Invité de l’émission Sen Jotay sur la Sen Tv, Adama Gaye s’est confié à cœur ouvert. Des retrouvailles Wade Macky, la gestion des ressources pétrolières et gazières en passant par son séjour carcéral, rien n’a été laissé au hasard.
Même s’il se félicite des retrouvailles entre Macky Sall et Abdoulaye Wade, Adama Gaye n’en reste pas moins sceptique. Selon lui, ce qui s’est passé est tout à fait normal dans un pays qui traverse des difficultés, que les gens se parlent pour trouver des points de convergence.
Pour le journaliste consultant, le Khalife général des Mourides a accompli son rôle de sage en les réconciliant. Cependant Adama Gaye n’en pense pas moins qu’il y a un deal entre le Président Macky Sall et Abdoulaye Wade. À ses yeux, il n’y a jamais eu de rupture entre les deux, et tout ce qui s’est passé découle d’une stratégie mûrement planifiée.
Sachant sa défaite inéluctable en 2012 avec les nombreuses manifestations pour son départ, Abdoulaye Wade a mis Macky Sall en pole position pour qu’il couvre ses arrières en assurant sa protection et celle des siens, pense savoir Adama Gaye. Pour étayer son argumentaire, le journaliste de rappeler : «En 1991, quand Abdoulaye était pressenti pour entrer dans le gouvernement de majorité élargie d’Abdou Diouf, Jean Paul Dias ne cessait de s’agiter au point de vouloir faire tanguer la pirogue. C’est ainsi que Wade m’avait appelé pour me charger d’aller dire à Dias que celui qui se lève avant le pourvoyeur du petit déjeuner doit se recoucher, moi je suis en politique», lui avait-il fait savoir.
C’est pourquoi, soutient Adama Gaye, « Wade est toujours dans cette optique, il fait de la politique», et il n’est pas de ceux qui pensent que Macky Sall mène la vie dure aux partisans de Wade. Loin s’en faut, estime Adama Gaye : il les a couverts, et pour preuve, tous ceux qui ont été arrêtés ont été relâchés et ils continuent de jouir de leurs biens. Personne n’a été poursuivie jusqu’au bout, relève-t-il. Dans le même sillage, Adama Gaye d’ajouter que si le pouvoir avait échu dans d’autres mains, on ne parlerait pas aujourd’hui de Karim parce qu’il aurait été déchu de ses droits. Selon lui, Abdoulaye Wade est toujours dans la logique de voir les libéraux faire 50 ans à la tête de ce pays. Pour lui, Wade est tellement rusé qu’il est prêt à créer une fronde au sein de son parti, pousser les Omar Sarr à la sortie alors qu’il est derrière tout cela. Ce qui lui importe, c’est d’ouvrir la voie à son fils.
Aujourd’hui, poursuit Adama Gaye, Macky Sall a besoin des libéraux, mais ce qui lui importait le plus, c’est de brandir haut la main de Wade et il en avait grandement besoin. Sans être macabre, Wade est aujourd’hui vieux et l’on ne sait jamais… Hormis cela, il y a aussi le fait que Macky Sall est aujourd’hui dans une impasse, d’autant que même la communauté internationale commence à être agacée par ses procédés anti-démocratiques. Donc il avait besoin de ce bol d’air pour respirer. Donc il est en train de chercher une échappatoire, il se susurre même qu’il prépare une amnistie, de voir comment pardonner toutes les malversations financières depuis 2000, les faire passer par pertes et profits. Même s’il dit être d’accord pour la réconciliation, Adama Gaye n’en pense pas moins que cela ne doit pas empêcher la démocratie d’être vigoureuse, ou un moyen de promouvoir l’impunité.
Abordant la grâce accordée à Khalifa Sall, Adama Gaye soutient que c’est parce que Macky Sall se trouvait dans une impasse dans laquelle il fallait sortir, en plus, il devait satisfaire la demande du Khalife des Mourides qui avait intercédé pour Mbaye Touré. Concernant la question de la recomposition politique, Adama Gaye de dire que le Sénégal a plus besoin d’un reclassement de la société qu’un reclassement politicien. Depuis 1960, ce sont des politiciens qui sont à la tête de ce pays, ils ne lui ont rien apporté et ne font que s’enrichir. Abordant la question de la gestion des ressources naturelles, Adama Gaye déclare qu’aucun pays n’a le droit de s’amuser avec. Selon lui, tous ceux qui ont géré leurs ressources avec sagesse s’en sont bien sortis, ce qui n’est pas le cas pour le Sénégal qui a mal négocié, croit-il savoir. Les concertations avec le Cos Petrogaz ne sont que poudre aux yeux pour ne pas dire une sorte de médecin après la mort, parce que le pétrole était déjà dans la poche de Franck Timis, déclare Adama Gaye. Qui ajoute que le pétrole sénégalais est entre les mains des copains et des coquins.
Selon lui, le Sénégal risque de ne rien gagner avec ses ressources pétrolières contrairement au pays développés qui sont protégés par le droit international. Nos gars se sont fait gruger, croit savoir Adama Gaye, qui estime qu’on risque même de ne pas avoir les 10% attendus, tellement les contrats signés sont léonins. Les négociations en pétrole comportent des clauses sur lesquelles on peut revenir, renseigne l’expert pétrolier. Qui regrette le fait que ceux qui étaient chargés de négocier pour le Sénégal n’aient pas fait, contrairement aux autres compagnies qui sont surprotégées par le droit des investissements et qui sont accompagnées par des avocats teigneux. Pour Adama Gaye, ce qu’Aliou Sall a fait est d’une extrême gravité et il doit passer le restant de ses jours en prison ; mais Macky Sall est le principal responsable dans tout cela, parce que c’est un conflit d’intérêt manifeste. Mais cela ne va pas rester impuni, parce qu’il a saisi le ministère américain de la Justice, le Serious Fraud office de l’Angleterre, la Bourse de Londres, de même que le président de Tota,l de même que celui de Bp.
Revenant sur son séjour carcéral Adama Gaye la qualifie de «bourde du siècle». Selon lui, il ne devrait même pas être emprisonné et l’État du Sénégal lui a causé du tort. Mais, ajoute-t-il, «le ministre de la Justice est nul et c’est un habitué des bourdes». L’État a commis une faute et il va la réparer, avertit Adama Gaye qui renseigne avoir instruit ses avocats.
Personne ne peut réduire le périmètre démocratique et on ne laissera pas Macky Sall réduire la démocratie, réduire les ressources naturelles et mettre sa famille au sommet de l’État. Le pays va mal et ce, dans tous les secteurs. Avons-nous le droit d’en parler ou pas ? C’est de l’avenir du Sénégal qu’il s’agit, précise Adama Gaye.