Eurobonds : Le sénégal pour de 450 milliards Fcfa :

Les observateurs qui se félicitent du «succès» relatif de l’Eurobond levé dernièrement par le Sénégal, ne tiennent pas compte des réussites des émissions réalisées par les anciens gouvernements du pays, ni même par les autres pays africains dont les résultats parlent encore mieux.

 

 Les médias, dans leur grande majorité, se sont félicités hier de la levée des obligations internationales -Eurobonds- opérée par le gouvernement du Sénégal. Pour la plupart, se référant au site Bloomberg, les médias indiquent que le pays a réalisé une émission en deux tranches. La première, le 3 juin, pour 500 millions de dollars, et la seconde, le lendemain, pour 250 millions de dollars. Les deux émissions ont une maturité de 7 ans, à un taux de 7, 75%.

Le Sénégal est, cette année, le quatrième pays d’Afrique au Sud du Sahara à émettre des Eurobonds, après la Côte d’Ivoire, le Bénin et le Kenya. Cette levée est donc une réussite qu’il faudrait néanmoins fortement nuancer.
D’abord, il faudrait rappeler que la dernière émission d’obligations réalisée par le pays date du 2 juin 2021. En plein Covid, le Sénégal avait pu lever 775 millions d’euros, soit un peu plus de 508 milliards de Francs Cfa, à un taux de 5,3%, pour une maturité de 16 ans. Les circonstances de la pandémie faisaient que les bailleurs de fonds ne faisaient pas montre de grande confiance. Cela n’a pas empêché que le Sénégal obtienne des conditions particulièrement favorables.
Aujourd’hui, les gens se félicitent du retour du pays sur les marchés internationaux, après les remous qui ont précédé l’élection présidentielle de mars dernier et les discours qui ont suivi l’arrivée au pouvoir de Bassirou Diomaye Faye et de ses équipes. De plus, par rapport aux 3 autres pays qui sont allés sur le marché obligataire, le Sénégal a réalisé le score le moins bon.
La Côté d’Ivoire a réalisé deux Eurobonds en janvier dernier, pour un montant total de 2, 6 milliards de dollars pour un taux de 6, 6%. La maturité est de 9 et de 13 ans respectivement. Le Bénin s’est lancé en février, pour un montant de 750 millions de dollars, pareil à celui du Sénégal. Si les ministres de Patrice Talon ont obtenu un taux de 7, 9%, ils ont une maturité de 14 ans, donc le temps de voir venir.

 

Le Kenya, quant à lui, a pu obtenir plus d’1, 3 milliard de dollars à plus de 10%, pour une maturité de 10 ans. A se demander pourquoi il fallait retourner auprès des partenaires financiers.
Ceux qui avaient suivi les déclarations du Premier ministre Ousmane Sonko, alors prétendant à la Présidentielle, qui raillait le Plan Sénégal émergent de Macky Sall en le traitant de «Plan Sénégal endettement» et qui fustigeait la propension du pouvoir sortant à aller s’endetter à l’étranger, ne pensaient pas que les nouveaux venus s’empresseraient de suivre les traces des anciens fonctionnaires des Finances et du budget. Il n’a pas fallu 3 mois pour qu’on les voie suivre leurs traces. Malheureusement, Cheikh Diba et Abdourahmane Sarr se voient contraints d’accepter des conditions plus draconiennes. Ni sous Amadou Ba ni sous Abdoulaye Daouda Diallo, le Sénégal n’a été obligé d’emprunter à des taux aussi usuraires, et surtout pour des délais aussi courts. Est-ce l’arrivée de la Mission du Fonds monétaire international (Fmi) qui a précipité les choses ? On sait que les services de Bretton Woods n’ont de cesse de mettre la pression sur les autorités pour qu’elles puissent assainir les finances de l’Etat, avant de pouvoir espérer une quelconque rallonge de la part de leurs partenaires.

Et malheureusement, l’argent ainsi récolté ne servira, dans l’ensemble, qu’à combler une partie de l’ardoise de l’Etat. Ainsi, les 500 millions de dollars levés au premier jour de cette émission serviront d’abord à soulager le pays par rapport à sa créance en cours, et lui éviter de se retrouver en défaut sur certains emprunts. Il y a dans ce montant, d’ailleurs, plus de 120 millions de dollars de remboursement de l’Eurobond de 2021. Entre autres. La seconde tranche de l’émission, à savoir les 250 millions de dollars, serviront à des «dépenses courantes». Notamment à payer des salaires ? Eux seuls savent.
Les dirigeants du pays se rendent certainement compte à quel point il est difficile, pour un pays aussi pauvre et à l’économie extravertie comme le Sénégal, de se défaire du carcan de la dette extérieure et des intérêts étrangers. S’en débarrasser ne peut se faire à coups d’incantations militantes et de slogans vigoureux. On le voit avec les prix des denrées de première nécessité dont on avait promis qu’ils n’augmenteraient pas.

Avec LQ

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