Mariages avec disparité de culte ou mariages mixtes: L’amour prend le dessus

Les mariages mixtes ou encore les mariages avec disparité de cultes sont de plus en plus nombreux. Une tendance qui ne fait que s’accroître au fil des années. Et pour cause, l’amour, qui défie toute loi de la nature, faisant que la différence religieuse ne constitue plus une entrave à l’union. Avec le sociologue Djiby Diakhaté, le père Alex Junior et Oustaz Fadel Gueye, on en sait un peu plus sur ces mariages.

Aujourd’hui, l’amour a pris le dessus sur les barrières culturelles, ethniques pour donner vie à cette sensation inexplicable qui fait que les deux êtres trouvent leur bonheur en leur couple. Dans un couple, s’aimer ne nécessite que l’engagement de deux personnes mais pour s’unir, il y a tout un arsenal de partis intéressés dont la famille où chacun cherche à conserver ce qui le rattache à ses appartenances. Entre l’accord pour la célébration du mariage, l’éducation des enfants est un des challenges majeurs des couples. C’est là que se cristallisent les phénomènes de tradition, culture, entre autres. Plus ces éléments sont différents, plus il faudra s’adapter. « Ce qu’il faut comprendre est qu’on est dans un monde qui est devenu un village planétaire, comme le dit Marchal Mathurin.

Les différentes entités du monde sont en train de s’uniformiser en raison des relations profondes que ces segments entretiennent avec les réseaux, les boulevards de communication qui deviennent de plus en plus restreints. On a même l’impression qu’aujourd’hui, chacun, en ce qui le concerne, est en relation avec l’autre et compte non tenu de l’appartenance raciale ethnique, confessionnelle, religieuse ou géographique, donc c’est un monde qui est en train d’uniformiser ces structures, qui tend vers une homogénéisation de ces pratiques », rappelle le sociologue Djiby Diakhaté. Il poursuit pour dire que cette uniformisation ne signifie pas qu’il n’y a pas de nuance dans les différentes localités, qu’il n’y a pas de pratique spécifique à des entités qui restent arc-boutées à leur identité, leur tradition et coutume.

Sous ce rapport, on va dire qu’au-delà des liens profonds que la mondialisation nous a imposés, il existe encore des spécificités, des réalités propres à des communautés qui vivent en fonction de ce qui constitue leur patrimoine culturel. Il y a une tendance forte à la création de ce que Senghor appelle une civilisation de l’universel par le biais de ce qu’il a nommé par la belle expression « le rendez-vous du donner et du recevoir », a expliqué le sociologue. Il fut un temps, ces mariages entre deux personnes de religion différente étaient interdites, on ne le permettait qu’en obligeant le partenaire de l’autre religion à se convertir d’abord s’agissant de l’islam. L’Eglise catholique est plus souple, mais elle s’assure, cependant, que les deux partenaires s’engagent dans un mariage monogame, indissoluble, et avec la garantie d’éduquer les enfants dans la foi chrétienne, tout en gardant tous les deux leurs convictions religieuses personnelles.

L’Eglise interdit le mariage avec disparité de culte

« Le mariage entre une personne catholique et une partie non baptisée de la religion musulmane par exemple et même un athée s’appelle le mariage avec disparité de culte. Et ce mariage est formellement interdit par l’église catholique car la disparité de culte fait partie des empêchements, c’est-à-dire des empêchements qui rendent le mariage nul », a précisé le père Alex Junior, curé de la paroisse saint Abraham de Guédiawaye, avant de poursuivre : « Mais si les deux personnes qui voudraient contracter ce mariage arrivent à remplir toute les conditions requises de le faire, ce mariage est valide. Par contre, il n’a pas de valeur sacramentelle. Ce qui n’empêche pas toutefois l’église catholique de respecter le choix des couples pour un mariage avec disparité. » Toutefois, comme tout engagement, cette union a des conditions pour qu’elle soit reconnue, insiste le prêtre. Pour que l’autorité compétente, c’est-à-dire l’évêque ou son délégué, concède la dispense, la partie catholique déclare qu’elle est prête à écarter tous les dangers d’abandon de la foi et promet sincèrement de faire tout son possible pour que tous les enfants soient baptisés et éduqués dans l’église catholique, l’autre partie doit être informée à temps des promesses de la partie catholique de sorte qu’il soit établi qu’elle connaît vraiment la promesse et l’obligation de la partie catholique, et puis les deux parties doivent être instruites des propriétés essentielle du mariage, aucun élément ne doit être exclu ni par l’un ni par l’autre des parties contractantes.

