Si l’on devait décerner un trophée en matière de recul démocratique au Sénégal, c’est assurément le Président Macky Sall qui l’aurait remporté haut la main. Non seulement il n’a pas, comme ses prédécesseurs Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, cotisé pour faire prospérer les acquis démocratiques, il a, au contraire, beaucoup contribué à la régression de la démocratie sénégalaise qui faisait la fierté du peuple sénégalais. En atteste la restriction des libertés avec les arrestations tous azimuts des manifestants de Ñoo lànk comme Guy Marius Sagna qui croupissent en prison et dont le seul tort est de protester contre la hausse injustifiée du prix de l’électricité qui ne fait que paupériser davantage les ménages.
Mais le comble dans tout cela, c’est son “ni oui ni non” concernant la question du 3ème mandat. Une réponse qui frise un manque de considération pour ne pas dire un manque de respect à l’endroit des populations, et surtout des martyrs de la trempe de Mamadou Diop, qui sont tombés pour que notre démocratie reste debout. D’ailleurs, si Macky Sall a été élu, c’est justement pour qu’il épargne le pays des soubresauts qui l’ont agité lors du forcing de Wade en 2012 et qui ont failli plonger le pays dans le chaos. D’ailleurs, que n’a pas dit Macky Sall de Wade concernant la restriction des libertés démocratiques ? Mais le revoilà qui aujourd’hui renvoie le Sénégal à la case départ. La déception est d’autant plus grande que le Président Sall avait toutes les cartes en main pour consolider nos acquis démocratiques et les approfondir avec les conclusions des Assises nationales et les recommandations de la Cnri.
Pourquoi réinventer la roue alors qu’il avait sous la main un pays prêt à gouverner ? Les Assises nationales menées par des personnalités et intellectuelles de premier rang avaient cerné et trouvé des solutions pérennes aux différents défis à relever pour installer, de manière définitive, le Sénégal dans une gouvernance démocratique et de justice sociale. Donc, n’était-il pas plus judicieux de les dépoussiérer et d’essayer de les appliquer au lieu de se perdre dans un dialogue national qui met en avant des intérêts inavoués et qui engagera des dépenses qui ne feront que grever le budget. Les Sénégalais sont fatigués d’être menés en bateau par des politiciens qui ne se soucient que de leurs intérêts immédiats. Et ce dialogue n’accouchera, au finish, que de mesures cosmétiques, avec à la clé, un gouvernement de partage du gâteau. À moins que le Président Sall soit soumis à une forte pression, il ne faudra pas s’attendre à grand-chose de ce dialogue tellement il tient à accaparer tous les pouvoirs.
L’histoire retiendra qu’Abdou Diouf a été le père du multipartisme, il a été aussi le premier président sénégalais à avoir élaboré un code électoral consensuel, avec à la clé, un ministre de l’Intérieur neutre ; ce qui a permis au Sénégal de connaître l’alternance. Abdoulaye Wade, quant à lui, a beaucoup apporté à l’avancement de la démocratie, en tant qu’opposant d’abord, ensuite en tant que président. C’est grâce à lui que l’isoloir, la présentation de la carte d’identité, l’encre indélébile, etc., sont devenus obligatoires. Il a aussi beaucoup contribué au pluralisme médiatique, avec l’attribution de fréquence télé à certains patrons de presse ; la constitutionnalisation de la marche, c’est encore lui. Même si on peut relever le fait qu’il a, durant son magistère, essayé de remette en cause certains acquis, on doit à la vérité de dire qu’il a quand même beaucoup cotisé.
Contrairement à son successeur, Macky Sall, qui non seulement n’a rien cotisé, mais il a remis en cause tous les acquis démocratiques, de sorte qu’aujourd’hui, certains parlent même de dictature installée. Vraiment triste pour un président né après les indépendances et qui était censé incarner la rupture.