Pour se faire recruter dans une clinique : une étudiante Ivoirienne en médecine confectionne un faux diplôme

Jeune étudiante en médecine, l’Ivoirienne Rawane Hassan se retrouve aujourd’hui au centre d’une affaire judiciaire qui pourrait changer le cours de sa vie. Elle est poursuivie pour les chefs d’exercice illégal de la médecine, mise en danger de la vie d’autrui, d’escroquerie, ainsi que de faux et usage de faux dans un document administratif. La prévenue, qui a comparu ce mercredi devant le tribunal des flagrants délits de Dakar hier, sera fixée sur son sort le 22 janvier prochain.

Tout a commencé lorsque Mme Saba, directrice adjointe de la clinique Océan, a décidé de vérifier l’authenticité du diplôme que Hassan avait fourni. Cette dernière prétendait avoir soutenu sa thèse en février 2024, grâce à une attestation que sa mère, résidant en Côte d’Ivoire, lui aurait envoyée. Avec ce document, elle avait décroché un poste de stagiaire dans la clinique, percevant un salaire mensuel de 200 000 francs CFA, et participait à des tâches telles que l’accueil des patients et la garde. Cependant, une enquête menée auprès de l’université privée Euromed, située à Ouakam, a rapidement révélé que l’attestation était falsifiée. Bien que Rawane Hassan ait effectivement suivi six années de formation dans cet établissement, elle n’a jamais soutenu de thèse ni entamé la septième année requise pour devenir médecin. Informée de la situation, la direction de l’école a porté l’affaire devant la justice, entraînant l’arrestation de la jeune femme le 6 janvier dernier.

Hier, la prévenue a fait face aux magistrats du tribunal des flagrants délits de Dakar. Devant les juges, Rawane Hassan, âgée de 28 ans, a admis les accusations portées contre elle, tout en affirmant que l’erreur provenait d’un malentendu : «C’est ma mère qui conserve mes documents. Quand je lui ai demandé de m’envoyer l’attestation de l’année en cours, elle m’a transmis une capture d’écran d’une attestation de soutenance que j’ai ensuite partagée avec Mme Saba, sans vérifier son authenticité. Ce n’est qu’après coup que je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’un faux.  Ma mère se trouve en Côte d’Ivoire. C’est elle qui m’a envoyé l’attestation de soutenance que j’ai transférée à la directrice de la clinique. La date de naissance qui est inscrite sur le document n’est pas la mienne. A la clinique Ocean, je m’occupais des malades hospitalisés. J’étais là  bas le matin. Les seules consultations que j’ai eu à faire c’est dans le cadre des consultations gratuites organisées dans les régions. J’ai eu aussi à orienter des patients auprès de spécialistes. Je n’ai jamais assuré la garde. C’est mon copain qui l’assure, c’est un médecin généraliste».

À la barre, Mme Saba a témoigné en faveur de l’accusée, insistant sur son sérieux et son engagement au travail. La témoin qui vole à son secours, dira :  «Rawane n’a jamais posé d’actes médicaux compromettants. Malgré son faux diplôme, elle s’est montrée compétente et travailleuse. Elle est seule ici, sans famille, car son pays est en guerre. Ma mère l’a prise sous son aile comme une fille adoptive.» Toutefois, le procureur a estimé que le témoignage de Mme Saba visait uniquement à atténuer les responsabilités de l’accusée. Il a également souligné le refus de Rawane de permettre l’examen de son téléphone, ce qui, selon lui, prouve que l’attestation ne provient pas de sa mère. Pour ces raisons, il a requis une peine de 2 ans de prison ferme, considérant que les faits d’escroquerie et de mise en danger de la vie d’autrui étaient établis.

La défense appelle à la clémence

Les avocats de la défense ont plaidé pour une application indulgente de la loi. Me Danfa a rappelé que Rawane Hassan n’était qu’une étudiante en médecine, encadrée par son compagnon, un médecin généraliste, dans toutes ses tâches : «Elle n’a jamais pratiqué la médecine de manière autonome. Les consultations qu’elle a réalisées l’étaient dans le cadre de campagnes gratuites, et aucun patient ne s’est plaint. De plus, son salaire prouve qu’elle était stagiaire, pas médecin.» De son côté, Me Camara a insisté sur le contexte particulier de l’affaire : «Rawane a passé six ans à se former pour devenir médecin, mais elle n’a pas encore achevé son parcours. Elle est divorcée et vit au Sénégal depuis qu’elle a trois ans. Prenons en compte ces circonstances et faisons preuve de clémence.»

actunet.net avec Aïssatou TALL