Dans l’université du nord du pays, on ne s’est pas encore relevé du violent coup de massue du destin de ce mardi 15 mai 2018. Dans les décombres encore fumants des affrontements, les étudiants fuient les lieux alors que les autorités pensent déjà à la reconstruction.
L’Université Gaston Berger est en apesanteur. Elle manque de vie depuis qu’elle s’est vidée de son monde ; depuis que les événements tragiques du mardi 15 mai ont emporté l’étudiant Mouhamadou Fallou Sène. L’entrain habituel a laissé place à un silence saisissant. Située à une quinzaine de kilomètres de la vieille ville de Saint-Louis, sur la Route nationale 2 (RN2) en allant à Richard-Toll, l’université est prise en étau par les villages traditionnels de Sanar Peul et Sanar Wolof. Au-delà de ses résultats pédagogiques qui faisaient d’elle un exemple au Sénégal et dans le monde, elle est devenue un sanctuaire de doléances après la furie des étudiants qui ont mis à feu les espaces administratifs du rectorat et du Centre régional des œuvres universitaires de Saint-Louis (Crous).
Seul le campus social a été épargné où traînent quelques étudiants, restés ici malgré eux. Les boutiques ont baissé rideaux. A l’intérieur, à quelques jets de la direction du Crous, des ouvriers s’attellent à finir leurs travaux. Quelques-uns parmi eux se rappellent ce jour tragique. Un ouvrier nous montre le lieu où Fallou Sène a été touché. ‘‘Cette brique a été posée par les étudiants. Ils disent que c’est pour marquer les lieux car ils vont y ériger un monument funéraire’’, déclare l’un d’eux.
Dans un mouvement de colère incoercible suite au décès de leur camarade, les étudiants ont mis à sac le temple du savoir. Même les arbres n’ont pas échappé à la furie estudiantine. Ils gisent à terre, déracinés, les branches jonchant même le sol. Les installations aussi portent les stigmates de l’incandescence du mardi fatidique. Des bureaux calcinés s’échappe encore une odeur de cramé. A Sanar, seuls quelques étudiants se terrent dans leurs chambres. Ils viennent pour la plupart de l’étranger ou des localités de l’intérieur du pays.
Devant la grande porte de l’Université, bus et taxis se disputent le peu de clients qui sont quelques travailleurs de surface venus de l’intérieur de l’Ugb et autres citoyens habitant les alentours. Si l’ordre est revenu, la tension n’a pas totalement disparu. Les gendarmes, debout sur leur véhicule, casque de protection, sont attentifs aux va-et-vient et décortiquent les moindres gestes de ceux qui entrent ou sortent. A l’intérieur du campus, chèvres et vaches végètent sur les espaces verts saccagés par les étudiants à l’annonce de la mort de Fallou Sène. Le rectorat est en ruine, en cendre. Les bureaux des finances, des ressources humaines, la salle des actes, celle du cabinet du recteur, du secrétariat et du recteur sont complètement mis à sac. Fauteuils et chaises sont renversés, les dossiers brûlés. La destruction est plus manifeste à la direction des ressources humaines. Dans cet endroit où l’on gardait tous les papiers administratifs des travailleurs et enseignants de l’Ugb, il va falloir tout reconstituer. Tout a été brûlé. Le gardien des lieux témoigne dans l’anonymat. ‘‘Je n’ai jamais vu des gens aussi violents, déterminés à tout casser et à tout brûler. Ils étaient furieux et ils étaient prêts à tuer car ils étaient armés de barres de fer et de bidons d’essence’’, nous a-t-il révélé. Coïncidence heureuse pour le personnel, la plupart n’était pas encore sur place le jour des événements, selon lui.
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