L’église catholique n’impose pas le baptême, mais elle demande aux non baptisés d’être en accord avec les quatre piliers du mariage chrétien à savoir : la liberté de consentement, l’indissolubilité du mariage, la fidélité, la procréation et l’éducation des enfants ainsi qu’une ouverture aux autres. C’est quand toutes ces conditions sont remplies que l’autorisation est accordée à la partie catholique pour qu’elle contracte un mariage avec la partie non baptisée. Il faut vérifier en particulier que le partenaire musulman est prêt à rester fidèle à un seul conjoint et à vouloir son bien et que le partenaire catholique déclare son attachement à l’indissolubilité de son union. Telles sont les exigences de l’Eglise catholique pour permettre à un de ses fidèles qui désire contracter un mariage avec disparité de culte.

 Le point de vue l’Islam

Dans l’islam, le mariage d’une musulmane avec un non-musulman est interdit, sauf si le non musulman se convertit, selon Oustaz Fadel Gueye et par conséquent, les enfants du couple devront être éduqués dans le respect des traditions musulmanes. « Vous comprendrez que le mariage tient une place très importante dans la religion musulmane, et qu’il s’agit d’un engagement plus que sentimental. On parle d’un contrat entre un homme et une femme. Ce dernier est appelé nikah et est fondé, selon le Coran, sur “ l’amour et la compassion que Dieu a infusés dans le cœur de l’homme et de la femme afin qu’ils forment un couple ”. Qu’elle soit mineure ou majeure, une femme qui désire se marier pour la première fois doit obtenir l’accord de son tuteur (wali), ce dernier devant forcément être musulman. Si le tuteur refuse ce mariage, la jeune femme pourra alors s’aider d’un juge pour pouvoir se marier. Tout couple musulman peut divorcer et se remarier bien que cela soit pensé comme « la chose admise la plus détestée de Dieu ». « Le mari doit, à sa future épouse, verser une dot dont le montant reste secret pour les personnes extérieures au couple. Cette dernière est aussi appelée douaire (mahr) et pourra être utilisée même si le couple venait à divorcer. Cette dot peut avoir diverses formes : argent, bijoux ou autre. »

Le point de vue du Sociologue

Aujourd’hui, quel regard porte la société sur ces mariages ? Réponse du Sociologue Djiby Diakhaté Ces considérations qui étaient naguère sacrées au cœur des acteurs et qui déterminaient leur place dans la société et dans le monde, ont tendance à se fragiliser et donc du coup, on voit de plus en plus, des types de mariage qui unissent des acteurs qui appartiennent à des religions différentes. C’est une grande tendance qui caractérise le monde aujourd’hui, sauf que une fois qu’on a dit ça, ce qu’il faut ajouter, c’est l’adhésion de la communauté et ça c’est un autre problème, l’idée que les jeunes peuvent dire que ce qui est plus important c’est l’amour donc nous allons nous lancer dans un lien matrimonial essentiellement fondé sur l’affectivité, mais on oublie derrière que l’onction de la communauté n’est pas toujours acquise. Dans la société Africaine, le mariage n’est pas seulement une affaire qui mobilise deux êtres seulement, c’est aussi une affaire qui mobilise des familles et donc lorsque les communautés ne sont pas en phase avec les décisions et les actes qui sont posés, le couple peut évidemment rencontrer le rejet de la communauté et peut être fragilis. La discussion est périodiquement lancée dans la société avec les jeunes, qui considèrent la position traditionnelle comme fondée, non pas sur le texte coranique, mais sur d’anciens réflexes. Ce n’est plus le cas au Sénégal. En tout état de cause, beaucoup de personnes ignorent que les mariages mixtes ne sont pas faciles, non seulement du fait des différences religieuses mais également sur le plan culturel et traditionnel entre les deux conjoints. Nombreux finissent pas se séparer du fait du poids de la société.

AVEC Rosita Mendy

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