[Tribune] Le Sénégal entre la dynamique des souverainetés, les exigences d’emploi de la jeunesse et les rigueurs de la coopération internationale

Moins de 90 jours nous séparent maintenant de l’an 1 du nouveau pouvoir installé au Sénégal le 1er avril 2024. Trois mois, c’est toujours symbolique pour un décompte !  C’est d’ailleurs le même délai que le gouvernement a accordé aux motos Jakarta, transporteurs informels, pour régulariser leurs plaques d’immatriculation.

Le « PROJET » , maintenant devenu «REFERENTIEL VISION SENEGAL 2050 » pour transformer le pays, avait mobilisé la jeunesse du pays. Et même une bonne frange des adultes. Si bien que la victoire du candidat Bassirou Diomaye FAYE fut incontestable : 54% dès le premier tour de l’élection présidentielle du 24 mars 2024.

Dès son installation le 1er avril , Son Excellence Monsieur le Président de la République n’a pas perdu de temps pour affirmerles ruptures systémiques à opérer. Sur tous les plans, la souveraineté est clamée. Politique d’abord, économique ensuite, et sociale enfin. Depuis cette date, le Président bénéficie d’une grâce et de l’adhésion sans faille de ses concitoyens. La dernière élection législative anticipée du 17 novembre lui a donné une majorité confortable de 130 députés sur un total de 165 députés à l’Assemblée Nationale, soit plus des 3/5ième nécessaires pour voter les lois constitutionnelles. En principe, maintenant il n’a plus aucun d’obstacle politique pour engager les réformes et les ruptures promises. Souveraineté, patriotisme économique, gouvernance transparente, liberté et justice, développement et solidarités. Tout est urgence. Et le peuple souverain attend !

Seulement voilà, les emplois promis sont encore attendus par la jeunesse. Les chiffres qui viennent d’être publiés par l’ANSD font froid au dos : le taux de chômage élargi a atteint 20,3 % pour le troisième trimestre de l’année 2024, soit une légère hausse de 0,8 % par rapport au taux de 19,5 % observé à la même période en 2023.

Le redémarrage des entreprises naguère en difficulté semble traîner encore. Le Secteur Privé National reste étouffé par les charges alors que les recettes sont toujours rares. Il est impératif de relancer la machine économique, seul gage de stabilité sociale.  » Il faut travailler, encore travailler, toujours travailler  » disait un ancien Président. C’est vraiment aujourd’hui que le nouveau Président doit s’approprier ceslogan et mettre la jeunesse rapidement au boulot, les chantiers sont nombreux. A ce jour, les pères de famille ne savent plus où donner la tête tellement les besoins sont nombreux et pressants. Le Premier Ministre et le gouvernement se doivent de se hâter les pas. Les jeunessont restés sans revenus et les femmes qui vont au marché commencent à dire « c’est trop lent ». Ventre creux n’a point d’oreilles. Depuis quelques semaines, les réseaux sociaux sont inondés de messages d’inquiétude à l’endroit des autorités. Les jeunes coursiers équipés de motocycles à deux roues, communément appelés « jakartaman » annoncent une grève suite à une décision du gouvernement. Un signal fort à décrypter. C’est dire que les populations attendent impatiemment que les nouveaux gouvernants réagissent et prennent la mesure exacte de l’urgence de leurs préoccupations.

Le Président de la République, lui, a fortement pressé le pas entre novembre et décembre. Une nouvelle Assemblée Nationale est installée en procédure d’urgence, la Loi de Finance est adoptée et votée sans débat, le Premier Ministre a fait sa Déclaration de Politique Générale, trois jours avant la fin de l’année 2024. Ils se savent très attendus pour le premier anniversaire de leur arrivée au pouvoir, ce sera le 24 mars 2025. Un bilan d’étape sera forcément fait sur l’état des promesses tenues au cours de ces trois dernières années de lutte, de mars 2021 à mars 2024.

Il est cependant vrai que beaucoup de sujets politiques ont été traités au cours des neuf derniers mois de 2024. Deux institutions supposées budgétivores, le CESE et le HCCT, ont été supprimées. Les jeunes s’attendaient à ce que les ressources financières ainsi économisées soient réorientées dans un programme de création d’emplois massifs pour commencer à éradiquer le chômage endémique et l’immigration clandestine. Les programmes de la DER et les institutions comme l’ANPEJ, l’ADEPME et le FONGIP doivent opérer leur mue pour se mettre au niveau des attentes et des urgences de la jeunesse et des entrepreneurs. A défaut de les fédérer en une seule entité, l’Etat doit trouver une formule qui permet de mieux coordonner leurs actions.

