Nommé en remplacement du Professeur Baydallah Kane, le Professeur Ousmane Thiaré, pur produit de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, a trouvé celle-ci à genou. En effet, après le meurtre de Fallou Sène qui a été à l’origine du saccage, par ses camarades, du rectorat ainsi que de plusieurs bâtiments administratifs, le nouveau recteur de l’Ugb est bien décidé à redonner à ce temple du savoir son lustre d’antan. Mais, considère-t-il, cela ne peut se faire sans y associer le personnel. Dans cet entretien accordé à PressAfrik, Pr Thiaré revient sur la situation de l’UGB, et trace les orientations pour relever le défi. Entretien
Vous êtes le plus jeune recteur du Sénégal. Une lourde charge pour vous ou un nouveau défi ?
Professeur Ousmane Thiaré : C’est quelque chose de normal à l’université. Quand on nomme quelqu’un on pense qu’il remplit un certain nombre de critères. La fonction n’est pas liée à l’âge. En plus des critères, il y a aussi la confiance des autorités qui estiment que vous avez les qualifications requises. Pour être recteur au Sénégal, il faut juste être un professeur titulaire. Je suis un ancien de l’université. Je suis venu en octobre 1994 pour faire les mathématiques. J’ai été recruté comme assistant en 2002. J’ai fait toute ma carrière dans cette université. Nous avons trouvé l’université dans un état difficile. Le rectorat, l’agence comptable, la direction de la scolarité se trouvent dans une situation très compliquée. Nous sommes dans la phase d’évaluation. Il faut que l’Etat nous accompagne pour une rapide reconstruction des bâtiments.
Certains pensent que vous avez trouvé une université à terre…
J’ai rencontré tous les acteurs, notamment le Saes. Ils sont conscients de la situation que nous vivons. Les enseignants sont animés par la même volonté de sortir l’université de ses difficultés. La communauté universitaire est consciente de ces enjeux. Tout le monde regarde dans la même direction. Nous ne sommes pas à terre. Ce sont des moments difficiles que nous vivons. Je pense que nous allons sortir de ces difficultés.
La direction des ressources humaine est réduite en cendres. Où en êtes-vous avec votre projet de reconstitution des documents administratifs ?
Il faut dire qu’effectivement, durant ces saccages, la Direction des ressources humaines a subi des dégâts très lourds. On a perdu une grande partie des archives que nous sommes aussi en train de reconstituer dans la mesure du possible. C’est vrai qu’il y a une grande partie des archives qui étaient au Rectorat qui a été détruite, mais nous en avons aussi récupérée une bonne partie et le tri va être fait pour essayer de voir comment. Il faut dire que dans les parties de l’université qui n’ont pas été touchées, on a réussi à récupérer des archives. Et ça nous amène à réfléchir à un plan de gérer électroniquement, de façon numérique les archives de notre université. Et nous allons rapidement travailler sur ce plan.
Quel est le coût de ce plan de numérisation ?
On va donner instructions au centre de calcul qui a même anticipé et qui est en train de travailler sur ce plan. Mais pour le moment, je n’ai pas encore les chiffres. Nous attendons que le document soit disponible pour qu’on puisse avancer des chiffres.
Quels sont les grands points de l’évaluation que vous avez faite ?
Il y a une partie des archives qui a été retrouvée. Quand les saccages ont eu lieu. Dans beaucoup de bureaux, on a perdu des machines, des disques durs dans lesquelles se trouvaient beaucoup d’archives. C’est donc difficile. Si on perd à la fois les archives numériques et les archives physiques, ça va être beaucoup plus compliqué. Mais je pense qu’on est dans une phase de reconstitution des archives et nous allons récupérer une plus grande partie et réfléchir à ce projet de numérisation.
