Pierre Babacar Coly n’en a cure des rigueurs carcérales. Ayant été condamné, à plusieurs reprises, l’informaticien ne cesse de renouer avec ses agissements délictuels. Poursuivi par l’opérateur téléphonique Orange pour avoir soustrait frauduleusement d’importantes sommes d’argent sur les comptes Orange Money de ses clients, il a été condamné à 2 ans de prison ferme en 2014. L’année suivante, il récidive en ayant commis les mêmes faits. Hier, également, il a été renvoyé, encore une fois, devant le juge du Tribunal des flagrants délits de Dakar pour les délits d’accès frauduleux dans un système informatique, maintien et obtention d’avantages indus et usurpation d’identité. Cette fois-ci, Pierre Babacar n’a pas vidé les comptes des parties civiles, mais a opté pour un autre modus operandi. Lequel ? Pour parvenir à arnaquer plusieurs personnes, il allait sur Instagram pour regarder le fil d’amis de certains utilisateurs.
Pape B. Coly, prévenu : « c’est moi qui ai créé ces comptes. Je cible mes victimes par rapport à la liste de leurs amis Instagram »
Après avoir réussi à cibler une personne, il repérait quelques-uns de ses amis. Là, il crée un faux compte Instagram, en utilisant la photo de la personne ciblée. Ainsi, il sollicite l’aide financière de ses amis, en évoquant de multiples prétextes. C’est à l’issue de cela qu’un bon nombre de victimes, à savoir Cheikh Ndiaye, Marie Thérèse, El Hadji Mandaw Thiam, Augustin Étienne Diouf et Malick Ndiaye lui ont envoyé diverses sommes d’argent en croyant ainsi que c’étaient leurs amis qui se trouvaient dans le besoin, en leur demandant de l’argent.
Toutefois, Pierre Babacar Coly a été alpagué à Ndangane, depuis le lieu où il se trouvait, au moment où il arnaquait ces personnes. L’enquête faite a permis de découvrir que ces plaignants ne sont pas les seuls qu’il a eu à rouler dans la farine. Car, il y en a eu 50 autres personnes qu’il a dupées. Lors de la perquisition qui a été faite chez lui, plus de quarante 40 cartes Sim ont été retrouvées dans sa chambre par les agents. Entendu par les éléments-enquêteurs, il révèle avoir encaissé le montant de 7.000.000 de francs alors que seuls 1.000.000 de francs ont été saisis par les enquêteurs. Hier, au début de l’interrogatoire devant la barre des flagrants délits de Dakar, Pape Babacar Coly a vigoureusement contesté les faits qu’on lui impute. Mais il est finalement passé aux aveux, grâce à la ténacité du Tribunal. « C’est moi qui ai créé ces comptes. Je cible mes victimes par rapport à la liste de leurs amis Instagram. C’est à partir de là que j’ai commencé mon plan. Comme j’étais malade, je suis allé à Ndangane Samb, où on m’a interpellé», soutient-il.
Cheikh Ndiaye, partie civile : «en se faisant passer pour mon ami Marie Thérèse, il m’a demandé 192.000 francs que je dois envoyer à ses maçons, ce que j’ai fait»
Invité à expliquer la manière dont le prévenu l’a grugé, Cheikh Ndiaye raconte : «il m’a envoyé un message sur le compte Instagram qu’il a créé au nom de Marie Thérèse. Il m’a contacté et dit qu’il était en voyage. C’est là qu’il m’a demandé 192.000 francs que je dois envoyer à ses maçons, ce que j’ai fait. Il refait la même chose et c’est là, que j’ai su que c’était une arnaque. C’est après avoir discuté avec mon amie, Marie Thérèse, que j’ai su que ce n’est qu’un subterfuge». Quant à Marie Thérèse, elle indique que cinquante (50) personnes l’ont contactée, en l’informant qu’une personne est en train de demander de l’argent à son nom, prétextant avoir des soucis à l’extérieur. «Juste cinq (5) personnes lui ont envoyé des sommes», renseigne-t-elle. C’est de la même manière que Pape Babacar Coly a réussi à berner les autres parties civiles qui croyaient venir en aide à leurs amis.
Convaincu de la constance des faits, le représentant du Parquet a requis deux (2) ans de prison ferme. Réquisitoire que l’avocat de la défense, Me Seyba Danfakha, a jugé très lourd. La robe noire a sollicité la clémence du Tribunal, du fait de l’état de santé de son client. «Juger, c’est comprendre et pour le comprendre, il faut s’arrêter sur son forfait. C’est un garçon qui a été laissé, à lui-même. Il est diabétique. En plus, il souffre d’une hypertension artérielle. Son état ne rime pas avec les affres de la prison. Il s’est amendé et a même commencé à désintéresser les parties civiles», plaide l’avocat. Les débats clos, le Tribunal a mis l’affaire en délibéré au 21 décembre prochain.