RAMADAN ET CONFÉRENCES : Argent, exhibition et tentation

En plus d’être une traite pour les Oustaz et les organisatrices, les conférences, pendant le ramadan, sont aussi des moments de m’as-tu-vu et de provocations.

Le  ramadan,  au Sénégal, est une période particulière. Durant ces semaines de jeûne, les musulmans essayent, tant bien que mal, de se conformer aux recommandations divines. C’est en ce sens qu’ils n’hésitent pas, d’ailleurs, à s’attacher les services des prêcheurs et autres conférenciers pour des événements religieux.

Ces derniers, qui ont des agendas surchargés, du fait des nombreuses sollicitations, en  tirent donc profit. Se pose alors la question de savoir si l’islam leur permet de monnayer leurs services, comme c’est le cas actuellement.

Pour Oustaz Cheikh Tidiane Bitèye du groupe Excaf Télécom, il est impensable d’exiger un paiement après une conférence. ‘’Ma conscience ne me permet pas de demander de l’argent. Je me dis que cela fait partie de mon travail. J’ai opté pour ça’’, fait-il savoir.

Seulement, Oustaz Bitèye privilégie d’abord ses activités personnelles. C’est pourquoi, avant de donner son accord, il vérifie toujours son emploi du temps.

Ibrahima Badiane dit ‘’Iran Ndao’’ de la Sen Tv, n’est pas loin de l’avis de son collègue d’Excaf. Pour lui, il n’est pas question de demander de l’argent pour les services rendus au nom de l’islam. Iran Ndao pense, par contre, que les organisateurs doivent prévoir une belle somme pour les prêcheurs, car, dit-il, ces derniers doivent aussi profiter des grâces du mois de ramadan.

‘’L’idéal serait de le faire gratuitement. Moi, je ne demande rien. Les initiateurs de ces rencontres devraient savoir cependant que nous avons des responsabilités. Ils ne doivent pas attendre qu’on leur demande de payer pour le faire. A la place d’un cachet, on peut prévoir une somme pour le ‘ndogou’  du conférencier’’, nuance le prêcheur.

Son collègue de la Rts2 pense, pour sa part, qu’il faut faire la  différence entre les organisateurs. Pour lui, certains ont des visés autres que religieux, ils essayent de s’enrichir sur le dos des prêcheurs. A ces derniers, Oustaz Bathie Samb estime qu’il est normal de leur réclamer de l’argent.

‘’Certains organisateurs distribuent des cartes de soutien et se font parrainer par toutes les autorités de ce pays, dans le but de se faire beaucoup d’argent. Alors, pourquoi le conférencier n’a pas le droit de réclamer sa part ?’’, s’interroge Oustaz Samb.

Imam Amadou Makhtar Kanté ne pense pas autrement. Pour lui, les imams ont des compétences qu’ils doivent faire valoir. ‘’Ceux qui se posent la question n’ont qu’à se l’appliquer pour voir s’ils sont prêts à des prestations gratuites’’.

Aux yeux d’Oustaz Samb, nul ne peut rémunérer un conférencier à la hauteur de son travail. Il précise ainsi qu’il ne demande rien, mais n’hésite pas à prendre ce qu’on lui propose.

Récurrence des harcèlements 

Au Sénégal, les conférences sont le plus souvent initiées par des femmes. Ces dernières ne se conforment pas toujours aux recommandations de l’islam, sur le plan vestimentaire. En d’autres termes, elles se couvrent à peine la tête et laissent entrevoir leur coiffure. D’autres ont même des teints clairs ou ridés, résultat de la dépigmentation. Quel  est alors le discours des conférenciers face à de telles attitudes ?

Iran Ndao pense qu’il faut d’abord être libre pour avoir le courage de mettre le doigt dans la plaie. ‘’Quelqu’un à qui on paie ne peut pas faire la leçon aux organisatrices sur leur accoutrement. S’il n’y a pas de contrepartie, par contre, c’est possible de tenter de les remettre sur les rails’’, explique Iran. Ce dernier affirme qu’il lui arrive, à travers ses prêches, d’inviter des femmes  à revoir leurs comportements.

Sur cette question, Oustaz Samb pense qu’il revient aux conférenciers de faire entendre raison à ces femmes, sans tenir compte de l’aspect pécuniaire qu’ils en tirent.  ‘’Les conférences ne riment pas avec des cheveux naturels  ou autres extensions. Cela n’a rien à voir avec la religion. Elles donnent l’impression d’aller à des soirées dansantes’’, regrette le prêcheur de la Rts2.

Par ailleurs, les harcèlements sont également au menu des relations entre prêcheurs et femmes organisatrices de conférences. Ces dernières sont souvent admiratives devant l’éloquence et l’élégance des prêcheurs. Bonjour les tentations.

‘’Les harcèlements ne manquent pas dans le milieu, mais  il faut faire la part des choses entre celles qui sont séduites par nos prêches et celles qui ont d’autres visées. Personnellement, je suis au quotidien confronté à ces situations d’harcèlement’’, confesse Oustaz Bathie Samb.  Celui-ci recommande à ses collègues  de rester fermes afin de   dissuader certaines femmes et éviter d’être abordés par n’importe qui.

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