C’est vrai qu’au début, l’UGB était calibrée pour recevoir un nombre d’étudiants qui n’étaient pas un nombre très grand, mais il faut comprendre le contexte de l’Etat du Sénégal. Chaque année nous recevons beaucoup de bacheliers et chaque université doit faire des efforts pour augmenter sa capacité. Il faut dire que sur ce point, je pense que tout le monde est d’accord pour augmenter la capacité d’accueil, mais il faut que l’Etat continue à faire ce qu’il fait, en continuant à accompagner la montée en puissance en construisant de nouvelles infrastructures, de nouvelles salles, mais aussi en continuant de recruter de nouveaux enseignants ainsi que le personnel administratif. Il faut augmenter la capacité d’accueil.Aujourd’hui quels sont les besoins en termes de recrutement d’enseignants
Aujourd’hui je ne peux pas personnellement dire quels sont les besoins réels pour la bonne et simple raison que ce sont des besoins qui doivent nous provenir des UFR. Chaque UFR peut aujourd’hui nous dire le déficit d’enseignants par rapport au nombre d’étudiants qu’elle reçoit. Mais je sais qu’à l’UGB, avec le nombre d’étudiants qu’on a, on a forcément besoin de recruter de nouveaux enseignants et un personnel administratif. Ça c’est normal.
En tant que nouveau recteur, vous avez eu certainement vent de ce qui se passe dans les UFR. Comment se passe, le chevauchement des années, la reprise des cours et autres ?
Oui il faut dire que nous avons ces difficultés-là qui ne sont pas propres à l’Ugb. C’est pratiquement dans toutes les universités où il y a des problèmes de calendriers académiques, mais les efforts sont en train d’être faits. Avant même ces événements, beaucoup d’UFR ont fait des efforts pour vraiment réduire ce déficit au niveau de notre calendrier et nous sommes sûrs que ces efforts vont se poursuivre. Chaque UFR fait le point de sa propre situation et au niveau des instances. Pour le moment, nous n’avons pas encore reçu les propositions et les évaluations des UFR.
Pour moi, la première priorité, vous le savez, c’est l’apaisement de la tension sociale. Ça c’est important. Je pense que nous y travaillons tous. Pour l’apaisement de cette tension sociale, c’est simple, il faut discuter avec la communauté (universitaire), il faut parler à tout le monde pour avoir un rassemblement autour des objectifs précis de l’Ugb. C’est-à-dire, un large rassemblement, une large concertation avec tous les acteurs pour que vraiment tout le monde regarde vers la même direction et, que, pour, aujourd’hui, la paix s’installe définitivement dans cette université. Et qu’on retrouve l’Ugb qu’on connaissait il y a quelques années. Une deuxième priorité, c’est la reconstruction de l’université. Parce que vous savez, qu’il y a eu beaucoup de dégâts, beaucoup de saccages. Il va falloir reconstruire cette université-là. Pour cela, l’évaluation est en train d’être faite, le ministère est mis à contribution aussi. Et je suis sûr que l’Etat prendra en charge la reconstruction de l’université. L’autre défi à relever aussi à l’Ugb, c’est le calendrier académique. Et ça, on va y travailler tous ensemble pour que vraiment l’université retrouve un calendrier normal. Ça c’est extrêmement important.
Les cours ont repris…
Oui les cours ont repris depuis le lundi dernier
En parlant de performances, on sait que l’Ugb a été accompagnée par la Banque mondiale dans le cadre du PGF-SUP. Aujourd’hui, est-ce qu’on est toujours dans l’excellence ou dans la décadence à l’Ugb ?
Non. Il ne faut pas utiliser le terme de décadence pour l’Université Gaston Berger de Saint-Louis. Je pense que l’Ugb depuis qu’elle a été ouverte, on l’a toujours dénommée université d’excellence. Et vraiment, ça se voit sur la qualité de ses produits. Il faut le dire, l’Ugb délivre des formations de qualité. Il faut voir les diplômés de l’Ugb qui occupent des fonctions importantes au Sénégal et à l’étranger. Même nos étudiants qui poursuivent leurs études à l’Etranger font d’excellentes études. Je pense que le label de l’excellence reste de vigueur à l’Ugb. Et justement c’est pourquoi, tous ces événements qui se sont passés ne doivent pas nous détourner de l’essentiel, qui est de garder le calme et faire de sorte que l’Ugb continue à être une université d’excellence. On a un bon taux de réussite à l’université Gaston Berger.
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