Par Abdoulaye MBOW
Son discours fortement attendu, a été une occasion pour le Président de la République d’annoncer des nouvelles mesures pour faire face au Coronavirus. Comme s’y attendaient nombre de Sénégalais, Macky Sall a pris des mesures d’assouplissement. Entre autres, la réouverture des lieux de culte, des marchés six jours sur sept, la reprise des classes pour les élèves en classe d’examen. Non sans indiquer que l’heure du couvre-feu a changé, démarrant à partir à 21 heures et se terminant à 5 heures du matin.
D’aucuns parleront de décisions courageuses puisque le Président a bel et bien fait savoir qu’il nous faut apprendre à vivre avec le virus. Ce virus sournois et vicieux, démocrate pour ne pas dire très républicain, aura fait des ravages et continue de faire des ravages. Depuis son apparition à Wuhan (Chine), il est la seule star qui domine l’ensemble des plateaux économiques, industriels, agricoles, éducatifs, culturels, religieux, etc. À vrai dire, le virus est le Goliath et le David de ce 21ème siècle de toutes les compétions mondiales. Dans sa logique, il a remis en question la commune volonté de vivre ensemble car, personne ne salue plus personne, personne n’approche plus personne, tout le monde se masque le visage et se lave les mains selon les moyens du bord. Au volant de ses couronnes multiples, il (virus) peut arriver à accélérer, décélérer, envahir, faire peur, assommer et ôter la vie. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que la majorité des pays musulmans touchés aient pris la décision de fermer les lieux de culte, Maison de Dieu. Au Sénégal, cela a créé des grincements de dents. Et, l’on n’a même donné l’impression que la majorité des Sénégalais était subitement devenue trop bon musulman réclamant urbi et orbi la réouverture des mosquées. Cela peut se comprendre pour plusieurs raisons.
Nous sommes nombreux à ne jamais prier dans une mosquée
Mais, qu’on se dise une vérité : nous sommes nombreux à ne jamais fréquenter une mosquée quel que soit le lieu. Nous sommes nombreux à ne jamais prier dans une mosquée le temps d’une prière obligatoire quotidienne. Seulement, l’exception sénégalaise est ce qu’elle est. Nous réclamons ce dont on nous prive et qui n’a jamais été un besoin vital de notre vie de tous les jours. Dans un pays où les lois et règles les plus élémentaires sont bafouées, il est certain que les mosquées peuvent bien être des épicentres de contamination. Encore une fois, nous sommes au Sénégal où il est difficile d’avoir le même comportement que certains pays musulmans où chaque fidèle s’arme de son masque, de son tapis de prière tout en respectant la distanciation sociale. Que dire des marchés, qui ont toujours été des bombes sociales à retardement ! Au-delà des nombreux incendies notés, nos marchés véritables poudrières seront également et à coup sûr, des centres de contamination. «Apprenons à vivre avec le virus», a déclaré le Président Macky Sall. Une phrase aux nombreuses connotations et dénotations si l’on sait qu’un mimétisme frappe nos dirigeants. L’Europe et les Usa ne sont pas l’Afrique. Le Sénégal est loin de l’être pour le devenir. Dans des pays comme la France, les populations sont restées «emprisonnées» pendant plus de deux mois. En Angleterre, cela va se poursuivre jusqu’au 1er juin. Alors, du point de vue de l’approche économique, le tableau est véritablement tout autre. Paul Valery disait : «si l’État est fort, il nous écrase, s’il est faible, nous périssons».
Une citation qui en dit long par rapport aux mesures présidentielles. Car, depuis l’apparition de la pandémie sous nos tropiques, il nous a été vendu une panoplie de mesures à respecter. Certes, c’est la meilleure et la seule démarche qui vaille, mais, plus que jamais, quand le débat tourne autour de la dérision comportementale, de la promotion des antivaleurs, de l’indiscipline, nous ouvrons au virus des portes déjà défoncées. Donc, exclamons-nous ! Ceci, pour dire au Président – sauf erreur – vous nous exposez à tout point de vue. Vous nous offrez au virus pour qu’il nous anéantisse. Vous donnez l’occasion au virus d’entrer dans nos foyers sans aucune protection, malgré les mesures barrières. Dans ce Sénégal des mille débats, il est certain que les Don Quichotte qui passent leur temps à lutter contre des moulins à vent, pullulent, se crêpent le chignon et se désorientent de la ligne directrice qui veut que l’on soit tous unis pour vaincre l’ennemi.
Plus de conseils des ministres en visioconférence ?
Pour faire face au virus et pour l’application des mesures barrières, le général en chef avait aussi pris la décision de tenir les Conseil des ministres pour visioconférence. Ce qui a permis un confinement, loin de tout potentiel acte de contamination, de parler des questions de la République loin de tout contact. Dans les services administratifs, c’est également le cas.
Toutefois, donnant l’occasion aux Sénégalais d’aller vers des rassemblements – inéluctablement – le conseil des ministres devra reprendre son cours normal et se tenir à la salle des banquets du Palais. Effectivement, cela va montrer une fois de plus, qu’apprendre à vivre avec le virus commence par ceux qui nous y obligent. Nous sommes obligés de ne plus jouer au Ludo car, nous avons le temps de vadrouiller pour tromper la faim (daak koor). Nous pouvons même dormir dans les mosquées après une prière. Nous pouvons, passer plus de temps dans les marchés à papoter, marchander… Sous un autre aspect, la reprise du chemin de l’école par les élèves en classe d’examen, va conduire à de grands rassemblements tout comme dans les moyens de transport.
La reprise de l’activité économique est de rigueur surtout pour un pays pauvre, mais, imaginons une recrudescence de la contamination avec toutes les conséquences. À vrai dire, Macky a cédé à la pression…. Mais, tout de même, apprenons à vivre (cohabiter) avec le virus.