Une source de Seneweb, consultante dans le domaine de l’accompagnement des réfugiés en temps de guerre, accuse le ministre des Affaires étrangères d’être responsable de la situation dangereuse que vivent les Sénégalais en Ukraine. Selon elle, saisi par mail depuis le 15 février, le ministère a ignoré les alertes alors qu’il aurait pu organiser le rapatriement des Sénégalais bloqués à Kiev.
Bloqués et livrés à eux-mêmes en Ukraine, théâtre d’une opération militaire russe, les ressortissants sénégalais multiplient les appels à l’aide aux autorités pour les sortir de ce carnage au bilan déjà assez lourd. Si certains d’entre eux ont pu regagner la frontière Polonaise (fermée pour le moment), d’autres retiennent leur souffle sous les rafales à Kiev ou Kharkov. Une situation qui aurait pu être évitée si les autorités sénégalaises notamment le ministère des Affaires étrangères avait fait preuve d’anticipation en organisant le rapatriement de ses ressortissants avant l’éclatement ou dès les premières heures de cette guerre. C’est du moins, l’avis d’une consultante dans le domaine de l’accompagnement des réfugiés en temps de guerre.
Cette source de Seneweb bien au fait de l’inquiétude que vivent des Sénégalais à Kiev, pointe l’index accusateur au ministère sénégalais des Affaires étrangères qu’elle a elle-même alerté dès le 15 février dernier. « Les Sénégalais sont dans une situation très dangereuse et très désastreuse. Certains Sénégalais sont encore bloqués dans la capitale à Kiev et dans d’autres villes. Ils ne peuvent plus sortir pour regagner la frontière polonaise parce que c’est très dangereux. Donc ils sont enfermés chez eux dans la peur. D’autres Sénégalais ont pris la route très tôt pour aller à la frontière polonaise, certains ont réussi à entrer, d’autres sont avec des centaines d’Africains entassés dans le froid en plein hiver, il fait 3° et la Pologne refuse de les laisser entrer », renseigne cette consultante qui travaille dans le domaine humanitaire depuis 2008.
A l’en croire, aux premières heures de la guerre, il était possible pour le Sénégal d’organiser un rapatriement, mais « aujourd’hui il est impossible pour le Sénégal d’aller chercher nos compatriotes sénégalais à l’intérieur de l’Ukraine et de les amener en toute sécurité au Sénégal ». « Tout ça aurait pu être évité car nous avons tout fait pour joindre le ministère des Affaires étrangères du Sénégal depuis le 15 février pour pouvoir rapatrier, dès les premières heures de conflit, les Sénégalais présents », martèle-t-elle en pointant « le manque de professionnalisme » des autorités.
« Si le ministère avait répondu à mon mail… »
« Le 15 février j’ai appelé sur le téléphone fixe du ministère des Affaires étrangères du Sénégal, il n’y a pas eu de réponse. J’ai envoyé un mail à l’adresse e-mail présent sur le site du ministère des Affaires étrangères du Sénégal, le mail a été ouvert parce que j’ai reçu l’accusé de réception comme quoi il a été bel et bien été ouvert et lu et personne n’a répondu », souligne notre source.
Dans ce mail-là, poursuit-elle, « je demandais s’il y avait un Consulat ou une ambassade du Sénégal à Kiev en Ukraine. J’ai expliqué qu’il y a un conflit armé qui se prépare et que ça peut être dangereux et que je suis en train de moi-même organiser des évacuations pour d’autres nationalités européenne et je voudrais y inscrire les Sénégalais présent là-bas, comme ça, dès que la guerre commence, dans les premières heures avant même les fermeture des aéroports ou des routes on peut les exfiltrés les Sénégalais avec tous les autres ».
Jusqu’ici, son mail est resté lettre morte. Elle n’a reçu « aucune réponse ». « Ce qui me blesse c’est de voir les Sénégalais qui sont présents là-bas livrés à eux-mêmes, alors qu’on aurait pu les sortir de là si le ministère des Affaires étrangères avait répondu à notre demande d’information. Cela prend quelques minutes pour répondre à un mail », s’étrangle-t-elle.
« Il y a énormément de personnes bloquées à la frontière, la Pologne refuse de faire entrer certains d’entre eux »
« Nous sommes obligés de leur donner des gestes de survie à ces Sénégalais, de leur donner des protocoles à suivre parce qu’ils marchent en plein jour sous les bombardements et on est tout le temps en contact avec eux. Et c’est choquant parce que nous nous avons l’habitude d’aller dans les pays en guerre mais uniquement parce que c’est notre travail, les Sénégalais ne savent pas ce que c’est que la guerre et le fait qu’ils le vivent aujourd’hui juste parce que des gens ne font pas leur travail correctement, nous désole et nous révolte », fulmine-t-elle dans une colère noire.
A l’en croire, contrairement au Sénégal qui a sciemment ignoré ses alertes, d’autres pays « nous ont donné les listes de leurs ressortissants pour prévoir leur exfiltration dès le 14 février ». Après avoir loupé le coche, elle espère des autorités sénégalaises des mesures fortes pour permettre aux sénégalais bloqués à la frontière polonaise d’entrer. « Je souhaite sincèrement que les attachés consulaires présents en Pologne auront le courage et la poigne de se présenter à la frontière polonaise et d’exiger de voir et de récupérer les étudiants sénégalais présents là-bas. Parce que il y a énormément de personnes bloquées à la frontière, la Pologne refuse de faire entrer certains d’entre eux », suggère-t-il.
En attendant une réaction rapide des autorités, les Sénégalais de Kiev, Kharkov et des autres villes de l’Ukraine, retiennent le souffle. Chaque minute est importante pour eux.