L’Assemblée Nationale a fini d’installer les membres de son bureau. Pour première la fois, nous avons assisté à l’usage du vote électronique au Parlement. Rapide et efficace. C’est une avancée technologique qu’il faut saluer et étendre à toutes les institutions. Ellepeut éviter au Conseil Constitutionnel et au Ministère d’Intérieur les multiples contestations de parrainage et nous faire avancer vers le bulletin unique digital pour les autres élections à venir, économisant au passage les dizaines milliards dépensés à la simple impression de bulletins de vote pour une flopée de candidats.

L’Assemblée a aussi abrogé la dernière Loi d’amnistie et mis en place et la Haute Cour de Justice malgré la résistance de l’opposition impuissante qui crie par anticipation à la justice des vainqueurs. Le gouvernement insiste sur la transparence dans la gestion des deniers publiques et la distribution équitable du droit.

Seulement quelques jours après, le Chef de l’Etat SEM. Bassirou Diomaye FAYE, dans son discours à la Nation du 31 décembre 2024, a réitéré sa farouche volonté à combattre la corruption et l’enrichissement illicite par la généralisation de la déclaration de patrimoine à tous les agents de l’Etat, sans exception.

Le Président de la République a aussi annoncé le départ des bases militaires françaises du Sénégal. Une autre ère de souveraineté commence pour nos Forces de Défense et de Sécurité. Toutes les ressources et compétences nationales seront nécessaires pour tenir le flambeau. Nul doute de la qualité et du professionnalisme de notre vaillant personnel militaire qui est loué partout en Afrique et dans le monde. Nos jeunes militaires, bien encadrés par leurs anciens, ont toujours été au premier plan dans les missions de maintien de paix en Afrique. La France et Macron s’arrachent les cheveux faces aux nouveaux dirigeants africains pendant que les Etats-Unis réinstallent Trump à la Maison Blanche le 20 janvier prochain, dans moins d’une semaine. La Russie, elle, gagne du terrain dans la coopération militaire en Afrique tandis que la Turquie mène une diplomatie économique soutenue qui cherche à placer ses entreprises multinationales dans tous les marchés d’infrastructures et de fournitures d’équipements. Ces dernières années, les relations internationales sont arrosées à la sauce militaire et économique. Maintenant, les nouveaux dirigeants africains clament patriotisme et coopération win-win.

Le Sénégal, petit pays et grande Nation, c’est la force de notre diplomatie depuis les indépendances. Le Président    S.E.M. Bassirou Diomaye Faye, nouvellement intégré sur la scène internationale, est déjà sollicité sur tous les fronts entre l’UEMOA, la CEDEAO et l’ONU. De même pour les Forums économiques dans les Pays Arabes (Dubai, Arabie Saoudite, Qatar). Il est désigné médiateur de la CEDEAO pour parler à l’Alliance des Etats du Sahel (AES) constituéepar le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Même si ces trois paysdécident de ne pas revenir sur leur décision de quitter la CEDEAO, le Président S.E.M. Bassirou Diomaye FAYE est chargé d’amorcer les axes de coopération entre l’AES et l’organisation sous régionale avec les 12 pays restants dans sa composition. D’autre part, nos voisins immédiats que sont la Gambie, la Guinée Conakry et la Mauritanie ont été visités dès les premières heures de son magistère. A sa suite, le Premier Ministre Ousmane SONKO, quant à lui, a séjourné pendant deux jours à Banjul pour réunir, les 19 et 20 décembre 2024, la commission mixte Sénégal-Gambie qui était restée en veilleuse depuis 2011. Le Forum des Investissements qui s’est tenu en marge de cette rencontre a pu recarder les axes de coopération économique bilatérale entre les deux pays voisins et élargir les opportunités de partenariat entre entreprises sénégalaises et gambiennes. Ce travail immatériel pèsera à coup sûr sur le futur bilan.

