Une démocratie aux abois – Le cas Khalifa Sall

Par Chouaib COULIBALY

 

Pour celui qui avait inscrit sa magistrature sous le sceau de la rupture, nous assistons plutôt à une dictature  à travers une instrumentalisation de la justice, notamment,  permettant au Président Sall l’élimination d’adversaires politiques « encombrants » avant l’élection de février 2019.

L’affaire Khalifa  Ababacar Sall, Député-Maire de Dakar, à elle seule peut l’illustrer à suffisance.

La cour d’appel de Dakar  vient de le  condamner  à cinq ans de prison ferme, assortie d’une amende de 5 millions de francs CFA sur le dossier de la « caisse d’avance », confirmant ainsi la première instance.

Cette nouvelle, aussi brutale qu’elle puisse paraitre n’est pas pour autant surprenante. Le pouvoi en cassation n’y fera rien. Cette condamnation  sera confirmée, sur injonction du Président de la République Macky Sall! On n’a pas besoin d’être devin pour prédire l’issue de ce procès.

Macky Sall ne veut pas affronter le candidat  Khalifa Sall,  à la   prochaine élection présidentielle.

La  farce judiciaire, sur l’affaire Khalifa Sall, qui a tenu en haleine tout le pays pendant des années nous permet de nous arrêter sur les innombrables dérives du «  système Macky ». Hélas,  sa marque déposée  en matière des droits de l’homme, ne fait la fierté d’aucun sénégalais. Le Président de la République agit  en despote dans la sphère judicaire, en l’occurrence, alors qu’une séparation des pouvoirs devrait être la norme.

.

Une   confusion totale et flagrante entre l’exécutif et le  législatif,  piliers essentiels  de toute démocratie, est le signe distinctif du régime de Macky Sall. Les sénégalais sont de plus en plus convaincus que c’est lui-même qui est au début et à la fin de toute action judiciaire dans notre pays .Quand il actionne son procureur de la république, instruit ses juges, il obtient le verdict souhaité. Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’aucun sénégalais  n’est  à l’abri d’une poursuite ou d’un emprisonnement requis  par le Prince. Cette instrumentalisation de la justice rend difficile et même risquée une opposition politique qui est pourtant  le poumon d’une quelconque démocratie.

C’est à ce niveau qu’il faut  saluer le courage politique de Khalifa Ababacar Sall qui pouvait chercher une sinécure  comme Tanor Dieng et Moustapha Niasse, pour ne citer que ces dinosaures, sans fois politiques.

Avec la complicité de magistrats véreux, Macky Sall  a envahi le champ de la justice pour décider du dénouement de tout procès à ramification politique ou autres (inconnus du grand public).

 

En condamnant Khalifa Sall, le Président de la République à, en même temps, tuer le principe de la démocratie électorale. L’affaire du Maire de Dakar est qualifiée, à juste titre, de « politique ». Macky Sall n’a pas actionné  sa justice pour  « mettre de l’ordre » dans la gestion des caisses d’avance dont il a lui-même bénéficié. Mon leader Idrissa Seck a raison : Macky Sall devrait être convoqué par le juge du moment qu’il y  a touché.

La vérité est qu’il  a voulu en découdre avec celui qui a osé lui opposer un « non » pour une  collaboration à  l’élection présidentielle de 2019.

Khalifa Ababacar Sall est Député-Maire, un citoyen  éligible pour briguer le suffrage des sénégalais à l’élection présidentielle.

Nul n’a le droit de le priver de ces prérogatives, à travers  des calculs, mensonges et acrobaties judiciaires et juridiques. C’est ignoble, lâche et  malsain !

 

 

Ni  l’âge, la nationalité, la résidence ou  le statut civique et politique ne peuvent limiter ce droit chez Khalifa Sall !

Dans sa volonté permanente  de « réduire l’opposition à sa plus simple expression », Macky sall signe, précipitamment un décret de révocation du Maire de Dakar, se fondant sur l’article 135 du code des collectivités locales qui dit « lorsque  le maire ou tout autre conseiller municipal est condamné pour crime sa révocation est de droit… ». La question devient alors celle-ci : Est-ce que Khalifa est condamné pour un crime ?   A-t-il commis un meurtre ? Quel crime  aurait- il commis pour mériter cette  révocation ?

D’autre part, quand l’article parle de « condamnation », il est évidemment qu’il sous-entend « une condamnation définitive » alors que ce n’est pas le cas pour  Khalifa Sall qui  se serait pourvu en cassation. En conséquence, le décret du Président de la République ne s’appuie certainement pas sur le droit   mais sur  sa propension et sa volonté  immédiates de  «  tuer et enterrer » au plus vite Khalifa Sall.

 

Dans les grandes démocraties où les  magistrats ne prennent pas leurs  mots d’ordre que chez le Président de la République, Khalifa Sall aurait humé l’air  de la liberté depuis longtemps. Tous les juristes sérieux s’accordent à dire que la détention du Maire de la capitale sénégalaise est politique.

En effet, sur la question,  la cour de la  CEDEAO a estimé que « le droit à l’assistance d’un conseil, le droit à la présomption d’innocence et le droit à un procès équitable des requérants ont été violés ». L’Etat du  Sénégal a donc été condamné pour violation des droits de l’Homme…

Ces magistrats ont,  au moins,  dit le droit et l’Etat sénégalais devrait plutôt  se conformer à cette décision.

Que nenni ! L’arrêt est complétement ignoré ! Au contraire, comme pour narguer cette cour, l’Etat a organisé une   mascarade d’audience en appel pour confirmer le premier jugement.

Quel est donc l’intérêt pour le Sénégal de faire partie d’une cour communautaire s’il ne respecte pas ses décisions ? Et pourtant le protocole de 1991 relatif à la Cour en son article 19(2) et le Traité révisé en son article 15 (4)  de la CEDEAO  précisent bien que les décisions rendues par la juridiction sont obligatoires. La Cour a rappelé à plusieurs reprises que les arrêts de violation des droits humains sont obligatoires pour les États condamnés qui sont tenus de les exécuter, et ce, à compter du jour de son prononcé (art 62 du règlement intérieur de la Cour) ». Où sont les juristes qui conseillent le Président Sall ?

De qui se moque le Président Macky Sall ? Il a été prompt à  respecter  la prescription de la CEDEAO sur « une juridiction spéciale ad hoc à caractère international » pour Hissene Habré.

Et Khalifa Sall ? Parce qu’il constituerait une menace politique pour vous M. Le Président ?

Ressaisissez –vous vous M. le Président.  C’est la honte !

 

Nous vivons un pays dangereux sous Macky Sall. Notre démocratie recule de jour en  jour et laisse une  place béante  à une dictature au grand  jour.

Tous les jours, le Président Macky Sall pose des actes qui corroborent ce recul démocratique : éliminer lâchement et sans fondements juridiques deux candidats à l’élection présidentielle  en 24 h, forcer une loi sur le parrainage pour filtrer et se choisir ses propres adversaires à l’élection  présentielle, répression répétée des étudiants ayant conduit à la mort de Fallou Sene, retenir plus de 400 000 cartes d’électeurs pour éviter des votes sanctions…..La liste est longue !

Khalifa Sall est votre prisonnier politique, il doit être libéré immédiatement !

Laissez  le compétir, de même que Karim Wade.

C’est une règle élémentaire de  la démocratie  !

Jacob Coulibaly

 

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here