Quatre ans après la démolition de leurs maisons, dans le voisinage du site de l’aéroport Léopold Sédar Senghor, les victimes de la Cité Tobago sont toujours dans le désarroi. Pourtant, elles ont été reçues en audience le 26 avril 2016 par le Premier ministre d’alors Boun Abdallah Dionne qui leur avait annoncé, en présence du médiateur dans cette affaire, le Grand Serigne de Dakar, Pape Ibrahima Diagne, qu’un terrain de 6,2 hectares déjà clôturé, à Ngor, allait les accueillir et que les travaux de lotissement ont même démarré en vue de la construction de 350 maisons.
Mahammad Dionne leur avait également fait une belle surprise en les informant, eux les propriétaires de maisons rasées à Tobago, qu’ils allaient être intégralement remboursés pour les impenses, c’est-à-dire les travaux de construction qu’ils avaient déjà eu à effectuer. Selon l’ex-Pm, il restait juste une audience que le Président Macky Sall devait accorder aux victimes de la Cité Tobago, pour tout officialiser. Ce qui fut fait le 24 juillet 2017, au cours d’une audience au Palais.
Au cours de cette entrevue, le Président Macky Sall leur avait promis «un recasement sans contestation ni opposition» sur deux sites (6 hectares à Ngor et 5 hectares à Yoff) et un appui variant entre 10 et 20 millions selon le niveau de démolition. Selon le chef de l’État, l’aménagement des deux sites devait permettre de recaser la totalité des personnes impactées par cette démolition. «Cette cérémonie démontre la sensibilité de ce dossier douloureux», avait dit Macky Sall.
Mais la joie qui avait précédé la réception de leur titre de propriété a laissé aujourd’hui la place à un profond désarroi, car les 336 victimes ne savent plus aujourd’hui à quelle autorité se fier. Tout simplement parce que l’armée soutient que les terrains attribués à Yoff par le chef de l’État, se trouvent dans le périmètre aéroportuaire et relèvent exclusivement du domaine militaire.
Ce qui rend impossible, pour ces nouveaux bénéficiaires de pouvoir y construire quoi que ce soit. Face à cette situation, les bénéficiaires n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. Parce que l’armée ne compte laisser quiconque construire sur ces sites et a même sorti un communiqué à cet effet, pour mettre en garde tous ceux qui seraient tentés de passer outre. «L’Aéroport Léopold Sedar Senghor reste un domaine militaire et ne fait l’objet d’aucune négociation ou transaction pour son aliénation», lit-on dans le document.
C’est pourquoi, aujourd’hui, les victimes de la cité Tobago invitent le président de la République à trancher le différend qui les oppose à l’armée. Parce que cette dernière reste inflexible, en s’opposant à toute construction sur le site qui, pourtant, lui a été attribué par ce même chef de l’État, Macky Sall himself.
Tout ceci nous invite à nous poser mille questions sur cet embrouillamini qui relègue tous nos feuilletons télé au rang de navets. Les victimes de la cité Tobago ont-elles été victimes d’une injustice pour que l’État se résolve à les recaser ? Comment une telle confusion – techniquement – a-t-elle pu être commise, en attribuant aux victimes des parcelles déjà affectées à la Grande muette ? Et puis, qu’a-t-on fait des terrains rasés de la défunte cité Tobago ?