La dirigeante birmane s’est dite «profondément désolée» pour les civils «pris au piège» de la crise. La prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi a assuré mardi que son pays était «prêt» à organiser le retour des plus de 410.000 Rohingyas réfugiés au Bangladesh voisin. «Nous sommes prêts à débuter la vérification» des identités des réfugiés, en vue de leur retour, a-t-elle assuré dans l’enceinte du parlement, à Naypyidaw, la capitale birmane. Ce discours télévisé était très attendu après plus de trois semaines de troubles dans l’ouest de la Birmanie. Aung San Suu Kyi n’avait jusqu’ici que mollement appelé l’armée à la retenue et à épargner les civils.
«Nous condamnons toutes les violations des droits de l’homme», a ajouté Aung San Suu Kyi, sans citer l’armée, accusée d’incendier des villages et de tirer sur des civils. L’ONU parle d’«épuration ethnique». «Les forces de sécurité ont reçu des instructions» afin de «prendre toutes les mesures pour éviter les dommages collatéraux et que des civils soient blessés» lors de l’opération antiterroriste, a-t-elle encore dit. «Nous sommes profondément désolés pour les souffrances de tous ceux qui se sont retrouvés pris au piège de ce conflit», a-t-elle ajouté, évoquant les civils étant partis en masse au Bangladesh, mais aussi les bouddhistes ayant fui leurs villages dans la région.
«Nous ne voulons pas que la Birmanie soit divisée par les croyances religieuses», a-t-elle insisté, alors que l’opinion publique birmane est chauffée à blanc par les critiques internationales sur le sort des Rohingyas. Depuis le début de la crise, la population soutient massivement le gouvernement civil mais aussi l’armée, et les critiques envers la communauté internationale se multiplient sur les réseaux sociaux de ce pays bouddhiste à plus de 90%, où les musulmans sont vus comme une menace à l’identité nationale. Aung San Suu Kyi, fille du père de l’Indépendance birmane et icône dans son pays, a précédemment dénoncé «l’iceberg de désinformation» véhiculé par les médias internationaux sur la crise.
Les généraux restent très puissants malgré la dissolution en 2011 de la dictature militaire qui a joué sur la peur de l’islamisation de la Birmanie pendant ses décennies au pouvoir. Le chef de l’armée, le général Min Aung Hlaing, est, dans l’ombre, l’homme clé dans ce dossier. Les violences et discriminations contre cette minorité musulmane se sont intensifiées ces dernières années: traités comme des étrangers en Birmanie, ils représentent la plus grande communauté apatride du monde. Depuis que la nationalité birmane leur a été retirée en 1982, ils sont soumis à de nombreuses restrictions: ils ne peuvent pas voyager ou se marier sans autorisation, et ils n’ont accès ni au marché du travail ni aux services publics.
(Avec AFP)
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