Le camion s’est garé à Liberté 6 depuis plus de deux ans. Il a tout l’équipement nécessaire digne de la cuisine d’un chef. Le foodtruck est composé de frigos, de grills, de machines à granitas pour les jus en paillettes de glaces, de crêpières et d’une réserve d’eau. Ce restaurant ambulant bien équipé fait la fierté de son propriétaire. Philippe a débuté avec 12.000€ et grâce au food truck, il a pu ouvrir un autre restaurant. Le cuistot a fait du chemin avant de s’installer au Sénégal. Ingénieur en mécanique puis courtier, il s’est finalement reconverti dans la restauration rapide avec plus de dix ans d’expérience. « Il y a trois ans de cela grâce à un ami sénégalais, j’ai décidé de créer ma propre boîte de food truck», explique le quadragénaire. Le sieur paie une patente à 80.000 FCFA par an à la mairie et a engagé des salariés rémunérés entre 80.000FCFA et 150 .000 FCFA. Une somme dérisoire comparée à ce qu’il gagne. Un projet qui lui rapporterait 200.000 F CFA par mois.
L’originalité et la créativité sont très importantes pour l’ancien ingénieur en mécanique. «Nous nous sommes adaptés aux réalités du pays tout en apportant notre petite touche». C’est donc grâce à son innovation que Philippe a conquis le cœur des Sénégalais.
Des prix alléchants
Un autre food truck trône fièrement au niveau du parking sis en face du Lycée Thierno Seydou Nourou Tall à quelques mètres de Philippe. C’est déjà l’heure de la pause pour les jeunes lycéens. Selbé et sa bande d’amies convergent vers le camion-restaurant. La devanture du véhicule refuse du monde. Ce food truck dépasse de loin en termes de taille celui du Français. A l’extérieur, les tarifs des sandwichs, hot-dogs, norvégiennes et hamburgers sont inscrits sur une petite ardoise. Ils varient de 5.00 FCFA à 1.500 FCFA. Des prix qui attirent les clients.
Deux bancs sont mis à leur disposition devant le camion. Dès leur arrivée, les lycéennes s’assoient tandis que l’une d’elle passe la commande. Les jeunes filles en classe de quatrième sont friandes des hamburgers et elles ne sont pas les seules. En effet, des élèves du Lycée Galandou Diouf viennent aussi faire ripaille.
Amadou Baldé et ses deux collègues appuient sur le champignon afin de répondre au plus vite à la demande. A l’intérieur du camion restaurant, ils ne semblent point se soucier de la chaleur. Le véhicule est composé d’une friteuse, d’une plancha, d’une alimentation gaz et d’un plan de travail muni de compartiments où sont rangés les couverts. Il est alimenté par des panneaux solaires et des bouteilles d’eau de 10 litres sont disposées dans un coin. Le service est assez rapide et le travail se fait à la chaîne. Si Amadou surveille les frites, l’un de ses assistants sort la viande hachée du frigo-bar tandis que l’autre s’occupe d’éplucher les oignons. Quelques minutes d’attente plus tard, Selbé et ses amies sont enfin servies. Ces jeunes filles apprécient particulièrement le camion-restaurant. «Je viens tous les jours. C’est propre et ce n’est pas cher. Par exemple, dans un fast-food, les norvégiennes peuvent coûter jusqu’à 1.500 FCFA alors qu’ils les vendent à 900 FCFA».
Plus de trois food trucks
Un rapport qualité-prix qui fait aussi le bonheur de son amie Mame Diarra : «Les prix sont très abordables. En plus, l’eau nous est offerte». Un petit plus qui ne déplait pas aux clients et aux vendeurs qui se frottent les mains. «Nous avons trois food-trucks», a expliqué Amadou Baldé, le gérant. Ce qui permet de faire plus de profits. L’un des camions est situé sur les deux voies Camp pénal et l’autre sur les deux voies Sacré-Cœur.
«Il nous arrive aussi de nous déplacer dans d’autres zones afin d’augmenter nos chiffres d’affaires», fait savoir le manager. Ce dernier travaille en collaboration avec une Sénégalaise basée en France. Celle-ci a confié la tâche au patron de Baldé qui s’est occupé de faire démarrer le food truck. A l’époque, le trentenaire travaillait depuis six ans avec son patron dans la restauration. Par la suite, son employeur lui a fait part de l’idée de la dame. Quelque temps après, Baldé fait ses débuts dans ce projet. Un projet qui l’a fait passer de vendeur à gérant de food-truck. Un business neuf qui, selon le sieur, rapporte quelques bénéfices. On peut dire que ça roule !
Un nouveau concept qui trouve acheteurs
La profusion de ces genres de business s’explique d’abord par le fait que nous sommes dans une forme de transformation de notre économie. Elle devient une économie de services. C’est ce qu’avance Souleymane Astou Diagne. Selon le maître de conférences en économie à l’université Alioune Diop de Bambey, ils ont toutes les chances de trouver des clients car ce sont les jeunes qui s’adonnent à ces alimentations. «Le marché est là et l’alimentation est un secteur assez dynamique», affirme-t-il. Il va plus loin en soutenant que les gens sont de plus en plus tentés par ces aliments tels que les hot-dogs, sandwichs, paninis etc. Des produits que nous vendent les USA, la France, les réseaux sociaux pour montrer qu’on est dans l’ère du temps avec des jeunes comme principale cible.
L’émergence de ces foods trucks s’explique aussi, d’après l’économiste, par les mutations profondes de la mondialisation. Cela fait qu’on transfère les modes de vie de l’occident au niveau de nos pays. Les gens ont donc trouvé des astuces comme cela se fait aux Etats-Unis et en France de mettre en place un système de restauration pour mieux capter des évolutions spécifiques de la demande. «C’est une forme d’alimentation assez spécifique et très rapide moyennant un coût très accessible pour les couches moyennes», a fait savoir Souleymane Astou Diagne. Il parle notamment de l’aspect qualité/prix par rapport aux autres services qui sont dans l’alimentation. «Cela explique aussi la raison pour laquelle cela prospère dans nos pays», renseigne-t-il. Des prix alléchants au grand bonheur des acheteurs.