Autre annonce forte du 31 décembre, le Président de la République a décidé de mettre en scelle les meilleures compétences nationales dans les recrutements au sein de l’administration. Le recours à la plateforme numérique « Ligeeyal sa reew » qui se traduit par « travailler pour ton pays » offrira à tous et à toutes les mêmes chances d’intégrer les services publics dans le strict respect de la réglementation en matière de recrutement dans la fonction publique. La digitalisation des procédures administratives apportera, à coup sûr, plus d’efficience et de transparence dans le traitement des dossiers. Les données étatiques sont ainsi archivées au fur et à mesure pour constituer une base fiable pour l’administration, sauvegardée dans le Datacenter National. La souveraineté numérique de notre Etat ne peut alors que se renforcer à travers des CV professionnels dépourvus de toute avarie et de fraude puisque bien vérifiés avant leur validation finale. Le Secteur Privé National pourra même puiser dans cette base de données qui peut être rendue accessible aux entreprises pourvoyeuses de stages d’étudiant et d’emplois à la jeunesse.

L’intelligence artificielle est aux portes de nos Universités. L’Etat peut bénéficier du travail énorme abattu par nos chercheurs dans tous les domaines. Les thèses des étudiants ne doivent plus dormir dans les archives des facultés. L’éducation et la santé, les deux moteurs du capital humain, peuvent rapidement changer de visage grâce à la triple intégration de la recherche, de l’innovation et des dernières technologies digitales. Un esprit sain dans un corps sain. Le sport et la culture sont d’autres facteurs qui viennent renforcer le bien-être et l’ascension sociale. Un ancien footballeur et un ancien acteur de cinéma avaient été élus Président dans d’autres pays.

La réflexion sur l’emploi des jeunes se doit d’intégrer les acteurs culturels et les sportifs. Les associations sportives et culturelles (ASC) constituent des organes de proximité capables de mobiliser les jeunes et de les ramener vers des activités de l’agriculture et de l’industrie de transformation. Produire ce que nous consommons, c’est la première souveraineté qu’il faut assurer. La communication sur les réseaux sociaux peut être orientée vers ce genre de mobilisation, la popularité du Premier Ministre auprès de la jeunesse est un atout pour l’Etat. Le gouvernement doit présenter une offre claire et sérieuse pour toutes les couches sociales, secteur par secteur. La plateforme d’offre d’emplois « Ligeeyal sa reew » doit être intuitive et simple d’accès. Elle doit intégrer l’enrôlement par reconnaissance vocale et les langues nationales pour les illettrés de la langue française.

Ainsi, les compétences nationales regroupées au Sénégal et dans la Diaspora se verront donner une opportunité de participer à la transformation économique du pays. Développer les entreprises nationales est le meilleur moyen de créer des emplois pour la jeunesse. Notre souveraineté alimentaire est chantée par le Ministre de l’Agriculture mais nos paysans sont inquiets. Les éleveurs attendent l’application des premières mesures de correction avant de se retrouver dans l’urgence à quelques mois de la prochaine Tabaski. Gouverner, c’est prévoir. Dès le début de l’année, il faut mettre en branle toutes les mesures qui assurent la disponibilité d’un cheptel de qualité en nombre suffisant pour nos vaillantes populations. Les prix des moutons vont dépendre de tous ces facteurs d’anticipation. La bourse des ménages est déjà faible, Le gouvernement doit penser à alléger les charges au maximum. C’est aussi un point de souveraineté, la dignité d’un père de famille face à ses enfants.

Depuis le 31 décembre 2024, le Sénégal et la Mauritanie ont commencé à exploiter du gaz offshore sur le champ de Grand Tortue Ahmeyim (GTA), situé à leur frontière maritime. Le pétrole est aussi attendu avec impatience pour booster la souveraineté économique. Le Premier Ministre Ousmane SONKO, dans sa Déclaration de Politique Générale, a beaucoup insisté sur la transformation de nos ressources naturelles. Ainsi, il invite notre Secteur Privé National à jouer pleinement sa partition sur l’Agenda National de Transformation, Vision 2050. Nos entrepreneurs doivent constituer le fer de lance de l’Etat dans les projets structurants à forte intensité de main d’œuvre. Ils pourront faire appel, au besoin, à leurs partenaires extérieurs en intégrant des formations continues pour leur personnel avec un transfert de compétence dans une transparence absolue. Les bailleurs de fonds étrangers trouveront alors en terre sénégalaise un climat des affaires bien assaini et une stabilité politique qui leur garantit une sécurité juridique pour leurs investissements.

