Des franges importantes de la jeunesse dakaroise se sont mobilisées pour accueillir les Lions du Sénégal. Les effets de l’impact de la médiatisation de la Can constituent des pistes à explorer pour comprendre réellement cette forte mobilisation de la jeunesse sénégalaise. Le foot constitue un marché privilégié des Nouvelles technologies de l’information et de la communication.
L’accueil des Lions est frappant par son caractère massif, son ampleur, par sa composante jeune et les sens pluriels de ses messages audibles et inaudibles. C’est simplement dire que cet accueil brusque, inattendu après une double défaite en poule et en finale de l’équipe sénégalaise face aux Fennecs de l’Algérie. L’accueil est par son essence événementielle chargé de sens et de significations. Les félicitations à l’équipe nationale traduisent à n’en pas douter un message manifeste de satisfaction sportive des résultatsdes prestations des joueurs sénégalais.
Les Lions ont joué la finale, l’épreuve à laquelle toutes les équipes en compétition aspirent et aspireront. C’est une performance que les Sénégalais et les Algériens auront été les seuls à réaliser. Les Lions ont livré, dans l’entendement des supporters une bataille rude, exemplaire contre un adversaire de qualité technique et tactique indiscutable. Féliciter cette bravoure de son équipe nationale par une mobilisation sociale de reconnaissance collective de tout un peuple et sa jeunesse, relève de la sportivité. Le phénomène est identique dans de nombreux pays africains, à l’occasion de cette dernière Coupe d’Afrique. On fête chez soi, le trophée ou une performance digne du rang de son équipe, et des contextes propres à chaque pays en compétition.
Le ressentiment d’une injustice subie par les Lions du Sénégal face aux Fennecs semble s’être glissé entre les lignes des messages de cette forte manifestation de la jeunesse. Ce ressenti semble avoir déclenché la réaction massive des Sénégalais. Ils se sont révoltés contre la tournure de la finale. L’esprit anti- sportif des adversaires de l’Équipe nationale sénégalaise est au centre de la révolte et de la reconnaissance d’un mérite inabouti par un concours de circonstances inacceptables : agressivité des adversaires et passivité de l’arbitre, la mal chance de la vidéo.
Les Sénégalais ont profondément ressenti une défaite injuste privant l’équipe sénégalaise du trophée à leur portée et qui devrait revenir légitimement au Sénégal. Les manifestants semblent dire que les Lions ne méritent guère ce résultat quasi fabriqué par l’injustice subie. Tous les fans des Lions sont au moins d’accord que les Lions ont joué, les Algériens ont gagné dans la douleur. Les Algériens n’ont pas joué à la régulière. Ils ont à la limite, vidé l’esprit de la haute compétition africaine par des comportements frisant la triche collective et individuelle : les agressions multiples sur l’adversaire, la pression psychologique sur un arbitre incapable de freiner l’agressivité exagérée contre le porteur du ballon.
Ce ressenti national d’une injustice et d’un esprit mal sain dans une haute compétition bâtie sur des valeurs et un esprit sportif a nourri consciemment ou inconsciemment, ce déplacement massif de la jeunesse. La forte mobilisation a d’ailleurs réconforté plus d’un joueur de l’équipe nationale. Les jeunes manifestants ont vengé les Lions. Le message du cœur est passé. La médiatisation de la Coupe d’Afrique n’est point étrangère à cette mobilisation de la jeunesse.
La Can est et reste la fête de la jeunesse. Les jeunes sénégalais à l’instar des jeunes de la planète constituent des cibles privilégiées de l’impact massif des effets de la communication globalisée. Le foot est de nos jours un marché de la communication globalisée par les Ntic. L’usage du téléphone fait partie de la manière de vivre, d’être et d’exister. C’est un levier d’influence sans précédent sur les jeunes.
Les images de la Can circulant par milliers en l’espace d’une seconde passent par le portable, l’écran de télévision et l’internet. Les jeunes suivent évidemment, les matchs à travers les portables, l’internet, les réseaux sociaux et les écrans de télévision. Les jeunes sont en réalité au cœur de la Can. Ils suivent tous les matchs des équipes nationales. Ils consomment et inter-réagissent entre eux pendant un mois à travers des ressentis, des images, des messages et des produits dérivés de la Coupe d’Afrique. Ils deviennent au fil de l’édition sportive des passionnés, des consommateurs et des acteurs du foot.
La fibre patriotique est le canal principal que les médias utilisent naturellement, pour capter, véhiculer cette passion frénétique pour son équipe nationale, pour ses stars, pour l’élite africaine du foot. Le sentiment d’appartenir à une équipe provoque, ici et là, des liesses, des tensions, le renforcement des sentiments d’appartenance et de cohésion sociale et culturelle. L’accueil patriotique des Lions cristallise, cet impact des nouveaux outils de communication moderne sur la jeunesse et sur les populations rurales et urbaines. Les manifestants étaient ravis de prendre des photos, de faire circuler des images et de vivre de l’intérieur un évènement. Ce sont les jeunes qui ont organisé ce rendez-vous avec eux- même et avec les joueurs de l’équipe nationale.
Ils ont démontré à travers ce déplacement massif qu’ils sont des héros, des acteurs et des juges de l’histoire de l’équipe nationale. Demain, ils pourraient organiser des manifestations à la hauteur d’un ressentiment collectif, individuel et des aspirations profondes la jeunesse sénégalaise. Et les Ntic contribuent à libérer les énergies, les ressentis, la parole, l’image et les esprits.