Le Nobel d’économie à un trio de spécialistes de l’économie expérimentale

Le Nobel d’économie a sacré lundi trois spécialistes de l’économie expérimentale et empirique, le Canadien David Card, l’Américano-Israélien Joshua Angrist et l’Américano-Néerlandais Guido Imbens, dans des domaines comme le marché du travail et l’éducation.
Le trio “nous a apporté de nouvelles idées sur le marché du travail et montré quelles conclusions peuvent être tirées d’expériences naturelles en termes de causes et de conséquences”, a salué le jury Nobel.
“Leur approche s’est étendue à d’autres domaines et a révolutionné la recherche empirique”, a souligné le jury du 53e “prix de la Banque de Suède en sciences économiques à la mémoire d’Alfred Nobel”.
 
Dernier né des fameuses récompenses et le seul qui n’était pas prévu par le testament de l’inventeur suédois, le prix d’économie, remis depuis 1969, boucle la saison des Nobel.
 
Grâce à des “expériences naturelles”, David Card, né en 1956, a notamment analysé les effets du salaire minimum, de l’immigration et de l’éducation sur le marché du travail. Récompensé “pour ses contributions empiriques à l’économie du travail”, il reçoit la moitié du prix, doté de près d’un million d’euros.
 
“Ses études du début des années 1990 ont remis en question les idées reçues, ce qui a conduit à de nouvelles analyses et à de nouvelles perspectives”, a souligné le jury Nobel.
 
Les résultats de ses recherches ont en particulier mis en exergue le fait que l’augmentation du salaire minimum n’entraîne pas nécessairement une diminution du nombre des emplois.
 
L’autre moitié se partage entre Joshua Angrist, 61 ans, et Guido Imbens, 58 ans, “pour leurs contributions méthodologiques à l’analyse des relations de cause à effet”.
 
Surprises
Au milieu des années 1990, ils ont réalisé des percées méthodologiques en permettant de tirer des conclusions solides sur les causes et les effets pouvant être tirés d’expériences naturelles, par exemple en matière d’éducation.
 
Une difficulté qui se pose car les conséquences d’une expérience ne sont pas les mêmes suivant les groupes suivis.
 
Angrist, Card et Imbens faisaient partie des dizaines de noms envisagés par des experts sondés par l’AFP.
 
L’an passé, le prix d’économie avait sacré un duo américain de spécialistes des enchères, Paul Milgrom et Robert Wilson.
 
Parfois qualifié de “faux Nobel”, le “prix de la Banque de Suède en sciences économiques à la mémoire d’Alfred Nobel” a été créé par la banque centrale suédoise plus de 60 ans après les cinq autres (médecine, physique, chimie, littérature et paix).
 
Avec seulement deux lauréates parmi les désormais 89 récipiendaires du prix (l’Américaine Elinor Ostrom en 2009 et la Française Esther Duflo 10 ans plus tard), soit 97,7% d’hommes sur le total, il est le moins féminin des six, alors même qu’il a un demi-siècle de moins que les autres prix.
 
Il est aussi largement monopolisé par des économistes américains : il faut remonter à 1999 pour une année sans que les Etats-Unis aient eu un lauréat en économie.
 
Le 53e prix d’économie boucle une saison où les comités ont déjoué les pronostics d’experts comme des parieurs.
 
Autres prix Nobel
Si la liberté de la presse était favorite pour le prix de la paix, le comité Nobel norvégien a choisi, plutôt qu’une organisation, d’honorer deux journalistes d’investigation, la directrice du média philippin Rappler, Maria Ressa, et le rédacteur en chef du journal russe Novaïa Gazeta, Dmitri Mouratov.
 
Le prix de littérature a récompensé Abdulrazak Gurnah, un romancier d’origine tanzanienne vivant en exil au Royaume-Uni, là aussi une surprise.
 
En médecine, les vaccins à ARN messager contre le Covid-19 n’ont pas donné lieu à des prix. La récompense a sacré les chercheurs américains David Julius et Ardem Patapoutian pour leurs travaux sur les récepteurs nerveux du toucher.
 
Le prix de physique est allé pour la première fois à deux experts du climat, l’Allemand Klaus Hasselman et l’Américano-Japonais Syukuro Manabe, ainsi qu’au théoricien italien Giorgio Parisi.
 
Enfin le prix de chimie a sacré un duo de pionniers d’un nouveau type de catalyseurs, l’Allemand Benjamin List et l’Américano-Ecossais David MacMillan.
 
Covid oblige, les lauréats des prix ne se rendront pas à Stockholm pour la traditionnelle cérémonie du 10 décembre, comme l’an passé. Un petit espoir demeure pour le Nobel de la paix à Oslo, avec une décision attendue dans les prochains jours.

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