Les députés de Yaw, Massata Samb et Mamadou Niang, risquent 2 ans de prison ferme. Une peine requise à leur encontre par le Parquet. La partie civile, Amy Ndiaye Gniby, en attendant le verdict qui sera rendu le 26 décembre, leur réclame 500 millions de francs pour réparation.
Les députés du groupe parlementaire Yewwi askan wi (Yaw), Massata Samb et Mamadou Niang, ont fait face hier au juge du Tribunal d’instance de flagrants délits. Ils comparaissaient pour des faits de coups et blessures volontaires sur une personne vulnérable en raison de son état de grossesse au préjudice de Amy Ndiaye. Ils risquent deux ans de prison ferme pour ces chefs.
En fait, la députée de la Coalition Bby, et par ailleurs maire de Gniby, reproche aux prévenus de l’avoir sauvagement agressée dans l’enceinte de l’Hémicycle. Dans sa déclaration contenue dans le procès-verbal d’enquête, elle soutient que Massata Samb, après avoir pris la parole, a quitté le pupitre pour se diriger vers elle et lui administrer une gifle, et Mamadou Niang lui a donné un coup de pied au niveau l’abdomen. Des accusations balayées d’un revers de la main par les députés de l’opposition.
«Ce n’est pas vrai. Les faits n’ont pas débuté comme ça. Elle a proféré des propos discourtois à l’endroit de mon guide religieux. Quand j’ai pris la parole, j’ai demandé au président de l’Assemblée nationale de rappeler le Règlement intérieur, parce qu’il y a une députée qui a tenu des propos discourtois à l’endroit d’un guide religieux. Elle a rétorqué en disant ‘’ma teye’’, je l’assume. Je suis venu et j’ai arraché son foulard, personne ne peut dire qui je lui ai administré une gifle», a dit Massata Samb. D’après le député, au moment où il se dirigeait vers la dame pour arracher son foulard, quelqu’un l’a tiré par derrière. Et c’est ce qui explique d’ailleurs qu’il a raté le foulard. «Il y a quelqu’un qui m’a tiré en arrière. Je crois que c’est l’huissier. Je ne l’ai jamais frappée», a-t-il ajouté. Une dénégation qui a surpris le juge, qui lui a envoyé deux photos prises lors de cette bagarre et qui tranchent d’avec ses propos, afin qu’il les observe bien. Mais le député est resté ferme dans sa position. «Je ne l’ai jamais giflée. En arrachant le foulard, cela peut sembler que je lui ai administré une baffe. Mais ne n’ai jamais porté la main sur elle», a-t-il tenté de se dédouaner.
Mais à la question du juge de savoir pourquoi il voulait arracher son foulard, Massata Samb sans fioritures a déclaré. «Je l’ai fait parce qu’elle n’accorde aucun respect aux députés. Elle insulte les gens à l’Assemblée.» Le député du Pur, aux allures d’un athlète, précise à l’intention du juge que s’il avait frappé Awa Ndiaye, elle ne resterait pas debout, mais qu’il était venu pour lui arracher son foulard après avoir manqué de considération à son guide spirituel.
Selon les faits de l’espèce, c’est quand Awa Ndiaye a pris une chaise pour apporter la réplique à son agresseur, que Mamadou Niang a surgi pour lui donner un coup au ventre. Une accusation que ce dernier a véhément contestée devant la barre. «J’ai couru pour m’interposer entre eux. J’ai vu la députée qui avait une chaise, elle est venue avec allure, j’ai levé les mains et mon pied. Elle m’a percuté et nous sommes tombés. C’est une collision», a déclaré Mamadou Niang pour assurer sa défense. D’après lui, il n’est pas sorti indemne de cette collision. D’ailleurs, c’est ce qui explique la présence de certificats médicaux des prévenus dans le dossier.
