MAMADOU DIALLO, ANCIEN INTERNATIONAL SENEGALAIS «Le football Sénégalais sombre au fil des années»

Depuis la finale de la Jeanne d’Arc de Dakar en 1998, perdue contre le club tunisien de Sfax, aucun club sénégalais ne parvient plus à s’extirper du piège que constitue désormais le premier tour des compétitions africaines. Et ce, malgré l’avènement du professionnalisme en 2009. Gorée et Niary Tally, les deux représentants sénégalais éliminés d’entrée, constituent une illustration, comme s’il en faudrait davantage.

Qu’est ce vous pensez des clubs sénégalais qui se font éliminer très tôt en compétition africaine ?

D’abord je pense qu’il faut beaucoup travailler, parce que jouer ce championnat et espérer aller en Afrique, c’est une aberration. Quand on voit les clubs jouer, c’est désolant, mais il n’y ‘a pas ni rythme ni cohésion. En plus, ce sont les mêmes joueurs qui valsent de club en club. Au moins, pour une équipe qui doit jouer l’Afrique, elle doit effectuer de bon recrutements, ne pas se contenter seulement de joueurs locaux. Il lui faut aller dans la sous-région, de voir les meilleurs joueurs et les engager. Puisque les styles sont différents d’un pays à un autre. On aura aussi besoin de certaines valeurs comme le mental, les conditions de la gagne, qui est le maitre mot de tout club qui participe à une compétition. Je disais tantôt que le niveau du championnat a progressé ces deux dernières années, mais pour faire ses preuves en Afrique cela devient difficile. Voyez des équipes comme Horoya, elle a fait de bonnes recrues, avec Pape Amadou Touré (défenseur) et Khadim Ndiaye (gardien de but). Une des raisons qui peut expliquer que l’équipe guinéenne élimine tour à tour nos représentants sur la scène africaine. Douanes en 2016 et Gorée ce dimanche, en ont fait les frais.

Est-ce au niveau des clubs ou le bât blesse ?

Dans la logique, il faudrait qu’on travail d’avantage parce que nos équipes sont en dessous de la moyenne. Pour rivaliser, il nous faut faire mieux que ce que nous faisons en championnat. Quand s’y ajoute aussi la maladresse de nos attaquants qui ratent beaucoup d’occasions. Donc, il faut un travail au préalable, c’est-à-dire, un travail spécifique comme on le fait avec les gardiens. Les attaquants aussi doivent avoir quelqu’un qui les aide pour évoluer. Un avant-centre c’est un buteur, il doit forcément être rusé. Nos attaquants ne tirent pas beaucoup au but. Le travail en club ne suffit pas, il faire un travail individuel. Même si un match se gagne sur des détails. Là où le bas blesse c’est au niveau de la qualité des joueurs, ils sont un peu limités. Je ne pense que les entraineurs sont fautifs, sinon, les responsabilités sont partagées. Mais est-ce qu’on la qualité des joueurs dont on a besoin ? Est – ce que les joueurs dans ce championnat font preuve de régularité en faisant des prestations acceptables pendant cinq ou six matches d’affilée. Ils ne le peuvent pas. On voit un attaquant marquer dix buts en une saison et seulement six la saison suivante. Il est important que les joueurs répètent leurs gammes en essayant de s’améliorer au quotidien. C’est comme cela qu’on pourra évoluer. Pour être honnête, je pense qu’on n’est pas encore prêt à concurrencer les équipes africaines. On peut passer le premier tour, mais le palier supérieur devient plus compliqué.

Pensez-vous que le championnat est au niveau ?

Comme je le disais avant le début des compétitions africaines, l’équipe de Gorée allait être éliminée au premier tour. Par rapport à Horoya, les insulaires ne pèsent pas lourd, ni sur le plan financier, sur le plan environnemental et organisationnel. L’équipe guinéenne est très structurée. Quant à une équipe comme Niary Tally, elle a perdu deux de ces meilleurs joueurs. Pour l’Afrique c’est autre chose, il faut se préparer à tous les niveaux. En faisant de bons recrutements et ne pas se baser seulement sur les joueurs évoluant dans ce championnat. Mais il ne faut pas oublier aussi que nos clubs ne peuvent pas garder leurs meilleurs joueurs parce que les moyens font souvent défaut. Dès qu’il est au top il est adulé de partout et veut découvrir autre chose.

Le manque de moyens aussi est problématique ?

Les moyens font défaut, mais il faut la formation à la base. Le championnat aussi n’a pas de qualité. On regarde un match de ligue1 mais on dirait des footballeurs de rue. Ces deux dernières années le calendrier a été respecté, les équipes étaient en forme. Le mal c’est que les joueurs ne sont pas réguliers, ils sont bon aujourd’hui et demain médiocres. Je peux dire qu’ils sont comme le dollar, ils  s’apprécient et se déprécient. Les mêmes faits sont constatés aussi en sélection nationale, la vitrine du football sénégalais. Depuis longtemps on dit qu’on a une bonne génération et qu’elle fera la différence, mais cela tarde à venir. Tout ce que je peux dire, c’est le football sombre d’année en année. Il est temps qu’on réagisse en faisant un travail dans le long terme pour que la relève soit meilleure.

 

Par Fafi DIOUF

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