Les enjeux sportifs et politiques de la défaite des Lions

L’Équipe nationale d’Algérie -les Fennecs- est consacrée championne du continent africain ce 19 juillet 2019 au Caire. Reconstruite en moins d’une année, elle a su se hisser au sommet de l’élite africaine. Le Sénégal est vice-champion. Après 17 ans d’efforts, les Lions du Sénégal ne parviennent toujours pas à soulever le trophée. La défaite de l’Équipe nationale sénégalaise mérite une réflexion approfondie en raison de ces enjeux sportifs et politiques.
Le peuple sénégalais a rendu un vibrant hommage mérité à ses Lions. Le Sénégal, champion d’Afrique. La jeunesse attendait ce rendez-vous avec son équipe. Le rêve de caresser le  trophée pourrait difficilement se réaliser à l’occasion de la dernière finale de la Coupe d’Afrique. L’évènement aurait été simplement de l’ordre de l’exceptionnel.
Deux défaites successives, édifiantes au sujet de la supériorité des joueurs algériens. Ils ont imposé leur jeu en fonction du choix de leur rythme et un rapport de force physique et mentale aux Sénégalais. Ces deux victoires consacrent le couronnement de l’entraîneur algérien. Il a su bâtir son équipe en moins d’un an. Il a une équipe, un style, une tactique de jeu variant en fonction de l’adversaire et des enjeux du match du jour.
C’est une grande équipe algérienne qui revient devant la scène du foot africain et mondial. Elle dessine à l’horizon sans aucun complexe de supériorité  sa trajectoire. À l’opposé de ce modèle algérien en reconstruction sur des bases locales et internationales, dans un esprit de combativité et d’agressivité porté par un mental de fer, l’équipe sénégalaise peine dans la douleur.
Elle ne réussit pas encore à trouver ses marques, son modèle de jeu, sa personnalité, son style et son esprit. Cette recherche effrénée d’un modèle  dure depuis près 17 ans. Les épreuves se succèdent. Le constat est toujours là. La pilule des défaites demeure toujours difficile à avaler.
Les Lions ont perdu en finale contre le Cameroun à la Coupe d’Afrique de  2002 et à l’édition africaine de 2017 en quart de finale. Les Algériens ont réédité un scénario quasi identique parfaitement exécuté sans état d’âme, le vendredi dernier.
L’enjeu de la dernière défaite contre les Algériens réside avant tout dans la répétition de l’histoire des carences individuelles et collectives notoires, des erreurs techniques, tactiques, humaines. Les Lions ont pêché par le déficit d’un esprit de combativité et de lucidité défaillant à des moments cruciaux d’une haute compétition sportive.
Les Lions n’ont pas capitalisé ces expériences négatives aux effets démoralisateurs et déstabilisateurs des rangs. Il faut interroger les capacités de l’encadrement technique à concevoir un projet et la faiblesse congénitale d’un projet de jeu des Lions. Sans projet, sans des joueurs suffisamment imprégnés des enjeux des techniques et des tactiques, point d’Équipe nationale.
Notre potentiel humain est énorme. Tous les observateurs semblent au moins faire l’unanimité au sujet de cette richesse de l’équipe sénégalaise. Nous avons de l’or humain. Nous avons un peuple collé à ses joueurs. Le Sénégal est et reste, une nation de foot. L’accueil triomphal du retour des Lions cristallise cet amour viscéral et des passions sportives au cœur du Sénégalais.
Paradoxalement, nous n’avons encore ni un encadrement national à la hauteur de la mission de la reconstruction d’une équipe d’envergure continentale, ni une Équipe nationale autour d’un projet de jeu, un état d’esprit collectif.
Cette responsabilité partagée entre l’encadrement et les joueurs, ne saurait occulter l’absence d’une vision politique cohérente du foot sénégalais. L’État du Sénégal est confiné à l’âge de l’amateurisme sportif étatique, l’exploitation des émotions et des passions populaires.
Les campagnes de la Can se succèdent. Elles produisent des effets identiques : mobilisation populaire, prétentions démesurées affichées sur les toits d’être les meilleurs, ignorance des réalités du sport du continent africain et au bout, toujours la déception et la désillusion collective d’un peuple meurtri.
L’État du Sénégal, la fédération ne réussissent point à faire du foot, une des priorités de la politique de sa jeunesse, de la promotion des talents nationaux  pour la réussite sociale et économique. Bien au contraire !
Le foot organisé, pensé et intégré dans les politiques publiques de l’État est plutôt réduit à une affaire exclusive des Clubs, des professionnels et des fédéraux. Ces acteurs n’ont pas, malheureusement, les moyens financiers et humains pour reconstruire une équipe nationale. Ils n’ont d’ailleurs aucune influence sur les destinées du foot national.
L’Équipe nationale se transforme ainsi, d’une décennie à l’autre, en une équipe des joueurs des Clubs occidentaux. Ils ont certes l’amour de la patrie et la passion du ballon rond. Ils sont des professionnels aguerris sur les terrains de jeu européens.
Ils n’ont pas été façonnés localement. Il faudra, tôt ou tard, prendre en charge ces questions fondamentales de reconstruction d’une Équipe nationale à la hauteur du trophée continental et des aspirations légitimes de la jeunesse sénégalaise. Elle est plus que jamais sportive et patriotique dans son âme.

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here