Mesures d’assouplissement : Entre inquiétude et scepticisme

Les mesures d’assouplissement prises par le chef de l’État concernant la pandémie du coronavirus sont diversement interprétées par le personnel médical et la classe politique, partagés entre inquiétude et scepticisme.

 Par El Hassane SALL

 Selon Mballo Dia Thiam, secrétaire général national du Syndicat unique des travailleurs de la santé et de l’action sociale (Sutsas), Macky Sall a pris des «mesures périlleuses qui ne se justifient nullement», surtout en cette période de pandémie. Le syndicaliste prédit des «lendemains difficiles», surtout pour le personnel de santé, qui n’est pas non plus épargné par le virus.

«Là où nous en sommes à 19 décès, là où 1100 et quelques personnes occupent des lits et certains dans l’antichambre de la réanimation, alors qu’il n’y a pas de respirateurs, pas de réanimateur, qu’on nous dise qu’on va ouvrir les vannes, c’est une aventure périlleuse, surtout pour le personnel et par ricochet pour les populations», a-t-il relevé au micro de Zik Fm.

Par rapport à l’ouverture des mosquées, des écoles, des marchés et l’allègement des heures du couvre-feu (21h à 5h du matin), le coordonnateur d’«And Gueusseum» soutient que rien ne justifie ces mesures prises par le Président Sall. «Là où nous pensions qu’il fallait, au moins corser la mesure, pour Dakar et Touba qui constituent des épicentres de la maladie, on se rend compte qu’on est en train de remettre en cause tout un dispositif qui commençait à donner ses effets», se désole le syndicaliste.

Quant au docteur Amadou Yéri Camara, secrétaire général du Syndicat autonome des médecins du Sénégal, il a du mal à comprendre la décision du chef de l’État de desserrer l’étau dans le cadre de la lutte contre le covid-19. «C’est une nouvelle qui nous a surpris. Au moment où les cas augmentent, on s’attendait au moins à un statuquo, faute d’être plus ferme», se désole-t-il. Dr Camara s’attendait à un changement du côté des mosquées, vu la pression et les multiples violations de la loi. Il fallait nécessairement harmoniser, reconnaît-il, pour fermer toutes les mosquées ou laisser tout le monde prier. Cependant, il ne se doutait pas d’un tel assouplissement. Surtout dans l’impréparation. «Les mesures d’accompagnement doivent se faire en amont. Avec une disponibilité des masques et la rigueur dans leur utilisation. On s’attendait certes à une réorientation, mais là, on est très surpris», souligne-t-il. Le spécialiste pense qu’il fallait maintenir l’interdiction du transport interurbain, mais aussi, la fermeture alternée des marchés.

De même, il s’interroge sur le respect des mesures barrières à la mosquée. «Il y a des endroits sensibles comme le lieu d’ablution où les gens se passent les instruments. Ensuite, les fidèles se prosternent aux mêmes endroits. Il y a le contact avec le nez, les yeux et même la bouche. Tout cela devait être étudié sérieusement», confie-t-il à Seneweb. Et lorsque le ministre de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye, déclare qu’il n’y aura pas plus de 12 fidèles à la mosquée, le médecin se veut sceptique. «Si c’est ça, il y aura moins de risque, mais j’attends de voir». Dr Camara pense qu’il fallait impliquer les autorités administratives pour voir quels sont les lieux de culte qui peuvent satisfaire les conditions imposées par la lutte contre la pandémie du covid-19 avant toute réouverture. Thierno Alassane Sall, pour sa part, a, dans un tweet, accusé le Président Sall d’avoir rendu l’État “impuissant” dans la lutte contre le covid-19. «Opération déconfinement du virus ! Voilà le résumé des annonces de Macky Sall, qui ne se préoccupe plus, c’est désormais manifeste, que de son régime et sa tranquillité propre. À l’épreuve des faits, l’homme fort du Sénégal a rendu l’État impuissant comme jamais auparavant», a posté le leader de la République des valeurs.

Abdoul Mbaye, l’ex Pm, pour ce qui le concerne estime que : «Le Sénégal est le premier pays à renoncer presque totalement aux mesures de lutte contre la pandémie au moment où elle y atteint son pic. Cela ressemble fort à du “faites ce que vous voulez désormais je m’en moque”», a-t-il écrit sur sa page Facebook. Avant d’ajouter: «Macky Sall choisit de faire démissionner l’État. Il faut reconnaître que la question du déconfinement ne pouvait être simple à résoudre. Il était devenu nécessaire de remettre le pays en activité tout en préservant les populations contre la propagation des contaminations. Cela supposait un travail important et rigoureux, de la compétence et un sens élevé de l’intérêt national. La simplicité et le recul face aux pressions ont été le choix». Le leader de l’Act est convaincu que, maintenant, il nous reste à prier Dieu (SWT) et à nous protéger, comme le fait, selon lui, le Président Sall.

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