Malgré les milliards Cfa : le pays baignent dans les eaux de pluies

Après la pluie le beau temps, a-t-on coutume de dire ; mais à Dakar c’est tout à fait le contraire, car après la pluie, c’est toujours un sale temps qui est donné à observer. Les fortes pluies qui se sont abattues sur Dakar et ses environs dans la nuit de mercredi à jeudi ont causé d’énormes dégâts. Des routes coupées, des maisons submergées d’eau, des voitures tombées en panne, des embouteillages monstres, tel était le décor dans Dakar et ses environs inondés par les eaux de pluies.

Ce qui est le plus frustrant dans cette situation, c’est que ça dure depuis des années, et aucune solution viable n’est en vue côtés autorités, qui peinent encore à trouver la bonne formule pour faire face et remédier au phénomène des eaux pluviales. Il suffit que le ciel daigne ouvrir ses vannes pour que les populations soient mises en danger d’inondation.

Et tout cela par défaut de bonnes canalisations, rendant les rues et avenues inondées et impraticables, sans compter les égouts débordant et dégoulinant leurs détritus, ces vétustes bâtiments qui au bord de s’effondrer comme des châteaux de sable et les poteaux électriques défectueux de la Senelec qui constituent des dangers de mort pour des citoyens peu avisés.

À chaque saison des pluies, la même litanie est récitée devant les mêmes maux : les mêmes plaintes sont formulées avec des mots déjà entendus. Jamais l’État ne songe à faire preuve d’anticipation en mettant en place un système viable de canalisation pour une évacuation adéquate des eaux de pluies ; ou en remplaçant les poteaux électriques défectueux. Mais non, il attend toujours qu’une catastrophe survienne pour essayer de parer au plus pressé en réagissant à travers le déclenchement de son plan Orsec qui ressemble plutôt à un plan “mort-sec”, tellement il demeure inefficace et toujours sec devant la furie des sempiternelles eaux.

Comme le dit l’adage, «gouverner c’est prévoir». Nos gouvernants devraient penser à mettre en place un système d’assainissement efficace pour mettre fin au calvaire des populations. Mais il semble que le pouvoir est souvent dépassé par les événements et fait toujours dans le bricolage et le rafistolage. Ce qui est inquiétant, face au niveau élevé des dégâts enregistrés, après seulement une première et deuxième pluie. Cela laisse penser que le pire reste à venir, si l’on se fie aux prévisions météorologiques qui annoncent d’autres pluies.

Quand les populations prises dans le piège des eaux commenceront à crier leur ras-le-bol, les autorités iront patauger de façon ostensible dans les eaux en offrant des motopompes, des produits phytosanitaires et autres denrées alimentaires. Ensuite, lesdites populations seront recasées dans des écoles, le temps que l’eau soit retirée de leurs habitations. Ce qui aura une conséquence sur la rentrée des classes qui sera reculée, le temps de déplacer les sinistrés et de désinfecter les écoles hébergeuses.

Pour dire qu’à chaque fois, c’est le même spectacle qui nous est offert par le pouvoir qui semble faire dans le pilotage à vue. Pourtant, que de conseils interministériels tenus par le pouvoir pour venir à bout de ce phénomène ! Mais à ce jour, il semble que le mal persiste.

À chaque saison des pluies, la même litanie est récitée devant les mêmes maux

En août 2012, Abdoul Mbaye, le Pm d’alors, avait annoncé des mesures de rupture prises par le gouvernement pour juguler ce fléau. C’est ainsi qu’il a été chargé au ministère de l’Urbanisme d’identifier des zones inondables, ainsi que leurs occupants et de proposer ensuite un plan pour un programme de réparation et de relogement. Instruction a également été donnée au ministre de l’Urbanisme, aux Gouverneurs et aux Préfets d’arrêter les constructions anarchiques. Le chef du gouvernement avait  défendu la poursuite de «la logique du plan Jaxaay» et annoncé dans le même sillage  que ledit plan serait audité. «Quand des personnes sont dans des bas-fonds, on ne peut pas les laisser là. Il faut détruire les maisons, parce que ça va être des cycles éternels d’inondation, d’enlèvement des eaux…», avait soutenu le Premier ministre.

Le 30 juin 2016, au sortir du Conseil interministériel sur les inondations, le ministre-conseiller, porte-parole du gouvernement, Seydou Guèye, avait  déclaré que «depuis 2012 le gouvernement a dépensé plus de 70 milliards Cfa et relogé plus de 2000 ménages», dans le cadre de la gestion des inondations.

Le jeudi 22 juin 2017, alors ministre délégué auprès du ministère du Renouveau urbain et du cadre de vie, Pape Gorgui Ndong, s’adressant à la presse, à l’issue du Conseil interministériel sur la prévention et la gestion des inondations, tenu dans les locaux de la Primature, déclarait que l’État du Sénégal a mis en place près de 2 milliards Cfa pour la prévention et la gestion des inondations. «Près de 2 milliards Cfa ont été déployés pour les inondations, cette année», avait affirmé Pape Gorgui Ndong.

Ce qui a été noté, avait révélé le ministre, «c’est qu’il y a énormément d’ouvrages et énormément de projets qui sont en train d’être mis en œuvre dans le cadre du programme décennal de gestion des inondations qui sont en cours», avait-il ajouté. Le 26 juin 2018, s’exprimant au terme d’un conseil interministériel consacré à l’évaluation du dispositif de gestion des inondations de l’hivernage 2018, Mansour Faye alors ministre de l’Hydraulique et de l’assainissement annonçait que 1,100 milliards Cfa serait débloqué dès à présent pour anticiper sur les actions urgentes. Il s’agissait, avait-il dit, des travaux sur le système de pompage qui seront effectués par la Brigade nationale des sapeurs-pompiers, les activités de désinfection qui impliquent le Service d’hygiène national et la prévention des risques. Une mission confiée à la Direction de la protection civile.

Le ministre de l’Hydraulique et de l’assainissement avait indiqué qu’en plus de cette somme, d’autres budgets seront mis en contribution. «Vu que les inondations sont des phénomènes naturels, on ne peut pas les prévenir. Tout ce qu’il faut faire, c’est de prendre des dispositions pour qu’en cas de problème de cette nature, les services de l’État puissent se mettre en œuvre, pour non seulement pouvoir intervenir en urgence, mais aussi atténuer les conséquences abondantes», avait-il laissé entendre.

Malgré ces déclarations d’intention, les dispositifs et les pluies de milliards annoncés, les populations font toujours face aux mêmes désagréments et continuent de patauger dans les eaux de pluies.

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