Mali – Le contingent sénégalais interdit d’entrée : Goïta bloque les Jambaars

Depuis un mois, les militaires sénégalais déployés au Mali attendent la relève qui est bloquée à Dakar parce que l’espace aérien malien leur est fermé. Il s’agit d’un coup de force de Goita, qui répond de manière aussi étrange aux sanctions de la Cedeao contre son régime.

 

Au niveau de l’Armée, l’information du blocage du contingent a été confirmée. Elle ne commente pas les raisons évoquées ci-haut. D’après elle, les questions de déploiement se règlent au plus haut niveau. «On nous demande de déplo­yer, on le fait. Mais, les raisons que vous invoquez sont vraiment d’ordre politique parce que cela relève des autorités. Cela dépasse l’Armée. Le contingent est toujours là et celui qui est au Mali attend la relève», admet un officier supérieur.
En vérité, il s’agit d’une mesure de rétorsion de la junte malienne contre Dakar pour protester contre les sanctions de la Cedeao. A quoi joue le Colonel Assimi Goïta en fermant de façon insidieuse son espace aérien à l’une des plus grandes forces militaires de la Minusma ? Pourquoi déciderait-il de se priver des Casques bleus sénégalais qui sont les plus respectés en territoire malien ? Après les massacres à Ogossagou au Centre du Mali entre 2019 et 2020, c’est le 10ème contingent sénégalais, composé de 850 Jambaars, qui avait réussi à stabiliser la zone en faisant preuve d’«exemplarité». Général Philippe Pottier, chef d’Etat-major de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali, faisait ainsi l’éloge du 10ème bataillon, qui était déjà en fin de mission. C’était le 23 mars dernier. Pour lui, les «deux années de présence du bataillon sénégalais ont permis la signature d’un accord de paix entre les communautés». «Je pense que c’est une grande réussite de la mission. C’est l’exemple même de ce que la Minusma peut apporter au Mali dans la réconciliation entre les communautés», avait déclaré Gl Philippe Pottier. Il avait salué «l’engagement du Sénégal au service de la paix» et apprécié le comportement des Casques bleus sénégalais «extrêmement courageux qui n’hésitent pas à prendre les risques pour la protection des populations».
Après ces éloges à l’endroit des hommes du Colonel Théodore Adrien Sarr, commandant du 10ème détachement déployé au Mali, le Colonel Mathieu Diogoye Sène et ses troupes du 11ème bataillon devaient prendre la relève pour poursuivre le chemin tracé par des milliers de Jambaars, qui fréquentent les missions onusiennes depuis plusieurs décennies. «Nous sommes prêts pour rejoindre le terrain. Les unités sénégalaises sont des unités qui sont aguerries. Aujourd’hui, quelle que soit la durée d’attente, le bataillon est prêt à exécuter la mission dans le théâtre malien», avait assuré le Colonel Sène. Aujourd’hui, tout a changé au Mali : L’Armée française et les Forces spéciales européennes ont levé… les camps, après quasiment 10 ans de missions.
Le 15 mai, avec un propos revendicateur, les autorités de Transition malienne annonçaient leur retrait des «organes du G5 Sahel, y compris la Force conjointe». Mis en place en 2014 puis lancé en 2017 par le Mali et le Burkina Faso, la Mauritanie, le Tchad et le Niger, alors que l’étau des djihadistes se resserrait autour de ces Etats, le G5 est composé d’environ 5000 militaires. Il y a aussi la montée des nationalistes, qui voient d’un mauvais œil la présence de militaires étrangers sur leur territoire. Ce sentiment semble être alimenté par la junte, frappée durement par des sanctions de la Cedeao pour son refus d’organiser la transition dans les délais requis. Est-ce que tous les autres pays membres de l’organisation sous-régionale, contributeurs à la Minusma, seront-ils logés à la même enseigne ? Il y a le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Nigeria…
Cette décision, qui frappe le contingent sénégalais, montre la volonté clairement affichée de la junte de confier les clefs de son écosystème sécuritaire aux paramilitaires de Wagner. Son déploiement au Mali a stupéfait la Communauté internationale. Dès fin mars, ils ont été accusés, ainsi que les Fama, d’avoir commis des exactions sur des civils à Moura, situé dans le Centre du Mali. Qui est plongé depuis 2012 dans une crise sécuritaire profonde.

avec lequotidien

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