La polémique concernant l’interdiction du port de voile par l’Institution Sainte Jeanne d’arc continue d’enfler. Entre ceux qui soutiennent que les élèves doivent se conformer au règlement intérieur de l’école qu’ils ont paraphé et ceux qui maintiennent mordicus que l’école doit respecter la liberté de culte des élèves voilées, le fossé ne cesse de s’élargir.
Le Khalife général des Tidianes, Serigne Mbaye Sy Mansour, qui s’est prononcé sur la question, a dénoncé l’interdiction du port du voile au sein de l’Institution sainte Jeanne d’arc de Dakar, non sans appeler les autorités, notamment les députés, à faire valoir leur rôle de représentants du Peuple en exigeant à cette institution de respecter la laïcité ou qu’elle ferme ses portes au Sénégal. Avant lui, d’autres imams et prêcheurs comme Oustaz Aliou Sall, Serigne Modou Bousso Dieng, avaient eux aussi donné leur avis sur cette question, mais c’était pour dire que les parents qui n’étaient pas d’accord avec la décision de l’école, n’avaient qu’à les transférer dans des établissements où le voile est admis. Pour d’autres l’Isja s’est engagée par la loi (n°98-562, décret fixant les conditions d’ouverture et de contrôle des établissements privés) à se conformer strictement à la réglementation officielle sur les établissements privés. «Nous avons plus de 1700 élèves. Nous devons leur assurer la scolarité. Ils respectent ce règlement en très grande majorité. Et nous comptons poursuivre avec tous ces élèves qui acceptent ce règlement», réplique la proviseure de Jeanne d’arc.
Finalement, c’est comme si l’on assistait à un dialogue de sourds, et chaque camp campe sur sa position, dans ses convictions. Aujourd’hui, il faut que l’État s’investisse pour trouver une issue heureuse à ce problème, afin que le voile ne finisse par dévoiler des rancœurs. Il faudrait surtout éviter de transformer ce problème, qui du reste, est plus une affaire de droit que de religion. Le Sénégal est réputé être un pays de tolérance, pour ne pas dire d’exception. Toutes les ethnies, les religions et les sensibilités politiques y ont toujours vécu avec intelligence dans une harmonie parfaite. D’ailleurs combien de fois le Sénégal a-t-il été choisi comme médiateur dans des pays en proie à des guerres ethniques ou religieuses ? Donc aujourd’hui, ce qu’il faudrait, c’est que ce problème soit géré avec la raison et non avec la passion. Parce qu’à entendre certaines réactions, surtout à travers les réseaux sociaux, il faut faire en sorte que la sérénité prévale.
Ce qui est surtout à déplorer dans cette situation, c’est le manque de réaction du pouvoir, qui pourtant, avait toute la latitude pour gérer ce problème en amont. Pourquoi avoir attendu que les choses commencent à prendre une tournure dangereuse pour réagir alors que les autorités de Jeanne d’arc avaient annoncé la couleur depuis la fermeture des classes ? Donc l’État avait largement le temps de profiter des vacances pour engager le dialogue et trouver une solution heureuse à cette situation.
D’ailleurs, comment en est-on arrivé là ? Pourquoi l’école qui a toujours toléré le voile s’est subitement érigée contre ? Quel a été le comportement de ces élèves voilées dans l’enceinte de l’établissement ? Que dit la loi sur cette question ? Comment en est-t-on arrivé là ? Voilà des questions auxquelles il faut donner des réponses concrètes et pour lesquelles il faudrait un consensus qui ne frustrera aucun des deux camps. Parce que ce problème est d’une extrême sensibilité et les autorités à qui l’on a confié la gestion de ce pays doivent prendre leurs responsabilités en trouvant la bonne formule capable d’aplanir ce différend qui est en train de polluer petit à petit l’atmosphère.