La députée de Bby a aussi accusé les députés de Yaw de menaces de mort lors du vote du budget du ministère de l’Intérieur. A ce propos, Massata Samb et Mamadou Niang ont aussi nié les faits en soutenant que c’est plutôt une volonté exprimée par leur groupe parlementaire. «Nous ne l’avons jamais menacée de mort. Au contraire, c’est elle qui nous menaçait. A chaque fois qu’elle discute avec quelqu’un, elle lui lance un défi de venir en découdre avec elle dehors. Elle l’a fait à Bara Doli», a dénoncé Massata Samb, qui dit n’avoir jamais eu l’intention de la frapper. «Si je voulais la frapper, j’allais utiliser un coup de poing», a-t-il souligné. C’est la même chanson entonnée par Mamadou Niang.
«Il ne l’a pas frappée. Il l’a ratée. C’est quand je l’ai vu brandir la chaise que je suis venu à sa rencontre. Nous nous sommes heurtés et nous sommes tombés parce qu’elle était venue avec allure. Mon pied l’a touchée. Mais je n’avais pas l’intention de la frapper. Pour moi c’est une collision. J’ai soulevé mon pied par réflexe. Elle s’est heurtée à mon pied», a détaillé Niang.
Des arguments de défense qui ont amené la représentante du ministère public à vouloir comprendre ce qui a motivé la descente de Massata Samb du pupitre pour se ruer vers la partie civile absente à l’audience. «C’est parce qu’elle a tenu des propos discourtois à l’endroit de mon guide spirituel, qui m’a indiqué le droit chemin», a répondu Samb sous les applaudissements nourris des talibés mouchtarchidines, venus nombreux assister à l’audience.
Les témoignages des députés, Abass Fall et M. Dione, corroborent les dires de leurs collègues à la barre. «J’étais témoin de tout ce qui s’est passé. Le Pv dressé par le président n’a rien à voir avec ce qui s’est passé à l’Assemblée. Ce qui s’est passé, Massata a demandé à ce que le Règlement intérieur soit appliqué, parce qu’il y a une députée qui a injurié une autorité religieuse. C’est ainsi qu’elle a dit : «Ma tey.» Il est allé ensuite arracher son foulard. C’est comme ça que ça s’est passé. Il ne lui a pas porté de coups. Notre collègue n’a jamais cité le nom de la dame», a-t-il précisé, tout en soulignant qu’il ne connaît pas les intentions de Massata quand il se ruait sur Awa Ndiaye.
En ce qui concerne Mamadou Niang, il témoigne : «Je n’ai pas vu de coup de pied. Ce que j’ai vu, ce sont les mains levées pour intercepter la chaise qu’avait portée la dame. J’ai vu que la dame est tombée. Mais tous les deux nous sommes tombés.»
Amy Ndiaye réclame 500 millions aux 2 députés
Tel n’est pas l’avis des avocats de la partie civile. Selon eux, Massata a porté un coup à la dame à la tempe. Et les prévenus ont aussi proféré des menaces à son endroit en allant jusqu’à lui interdire l’accès à l’Assemblée nationale. La partie civile soutient que leur cliente s’est retrouvée avec un trouble abdominal et un risque d’avortement. Ces avocats ont réclamé la somme de 500 millions de francs en guise de réparation parce qu’au-delà de la mère, c’est la santé de l’enfant qui est menacée.
De l’avis du Parquet, il ne peut y avoir une excuse de provocation et que le sursis ne peut être accordé dans ce cas d’espèce. Estimant que les faits sont constants, il a requis 2 ans de prison ferme. Pour la représentante du ministère public, ce n’est pas au sein de l’Assemblée qu’on doit maltraiter la femme.
Pour la défense, il y a bien excuse de provocation, en ce sens que le député, qui se dit victime de violences, a tenu ses propos pour jeter l’anathème sur le guide religieux de ses collègues. Estimant que l’élément matériel fait défaut, Mes Abdou Nar Ndiaye et Adama Fall ont plaidé la relaxe à titre principal et, à titre subsidiaire, de faire bénéficier le doute à leurs clients en leur accordant des circonstances atténuantes. Car, il y va de la stabilité du pays. Auparavant, la défense avais soulevé une exception de nullité relative à l’immunité parlementaire de ses clients,qui a été jointe au fond après un débat controversé.
Les députés seront édifiés sur leur sort le 26 décembre.