Drames : Quand le laisser faire conduit à la catastrophe

Le chavirement d’une embarcation à l’île de la Madeleine qui a plongé le Sénégal dans un émoi total remet sur la table la question de l’imprévoyance de nos autorités, plus réactives que pro actives. Gouverner c’est prévoir, a-t-on coutume de dire. Mais cela, nos dirigeants ne semblent pas l’intégrer dans leurs paramètres. Sinon, comment comprendre qu’ils aient toujours à attendre que la catastrophe survienne pour ensuite venir jouer au médecin après la mort ?

Hier, toute la république, au premier chef son président, s’est déplacé sur le quai de Soumbèdioune pour apporter réconfort et soutien aux victimes du chavirement d’une pirogue aux îles de la Madeleine. Ce qui est déplorable et regrettable c’est le fait que cette situation pouvait être évitée, d’autant que l’alerte avait été lancée en 2018. «Un danger plane sur la traversée Dakar-Îles de la Madeleine», avait alerté un citoyen sénégalais. «Le bateau qui transporte les visiteurs de ce superbe îlot est équipé d’un vieux moteur de 40CV qui tombe souvent en panne juste en quittant l’île», fait savoir Demba Guèye, consultant en communication digitale sur son mur Facebook.

Une publication qui date d’octobre 2018 et dans laquelle il renseignait «qu’il suffit que la mer soit un peu agitée pour que les abords de l’entrée très étroite qui conduit à l’îlot subissent des assauts des vagues qui sont comme amplifiées par le relief rocheux accidenté». Et le chavirement de la pirogue survenu avant-hier, semble lui avoir donné raison.

Pourtant, les autorités qui avaient toutes les informations nécessaires pour anticiper sur les événements, ont laissé faire jusqu’à la survenue de cette catastrophe. Après ce drame qui du reste était prévisible, elles ont comme d’habitude annoncé l’ouverture d’enquêtes judiciaire et administrative pour situer les responsabilités. C’est ce qu’a déclaré la Haute autorité de la coordination de la sécurité maritime, de la sûreté maritime et de la protection de l’environnement maritime (Hassmar), à l’issue de la réunion tenue à l’État-major de la Marine nationale.

D’ailleurs, ce n’est pas la première fois que les autorités agissent de la sorte. Attendre qu’une catastrophe survienne pour monter au créneau, annoncer des enquêtes, qui au finish, enterrent tout bonnement le dossier. C’était la même chose avec le Joola, dont l’anniversaire du naufrage sera célébré ce 26 septembre, et dont la panne du moteur avait été signalée depuis belle lurette, mais que les autorités ont laissé naviguer jusqu’à ce que la catastrophe survienne avec ses milliers de morts.

À ce jour, l’enquête annoncée en grande pompe a fini en eau de boudin. Idem pour le crash de l’avion de Senegalair survenu le 5 septembre 2015 où sept personnes dont une patiente française, avait trouvé la mort dans cet accident aérien survenu au large de Dakar. L’avion de Sénégal Air avait heurté en plein vol un autre de la compagnie Ceiba. Le rapport du Bureau d’enquête et d’analyse (BEA) avait mis en cause plusieurs dysfonctionnements, notamment que la compagnie ne disposait que d’un seul avion et d’un seul équipage avec un seul mécanicien. Au Sénégal, les résultats de l’enquête du BEA ont été communiqués à la justice sans aucune évolution, depuis. Pourtant, le Parquet de Dakar avait décidé d’ouvrir une information judiciaire pour «homicide involontaire, violation de règles relatives à la conduite et à la sécurité d’un aéronef», après le crash ; mais à ce jour absolument rien !

Pour dire, qu’à ce rythme, les catastrophes sans responsables ont de beaux jours dans ce Sénégal de tous… pour quelques privilégiés.

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