“On continue, on ira jusqu’au bout”, a dit Evguéni Prigojine dans un message audio sur Telegram. “Nous détruirons tout ce qui sera mis sur notre route”, a-t-il ajouté.
Il a annoncé que ses forces, jusqu’à présent déployées en Ukraine, “ont passé (…) la frontière de l’Etat” russe et sont entrées dans Rostov, dans le sud du pays. Il n’a pas apporté de preuve de ces affirmations, et l’AFP n’était pas en mesure de confirmer la véracité de ces propos.
A Moscou, les mesures de sécurité ont été “renforcées” autour des sites sensibles, selon un responsable des forces de l’ordre cité par l’agence TASS. Le FSB (forces de sécurité) a appelé les combattants de Wagner à arrêter leur chef.
Le procureur général russe Igor Krasnov a informé le président Vladimir Poutine “de l’ouverture d’une enquête pénale en lien avec la tentative d’organiser une mutinerie armée”, a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Le chef de l’Etat est “continuellement informé” par les services de sécurité, a-t-il ajouté.
Le patron de Wagner avait auparavant affirmé que des frappes russes avaient fait un “très grand nombre de victimes” dans les rangs de son groupe.
“Provocation”
Cette guerre ouverte expose les profondes tensions au sein des forces russes engagées dans le conflit ukrainien.
“Le comité des commandements du groupe Wagner a décidé que ceux qui ont la responsabilité militaire du pays doivent être stoppés”, a aussi dit le patron de Wagner dans un message audio, en appelant à ne pas opposer de “résistance” à ses troupes.
Il a enfoncé le clou en affirmant disposer de “25.000” combattants et appelant les Russes à les “rejoindre”.
“Nous sommes 25.000 et nous allons déterminer pourquoi le chaos règne dans le pays (…) Nos réserves stratégiques, ce sont toute l’armée et tout le pays”, a déclaré Evguéni Prigojine dans un message audio, appelant à “mettre fin au désordre”.
Les factions russes rivales ont commencé à “se dévorer entre elles pour le pouvoir et l’argent”, s’est félicité le chef du Renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov.
“Nous suivons la situation et nous allons nous entretenir avec nos alliés et partenaires au sujet de ces développements”, a fait savoir pour sa part le porte-parole du conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, Adam Hodge.
L’armée russe recule dans plusieurs secteurs du sud et de l’est de l’Ukraine, avait dit vendredi le patron de Wagner, contredisant les affirmations du Kremlin selon qui la contre-offensive de Kiev est un échec.
“L’armée (russe) se retire dans les zones de Zaporijjia et de Kherson (sud), les forces armées ukrainiennes poussent”, a déclaré Evguéni Prigojine dans un entretien vidéo publié sur Telegram.
“La même chose se passe à Bakhmout, l’ennemi pénétrera de plus en plus profondément dans notre défense”, a ajouté l’homme d’affaires, en référence à une ville de l’est que les Russes affirment avoir capturée mais où les Ukrainiens disent avoir progressé sur les flancs ces dernières semaines.
“Il n’y a aucun contrôle, il n’y a pas de succès militaires” de Moscou, a encore cinglé M. Prigojine, affirmant que les militaires russes “se lavent avec leur sang”, une manière d’affirmer qu’ils subissent de lourdes pertes.
Invérifiables de source indépendante, les propos du patron de Wagner contredisent en tout cas ceux de Vladimir Poutine et de Sergueï Choïgou, selon qui l’armée russe “repousse” tous les assauts ukrainiens.
Le ministère russe de la Défense a cependant averti, après les déclaration du chef de Wagner, que l’Ukraine se prépare à attaquer du côté de Bakhmout en “profitant de la provocation de Prigojine pour déstabiliser la situation”.
Ces derniers jours, M. Poutine a répété que la contre-offensive ukrainienne était un échec et que les forces de Kiev avaient essuyé des pertes quasi “catastrophiques”.
M. Prigojine a qualifié de “profonde tromperie” les déclarations victorieuses de Moscou, accusant l’état-major de “cacher” les difficultés et les pertes russes sur le terrain.
Alors que de nombreux opposants et anonymes russes sont en prison pour avoir critiqué le conflit en Ukraine, le chef de Wagner a ouvertement remis en question les raisons pour lesquelles l’intervention militaire a été lancée.
“La guerre était nécessaire pour qu’un groupe de salauds soit promu”, a-t-il fustigé, accusant aussi “les oligarques” russes qui “avaient besoin de la guerre”, alors que Kiev était selon lui “prêt à n’importe quel accord”.