Aliou Sall quitte la Cdc : La chute du frère en attendant le sort…

La chute du frère en attendant le sort des donneurs d’ordre

Le jeune frère du président de la République devrait s’estimer heureux d’être encore en liberté et maître de son agenda. Son éviction de la Cdc, quoique logique, ne change rien fondamentalement de ce qu’il reste à faire au sein des écuries d’Augias de Petrotim. La gangrène subsiste.

Par Momar DIENG

Le désormais “ex”-directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (Cdc) a fini par s’incliner devant le tribunal de l’opinion, en quittant son poste hier après 21 jours de résistance. Son sort était bel et bien scellé depuis les révélations inédites d’El Hadj Hamidou Kassé à la chaîne de télévision Tv5 relatives à un versement de 250 mille dollars Us (146 millions Cfa) à sa société dénommé Agritrans.

En affirmant qu’il restait dans ses fonctions parce qu’il n’avait rien à se reprocher, Aliou Sall donnait l’impression de lutter contre des moulins à vent alors que l’évidence commandait qu’il remît le tablier. En République et en démocratie, lorsque des soupçons aussi lourds que les accusations de la Bbc s’abattent sur un dépositaire de charges publiques tirant sa légitimité d’un président de la République élu au suffrage universel, la raison et l’élégance deviennent prioritaires sur les sentiments personnels et les procès en sorcellerie contre ses contempteurs. Le maire de Guédiawaye n’est pas en principe au-dessus de la loi. Et si l’on suit la logique de fonctionnement clanique et partisane qui caractérise objectivement la gouvernance de Macky Sall, il peut même s’estimer heureux d’être encore en liberté et maître de son agenda en regard de la guillotine impitoyable qui s’est abattue sur des acteurs d’un autre bord politique dans d’autres histoires sénégalaises.

Mais au nom de toute l’affaire Frank Timis, que l’ex fondateur-gérant de la société anonyme unipersonnelle (SAU) Petrotim Limited démissionne de la direction générale de la Cdc ne suffit pas, quand bien même son acte posé hier marque un tournant indéniable. Aliou Sall n’est pas un coupable présomptif qu’il faudrait vouer aux gémonies, il est un présumé innocent auquel la République doit offrir un cadre idoine pour sa défense. Mais la République qui se donne à voir sous nos yeux semble avoir enterré les principes sacro-saints d’équité et de justice qui égalisent les citoyens devant la loi. Personne aujourd’hui, mis à part les politiciens structurels, dépendants et alimentaires qui peuplent certaines travées du pouvoir, ne croit malheureusement qu’il soit possible d’échafauder pour Aliou Sall un éventuel procès digne et républicain. Les dispositions politiques et morales qui structurent l’action du chef de l’État ne le permettent pas ; les postures psychologiques développées par la frange militante dévouée de la magistrature ne l’autorisent pas ; et il n’est pas certain qu’Aliou Sall lui-même accepte d’être définitivement sacrifié sur l’autel de la tranquillité du président de la République.

Os à ronger

Au-delà d’Aliou Sall, il ne serait pas juste que les autres chevaliers du projet antinational Petrotim ne paient pas leurs turpitudes à l’aube d’une gouvernance que l’on annonçait sobre et vertueuse. Où sont les éléments de la chaîne de responsabilités qui ont permis toutes ces transactions quasiment mafieuses orchestrées sur les hydrocarbures et que certains veulent allègrement assimiler à des pratiques normales du secteur ? Si l’actuel ministre de l’Intérieur est coupable d’avoir transmis au président de la République un «faux rapport de présentation» concernant les possibilités de Timis et de ses présumés associés, pourquoi reste-t-il en poste depuis sept ans ? Si le président de la République est coupable d’avoir apposé son sceau sur ledit rapport, pourquoi échapperait-il à la loi ? Où sont tous ces fonctionnaires, intermédiaires, hommes d’affaires véreux et cupides qui, dans le silence des arcanes de l’État, ont soutenu et rendu possible la capture de bassins pétro-gaziers sénégalais par des voyous de grand chemin ? En poussant Aliou Sall à la démission, Macky Sall donne un os à ronger aux «vautours» qui gravitent autour du «frère». Mais en fin de compte, Aliou Sall reste un pur dégât collatéral qui met davantage en évidence l’ampleur des responsabilités à élucider au cœur du système Timis dans ses rapports avec l’État du Sénégal.

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