année 2017 vécue dans notre cher pays, comme celle de la poursuite de la remise en cause d’engagements forts qui avaient créé l’alternance politique et l’espoir en mars 2012.
L’emprisonnement du maire de Dakar, Khalifa Sall, a confirmé l’utilisation de la justice pour écarter ou chercher à écarter des adversaires politiques. La promesse était pourtant de la mettre au service de la reddition des comptes pour la sauvegarde du bien commun des citoyens sénégalais.
De graves mensonges sur les productions agricoles ont permis de construire des taux de croissance particulièrement avantageux dans la perspective de bilans qui devaient et devront être reluisants à l’arrivée des échéances électorales. La famine dans le nord est du Sénégal, la poursuite des importations de riz à un niveau très élevé, des centaines de milliers de tonnes de graines d’arachide que l’on ne retrouve ni dans les exportations ni dans l’industrie d’huilerie, sont venues démentir l’autosuffisance en riz et cette nouvelle richesse statistique invisible des Sénégalais. L’énergie de nos gouvernants aura donc plutôt été consacrée à construire des contre vérités plutôt que d’organiser la vraie relance de l’agriculture sénégalaise et le combat contre la faim dans les campagnes, priorités absolues s’il en est.
La promesse avait été de faire de notre Assemblée nationale une chambre des citoyens. Les élections législatives de 2017 ont atteint un niveau de fraude jamais vécu par notre cher Sénégal, pourtant l’une des plus vieilles démocraties de notre continent. L’obsession de ne pas voir une impopularité croissante se traduire par une perte de majorité à l’Assemblée, a conduit au viol de la loi et des engagements internationaux du Sénégal, autrefois réputé pays de droit. Nous nous contenterons de citer à ce titre l’implication illégale du Président de la République dans la campagne et les modifications introduites dans les règles du jeu électoral moins de 6 mois avant la date des élections en violation des règlements de la CEDEAO.
Il est toutefois difficile de taire tous ces milliards dépensés pour un vote organisé avec l’objectif d’en exclure les plus jeunes de nos compatriotes privés de leurs cartes d’identité et donc d’électeur.
La promesse du gouvernement de 25 membres, ce qui suffit largement au fonctionnement de notre État et de notre administration, a été sacrifiée aux projets politiciens et électoralistes. La presque cinquantaine de ministres siégeant aujourd’hui au conseil des ministres a achevé de faire du Gouvernement du Sénégal un mini parlement, et nous enfonce dans le ridicule.
Il est difficile de taire la poursuite du scandale Petrotim qui désormais prend l’allure d’une débandade. Les parts dans les permis pétroliers et gaziers dont le peuple sénégalais a été spolié au profit de l’ami de monsieur le frère du Président de la République ont continué d’être cédées sans aucune contrepartie pour l’État. Cela représente des centaines de milliards de fcfa dont on laisse l’évaluation précise aux tribunaux américains ou sénégalais le jour venu. La promesse était pourtant celle d’un dur combat contre la corruption et pour instaurer la bonne gouvernance. L’OFNAC avait été créée dans ce cadre.
C’est enfin à la jeunesse de mon pays que je pense lorsque j’assiste à toutes ces faibles tentatives visant à dissimuler le poids déjà lourd de l’endettement du Sénégal, et à interdire tout débat sur un sujet aussi important pour notre nation. C’est son avenir qui s’hypothèque sous nos yeux par le choix de gaspillages (on pense aux scandales du dédommagement de la société de M. Bictogo, à la masse des marchés accordés de gré à gré, à celui du renouvellement des cartes d’identité). Mais sont également concernés les choix d’une politique économique reposant sur de grands projets et un endettement lourd. Ce dernier sert à attribuer des marchés à des entreprises étrangères, tandis que celles nationales n’arrivent plus à obtenir le paiement de leurs créances sur l’État dans des délais raisonnables, conséquence de la priorité accordée au règlement de la dette publique.
2017 restera assurément l’année de la confirmation d’une trajectoire de reniements, de revirements et de renoncement aux ruptures qui furent promises.
Le Sénégal de 2018 dépendra du retour ou non de nos gouvernants à la raison et à la vérité.
La raison appelle le rejet de cette logique familiale et clanique dans laquelle la gouvernance du Sénégal a été enfermée depuis de trop nombreuses années. On finit d’ailleurs par s’y habituer alors que cela est inacceptable. Les exemples restent nombreux. Mais près de nous elle a privé le Sénégal et ses générations futures de droits sur son pétrole et son gaz ; elle a récemment porté à la tête de l’institution financière la plus importante du pays un frère sans compétence connue.
La raison c’est aussi de prendre conscience qu’une justice qui ne serait plus la même pour tous trahit le symbole de la balance qui la représente. Elle devient une « non justice ». Elle est vécue comme de l’injustice. Elle ouvre la porte à tous les dangers, et l’histoire nous enseigne qu’elle accouche de la révolte. C’est le lieu de saluer le combat de l’Union des Magistrats du Sénégal pour une justice indépendante de l’exécutif. C’est un combat pour le corps. C’est un combat pour la paix sociale. C’est un combat pour la République et notre nation.
Les gouvernants doivent à leurs peuples la vérité. La vérité c’est évidement de ne pas dire des mensonges qui créent les faux espoirs et les lendemains qui déchantent. La vérité c’est aussi ne pas se dédire.
La vérité c’est également celle qui doit être dite aux gouvernants ; en particulier par l’opposition politique, mais aussi par toutes les personnalités significatives que compte notre pays. Constater la naissance de tensions et appeler au dialogue des parties en présence est une excellente chose, c’est même un devoir. Réserver des mots spéciaux à ceux qui mettent en danger la paix au point de rendre ce dialogue nécessaire relève tout autant du souci de vérité.
La voie que nous souhaitons au Sénégal pour l’année 2018 n’est pourtant pas un chemin impossible. Elle est celle dans laquelle nous nous étions engagés en 2012 sous la direction d’un Chef de l’Etat encore prisonnier de ses promesses, et d’un gouvernement de 25 membres. Ce dernier avait placé au cœur de son action la satisfaction des préoccupations majeures de nos concitoyens : la lutte contre la faim et la malnutrition, la restauration d’une agriculture inclusive et performante par les techniques, les semences certifiées, le recours aux engrais locaux, le rapprochement des productions et des marchés, etc…, la réduction des prix des denrées de première nécessité, la lutte acharnée contre les inondations par des mesures structurelles, la construction d’un mix énergétique permettant de résorber le gap de production mais aussi de réduire le prix de l’énergie facturée aux ménages et aux entreprises, la création d’emplois par le choix de projets privilégiant la haute intensité de main d’œuvre, la transformation de notre système éducatif en accordant la plus haute priorité à la formation professionnelle, à la formation aux métiers, la construction d’un système de santé accessible au plus grand nombre et efficace, etc… Lire la suite
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