Accusé de mauvaise gestion, Mamadou Sy Mbengue a fait face à la presse mercredi pour se laver à grande eau. Tenant à apporter des éléments de réponse, le directeur de l’Ipres soutient que «les agissements de ses détracteurs sont des agissements sur commande». Seulement, la remarque qu’il convient de faire est que cela commence à devenir une habitude sous le règne du Président Sall. Parce qu’à chaque fois qu’un de ses proches est accusé de mauvaise gestion ou de malversations financières, au lieu que la justice se saisisse de l’affaire pour l’élucider, ce sont au contraire les accusés eux-mêmes qui montent au créneau pour se blanchir et indexer des ennemis «tapis dans l’ombre». Et souvent, comme s’ils s’étaient passé le mot, ils vont à la presse pour tenter de se disculper alors que la presse n’est qu’une tribune et non un tribunal, qui, dans ces cas d’espèce, est le plus habilité pour trancher.
Malheureusement, le constat est que la justice a tendance à se boucher les oreilles et fermer les yeux devant ces scandales à répétition qui jalonnent la gouvernance Sall. Et face à son inertie, les accusés se lavent du mieux qu’ils peuvent, de sorte que les populations ballottées entre accusations et dénégations ne savent plus finalement à quelle version se fier.
Une situation d’autant plus regrettable que l’actuel locataire du palais est celui là même qui avait promis à ses administrés une gouvernance “sobre et vertueuse”. Mais le constat est que la proximité avec le chef confère une certaine impunité. Sinon, comment comprendre le fait que tous ceux qui sont dans son clan continuent de se la couler douce malgré les graves accusations qui sont portées à leur endroit ? Ce fut le cas de Cheikh Oumar Hanne, l’ancien directeur du Coud qui avait été épinglé par l’Ofnac qui l’accusait d’avoir commis un carnage financier au Centre des œuvres universitaires de Dakar. Face à ces accusations gravissimes, il avait convoqué la presse pour se disculper et indexer des ennemis tapis dans l’ombre qui lui en voulaient. En fin de compte, rien ne lui est arrivé si ce n’est une promotion de la part du chef de l’État qui en a fait le ministre de l’Enseignement supérieur.
Mame Mbaye Niang qui avait été lui aussi épinglé par l’Igf dans l’ affaire des 29 milliards du Prodac s’était empressé de convoquer la presse pour non seulement se laver à grande eau, mais aussi, tirer à boulets rouges sur des ennemis tapis dans l’ombre qui voulaient le mettre en mal avec le grand patron. Depuis lors, aucune suite ni poursuite, à part le fait que le chef de l’État en a fait son chef de cabinet.
Même chose pour Aliou Sall qui, après la diffusion du «scandale à 10 milliards de dollars» qui le mettait en cause dans l’affaire Petrotim, avait ameuté la presse pour clamer son innocence et jurer sur tous les saints qu’il faisait l’objet d’un mauvais procès. Aussi, n’avait-il, lui non plus, été tendre avec ses ennemis tapis dans l’ombre qui lui cherchaient des poux dans la tête. Face au tollé soulevé par le reportage de la Bbc, son frère de président l’avait démissionné de la Cdc pour calmer la clameur publique. Depuis lors, la tension semble avoir baissé d’un cran et Aliou Sall se la coule douce.
Dans l’affaire des 94 milliards dans laquelle Ousmane Sonko accuse Mamour Diallo l’ex directeur des Domaines de détournement, c’est aussi le même scénario. L’accusé s’est présenté devant la presse pour se disculper avant que la commission parlementaire ne le passe à la blanchisserie. Finalement, ce qui est à déplorer c’est surtout l’inertie de la justice dans ce «Sénégal de tous pour tous». Pourtant, le Procureur de la République qui est prompt à monter au créneau dans des affaires de moindre envergure a vraiment de la matière. Mais ces scandales financiers qui déchaînent des torrents de passion et sur lesquels les populations devraient être édifiées ne semblent guère l’intéresser. À moins que ces affaires ne soient «comme un mauvais gruyère, avec plus de trous que de fromage» pour parler comme Serigne Bassirou Guèye concernant les dossiers de l’Ofnac restés sans suite.