Le Sénégal est une démocratie majeure qui a vécu successivement trois alternances avec des Présidents qui se sont passés le pouvoir dans la forme la plus républicaine de l’Etat. Malgré un contexte mondial marqué par des conflits et une situation géopolitique tendue dans le voisinage, le peuple sénégalais a plusieurs fois démontré sa grandeur et son attachement à la paix et à la démocratie, gage d’un développement équilibré, juste et solidaire.

Au-delà du Sénégal, la jeunesse africaine est maintenant très exigeante vis à vis de ses gouvernants. Les jeunes populations exigent plus de liberté, plus de justice et plus de transparence. Elles sont prêtes à se former à tous les métiers et à mettre la main à la patte pour travailler dur au développement de leurs territoires. Les jeunes et les femmes constituent une force ouvrière prête à se lever aux premières heures à l’assaut du travail. Nos gouvernants doivent les aider à développer leurs talents en améliorant les conditions d’accès aux financements de leurs projets. Faciliter leur insertion à l’emploi est le meilleur moyen de mettre tout le monde au travail. La formation professionnelle des jeunes et l’alphabétisation des femmes rurales peuvent contribuer à constituer des équipes prêtes à l’emploi. La communication proactive doit être le module d’accompagnement de tous les projets de l’Etat pour obtenir les résultats positifs escomptés. Les réseaux sociaux sont un formidable médium pour la sensibilisation. Cependant, l’Etat doit veiller à l’équité numérique en améliorant considérablement la couverture internet à l’échelle nationale. Les téléphones portables sont devenus les meilleurs compagnons des populations, jeunes comme adultes de tout âge, instruits comme illettrés. Parallèlement, les applications mobile-money ont amélioré l’inclusion financière jusque dans les zones les plus reculées, naguère inaccessibles par les réseaux bancaires classiques. Le Digital Payment (QR-Code) est devenu est une réalité même au marché des poissons et légumes.

De même, les institutions de sécurité sociale comme l’IPRES et la CSS qui sont assis sur un matelas financier incontestable doivent contribuer plus au bien-être des retraités qui méritent une assistance de proximité après des années de bons et loyaux services tout au long de leur carrière. La Caisse de Dépôt et de Consignation (CDC) quant à elle, à l’instar de ce qui se fait dans les pays développés, doit reprendre plus de prérogatives et récupérer systématiquement toutes les cautions et déposits des consommateurs et clients usagers de services locatifs à travers une plateforme de paiement électronique liée au Trésor, afin d’améliorer sa position financière et assister l’Etat dans ses programmes d’investissement d’une part, et les entreprises nationales qui gagnent des marchés à l’étranger d’autre part. Elle peut expérimenter le crédit export (CE) pour accompagner en cautionnement les entrepreneurs sénégalais qui travaillent à l’extérieur et qui rapatrient une bonne partie de leurs bénéfices. Le Secteur Privé National dispose d’une expertise très appréciée en Afrique et à l’International. Nos entreprises sont capables de compétir dans plusieurs marchés internationaux. Le Président de la République et le Premier Ministre doivent être les deux premiers VRP du Sénégal. En effet, lors de leurs déplacements à l’étranger, ils peuvent se faire accompagner par de vrais entrepreneurs innovants afin de les positionner et de mieux appuyer leurs offres. C’est comme ça que font tous les Présidents des pays développés quand ils viennent à Dakar. En relation avec la Diaspora sénégalaise, ce pont d’experts entre le Sénégal et l’International peut générer des retombées multiples pour la Nation et sa balance commerciale.

Un dernier point sur les identités : le débat sur la nationalité s’est invité à nouveau à l’Assemblée Nationale. Dans sa Déclaration de Politique Générale, le Premier Ministre a réaffirmé la position claire de notre pays. Le Sénégal est un pays souverain et ouvert vers le monde. Notre peuple accueillera toujours avec la même ferveur tout visiteur étranger mais le gouvernement appliquera la Loi sans faiblesse sur les conditions de séjour dans le pays. Les cartes d’identité, les passeports, les visas et les cartes de séjour seront soumis au contrôle numérique à tous les niveaux car c’est un point de sécurité pour le bien de la Nation et du visiteur lui-même.

 

Par Tidiane WANEExpert Digital ID & Secure Payment, CEO de SATEQ DIGITAL GROUP.